Star Wars, le réveil de la force

star-wars-force-awakens-official-posterVous avez bouffé du Star Wars jusqu’à l’overdose ces derniers jours : le rachat de la franchise par Disney a généré une avalanche de marketing qui a enseveli le monde entier. Beaucoup trop, évidemment.

Franchement, des oranges Star Wars, faut pas déconner. Ce déferlement vomitif ne peut qu’éloigner ceux qui n’ont jamais vu la saga et c’est bien dommage. Alors, si on revenait au film ?

Si vous n’avez jamais vu la saga, je vous le déconseille : vous passeriez à côté. Regardez plutôt les films dans l’ordre de sortie, donc les épisodes 4, 5, 6 suivis des épisodes 1, 2, 3 avant de regarder ce septième opus. En revanche, si vous connaissez déjà la franchise, allez-y sans hésiter : cet épisode ne vous décevra pas.

Que vous en dire sans spoiler le contenu ? Ce septième film est là pour poser les bases de la nouvelle trilogie : il fait à la fois le pont avec le Retour du Jedi, en permettant d’avoir des nouvelles des héros de la première trilogie, tout en présentant les nouveaux personnages de cette nouvelle série. Au menu, Finn, un stormtrooper passé du bon côté, Rey, une jeune pilleuse d’épave, Kylo Ren, un sous Darth Vader, et BB-8, un petit droïde aussi sympa que R2-D2.

Tout ce petit monde va croiser les anciennes gloires de la saga et l’intrigue révèlera les liens des uns et des autres. Un personnage important disparaîtra. Je ne vous dirai ni qui, ni comment, mais comme c’est du Disney un peu simpliste, j’avais deviné… Qui dit Mickey dit chasteté, vous ne verrez donc rien, pas même un bisou. Le film est donc visible par toutes les générations depuis le berceau. Enfin côté combats, il y en a, avec quelques petites nouveautés.

Mon avis ? Un film de transition, sans personnage énervant comme Jar-Jar Binks, à voir pour bien suivre qui est qui, qui est où, et qui en est où dans son évolution, en attendant que ça bouge au prochain épisode. J’ajouterais que dans cet opus, on retrouve pas mal de vieux amis, mais il manque tout de même quelqu’un… Enfin pour terminer, je n’ai pas pu m’empêcher de trouver que le très très méchant ressemble furieusement à Voldemort tandis que Kylo Ren a des faux airs de Professeur Rogue. Si, si…

Bref, Star Wars, le Réveil de la Force ne casse pas trois pattes à un canard, mais il n’y a pas de fausses notes pouvant agacer les puristes, et ça permet de patienter gentiment jusqu’au prochain. Hum, on dirait la définition du marketing… Encore et toujours. Le monde un peu moins magique de Disney.

Les Fauves

Ce dimanche, France 2 diffusait enfin, après une première déprogrammation en mai, Les Fauves, le documentaire de Patrick Rothman consacré aux relations entre Nicolas Sarkozy et Dominique de Villepin.

Les deux hommes se connaissent depuis longtemps. Leur rencontre comme leur affrontement date de la campagne de 1993. Nicolas Sarkozy, alors membre du premier cercle de Jacques Chirac, dirigeait la cellule présidentielle de celui-ci depuis le printemps lorsqu’à l’automne, il décida de rejoindre le staff d’Edouard Balladur…

D’ailleurs tout le monde confirme dans ce documentaire le rôle prépondérant que tenait Nicolas Sarkozy dans cette campagne : cela aura probablement intéressé aussi le juge Van Ruymbeke ! Mais revenons à nos moutons, et au choix que fait alors le ministre du Budget en soutenant le Premier Ministre Balladur : une véritable trahison de la part de celui qui était si proche de Jacques Chirac. Qui déclenche l’arrivée dans le dispositif chiraquien de Villepin, alors directeur de cabinet d’Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères et meilleur d’entre nous.

L’affrontement de deux candidats à travers ces deux hommes. Tout au long de leurs carrières respectives, ils ne feront que se recroiser, se jauger, se juger…  sans jamais vraiment se détacher de cette campagne de 1995, véritable déchirure de la droite qui n’est pas encore totalement soignée. A partir d’images d’archives et de témoignages de politiques – François Baroin, Xavier Darcos, Jean-François Copé, Michèle Alliot-Marie, Jean-Pierre Raffarin-, Les Fauves retrace cette époque où se trouvent les racines du mal qui ronge encore la droite aujourd’hui : la guerre n’a jamais vraiment cessé entre balladuriens-sarkozystes et chiraquiens.

