24 septembre 1991. J’ai 17 ans, et je suis en classe de terminale B au lycée trop cool de la-ville-d’à côté. Dans ma classe, il y a A, C et N. Mes meilleurs potes.
Deux filles, deux garçons. N et moi en tête de classe, A et C en queue de peloton. N est le meilleur en tout, et nous sommes trois à tenter de copier sur lui mais il écrit vachement mal. Pire qu’un Doc. C et moi on fout le feu en cours d’éco, quand ce n’est pas A et moi que la prof traite d’anti-communistes primaires. Pourquoi primaires ?
24 septembre 1991. Nevermind sort aux USA. Bientôt, à grand renfort de Smells like teen spirit sur MTV, le monde va changer. Le grunge, qui définit musicalement si bien la Génération X, va envahir les enceintes de toutes les platines du monde –du moins occidental- et tous les écouteurs de Wakman –l’ancêtre de l’Ipod. Nevermind deviendra l’étendard de toute une génération… Désenchantée.
Mais pour l’heure, Nirvana n’est qu’un petit groupe de punk rock signé par le label Sub Pop. Le succès vient de la diffusion non stop du clip sur MTV. Et surprend tout le monde. Jusqu’à Kurt Cobain, le chanteur emblématique du groupe. Qui plonge le nez droit dans la cocaïne. 27 millions d’exemplaires vendus pour l’album Nevermind. Lourde pression sur les épaules du groupe et plus particulièrement celles du chanteur.
Avril 1992. Je révise mon bac. Enfin, c’est un grand mot. Je prépare mon bac. Vaguement. L’idée même de bachoter –c’est-à-dire apprendre quasiment par cœur, sans réelle réflexion- me révulse.
Je préfèrerais disposer de documents à commenter plutôt que d’emmagasiner un stock de connaissances dont je doute d’avoir un jour l’utilité. Du moins comme ça, par cœur, sans documentation. Alors je m’évade. En musique. Nevermind… avec Nevermind.
Le succès commercial de Nirvana est désormais planétaire. Le groupe poursuit son ascension musicale, et sort l’album In Utero fin 1994. Ce qui éloigne le groupe de sa trajectoire punk. Kurt Cobain, lui, comprend mal cette notoriété qui le piège. Pris dans les difficultés conjugales avec Courtney Love, le nez dans la drogue et la tête dans la dépression, il finit par se faire sauter la cervelle, le 5 avril 1994. Jour de deuil pour des millions d’adolescents à travers le monde. En écho au désenchantement et à la désillusion de ceux qui se reconnaissent dans sa musique.
Cobain mort, Nirvana devient un héritage commercial : sortie de l’album Unplugged (on MTV), et Tshirt avec la tête du leader charismatique lorsqu’elle était encore entière.
Personne ne se demande vraiment si ça n’est pas inversement intellectuel aux attentes de Kurt Cobain : ça vend, pourquoi s’encombrer de principes ?
Le grunge survit quelques temps, avec l’envolée du label Sub Pop, et le mouvement porté par un certains nombre de groupes tels que Pearl Jam ou Soundgarden, dans le sillage de Nirvana. C’est déjà ça.
Vingt ans après qu’en reste-t-il ? Nevermind est bien plus qu’un disque. Si ses riffs résonnent encore aujourd’hui, c’est parce qu’ils contiennent un cri. Celui de ma génération. A denial.
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