Le 6 juillet dernier, François Baroin annonçait la suppression à venir de la possibilité pour les familles d’étudiants de cumuler l’aide au logement (APL) pour le logement de l’étudiant avec la demi-part fiscal pour les parents de l’étudiant.
En d’autres termes, les parents avaient à choisir entre obtenir une APL pour le logement supplémentaire de l’étudiant ou la possibilité de rattacher ce dernier au foyer fiscal. L’annonce avait suscité un tollé, et c’est compréhensible : le gouvernement semblait avoir confondu logement étudiant et indépendance financière de l’étudiant… Faute !
D’une part, considérer le cumul APL – ½ part fiscal comme une niche fiscal est pour le moins curieux. Les étudiants qui se logent hors du domicile de leurs parents le font pour réduire leurs temps de transports, pour se rendre dans des écoles ou des universités éloignées de leur domicile. C’est donc une double charge pour leurs parents. Ces étudiants se logent à proximité de leurs études le temps de celles-ci, et donc uniquement une partie de l’année scolaire.
Plus grave, cette disposition était appliquée, elle mettrait gravement en péril l’avenir de nombreux étudiants, le entraînant sur la voie sombre de la paupérisation et de la précarité. Les étudiants et leurs parents devraient alors choisir entre l’augmentation de l’imposition du foyer fiscal, ce qui réduira les fonds que les parents peuvent consacrer à leurs études, ou la suppression de l’APL, ce qui obligera le foyer à trouver d’autres ressources pour financer leurs études et le coût de ce logement.
Les conséquences sont assez faciles à prévoir : une partie de ces jeunes se résoudrait à travailler pour financer ces charges, prenant alors le risque de l’échec scolaire. Il n’y aurait évidemment pas assez de jobs étudiants pour répondre à cette nouvelle demande. Enfin, une autre partie de ces jeunes abandonnerait purement et simplement l’enseignement supérieur, faute de moyens… ou d’avoir trouvé un emploi étudiant.
Sans compensation par un système de bourses adaptés, et des logements étudiants en nombre, cette mesure privera essentiellement la classe moyenne, dont les parents sont trop riches pour bénéficier des aides sociales, de l’accès à l’enseignement supérieur.
Ce matin, la presse nous apprend que le gouvernement entend revoir cette idée, et conditionner la suppression du cumul APL – ½ part fiscal à un plafond correspondant en gros aux deux plus hautes tranches d’imposition (30 et 40%), soit 26.030 euros de revenus annuels par part fiscale.
Si l’on se base sur cette annonce, l’impossibilité de cumuler concernerait les familles déclarant un revenu de 78090 euros pour un ménage de deux enfants…. Mais déjà plus que 52060 euros si ce foyer est monoparental, pour le même nombre d’enfants. Le mode de calcul est tout de suite beaucoup moins juste, pour des revenus qui, rappelons le, ne sont éligibles à aucune aide sociale.
Autre point, le coût des études. A première vu on peut se dire qu’un foyer affichant un revenu aux alentours de 6500 euros nets par mois, avec deux enfants, peut faire face à de telles dépenses. Et bien tout dépend des cas, et notamment des charges supportées par les parents.
Lorsqu’un étudiant doit prendre un logement, ça n’est pas pour s’éclater loin de papa-maman, mais pour s’épargner de longs trajets entre son domicile et son établissement, afin de réussir sa scolarité. N’oublions pas que cet éloignement est parfois rendu obligatoire par le manque de transports entre ces deux lieux, l’absence d’une desserte régulière, ou encore leur coût prohibitif !
Une telle installation entraîne de nombreux frais connexes, tels que l’accès aux fluides (eau, gaz, électricité), le téléphone, ou encore les impôts locaux… les étudiants n’en étant pas toujours exemptés. La facture est lourde pour les parents, et contrairement à ce que semble croire le gouvernement, elle ne vient absolument pas en déduction de la vie du ménage, si ce n’est sur le poste alimentaire. Et tout cela avant même d’évoquer le coût des frais de scolarité !
Et on pourrait aller encore plus loin, en s’attaquant par exemple aux dysfonctionnements des sécurité sociale étudiante, qui obligent bien souvent les parents à avancer des sommes conséquentes pour les frais médicaux des étudiants, faute d’avoir un système capable d’assurer la gestion de la santé de nos jeunes.
Voilà pourquoi le gouvernement serait bien inspiré de revoir sa copie –comme d’ailleurs l’y invite le MET, mouvement des étudiants classé à droite (ex-UNI)-, et de revenir sur la suppression du cumul APL – ½ part fiscal, qui ne permettrait aucune économie budgétaire, mais qui grèverait dangereusement le budget des familles. Cette mesure, qui menace la jeunesse, doit être abandonnée si l’on ne veut pas sacrifier une génération. Il en va de l’avenir de notre jeunesse !