Ce documentaire n’apprendra rien à ceux qui ont vécu cette histoire, aucune information ne vienant s’ajouter aux faits déjà connus. Cependant, ceux qui n’appartiennent pas à l’un ou l’autre des états majors en apprendront beaucoup sur ces vingt dernières années de vie politique à droite. Et notamment sur le véritable caractère de Nicolas Sarkozy, homme politique brillant mais horriblement teigneux et revanchard… et qui trahit par deux fois : en 1993, en rejoignant Balladur, et en 2006, en sabotant le CPE de Villepin en allant négocier avec Bruno Julliard, président du syndicat étudiant UNEF.

Véritable négatif de La Conquête, le film sorti en mai qui évoque l’ascension de Nicolas Sarkozy sous un angle plutôt positif, Les Fauves ne passe rien à l’actuel locataire de l’Elysée… qui apparaît tel qu’il est : calculateur, et plein de rancœur. Là où au contraire, Villepin est apte à passer par delà leurs affrontements, le remettant même en selle pour réintégrer les cercles chiraquiens à l’aube de 2002. Non seulement Sarko est rancunier, mais il entend aussi tuer politiquement ceux qu’il accuse de ses malheurs, et Villepin le premier. Comme avec l’affaire Clearstream, derrière laquelle il voit une manipulation de Villepin. La justice tranchera : Villepin sera relaxé deux fois, en première instance comme en appel.

Alors Sarkozy est-il capable de jugement ou sacrifierait-il père et mère pour être président ? C’est bien la question qui se pose après la vision de ce documentaire. Coléreux, impétueux, irrespectueux, ne reculant devant aucune trahison pour faire avancer sa carrière, l’actuel président n’en ressort pas grandi. Les Fauvesun documentaire à voir et revoir, pour voter en conscience lors des présidentielles de 2012.

La Conquête : mythe ou réalité ? *

6 mai 2007. Nicolas Sarkozy est élu Président de la République. D’avril 2002 à cette journée si particulière, Nicolas Sarkozy a tout fait pour accéder à la magistrature suprême. Pourtant en ce jour qui consacre une carrière, le futur président n’est pas à la fête : Cécilia n’est pas à ses côtés.

Dans le genre du biopic, biographie cinématographique, La Conquête se veut le film de l’accession au pouvoir de Nicolas Sarkozy. Cette accession au pouvoir comporte un corolaire, la destruction d’un mariage. Au moyen de flashback et de flash forward, Xavier Durringer découpe le film entre le déroulé du quinquennat de Jacques Chirac, et la journée du 6 mai 2007 au cours de laquelle Nicolas Sarkozy comprend qu’il sera seul à l’Elysée, et que tout est définitivement terminé avec Cécilia… qui n’ira pas voter.

En ce sens, le film suit une chronologie factuelle très proche de la réalité. De l’annonce à Nicolas Sarkozy par Jacques Chirac de la nomination de Jean-Pierre Raffarin à Matignon en avril 2002, à la fête de la victoire en mai 2007, en passant par les meetings et congrès de l’UMP, les réunions que l’on peut dater, les épisodes très médiatiques comme le voyage de Nicolas Sarkozy en Chine, les vacances du couple Sarkozy à Arcachon, ou encore les universités d’été de la Baule en 2005 avec le fameux jogging sur la plage de Dominique de Villepin, les faits sont précis et aisément reconnaissables.

Dans le même esprit, la mise en scène accorde une grande importance au cadre politique, jusqu’aux plus petits détails, par le choix des costumes, du maquillage, ou encore des décors. Si chacun peut aisément reconnaître l’Elysée, il faut imaginer le même niveau de reconstitution pour d’autres lieux moins connus du grand public, comme le ministère des Finances, ou encore, plus troublant, la fidélité quasi-totale à la salle de la commission exécutive comme au bureau de Nicolas Sarkozy à l’UMP.

Plus encore, la direction d’acteurs est époustouflante dans sa volonté de coller aux personnages dont elle s’inspire. Denis Podalydès, méconnaissable, incarne à la perfection un Nicolas Sarkozy finalement moins caricatural que l’on pourrait s’y attendre. L’accumulation des détails, des talonnettes aux gesticulations, s’efface relativement vite devant la force de l’incarnation du personnage et de son caractère. Bernard Lecoq dépeint un Chirac plus vrai que nature, certes parfois desservi par un texte très caricatural. Quant à Hyppolite Girardot, il campe un Claude Guéant parfait, avec toujours au coin des lèvres le même sourire ironique.

Moins réussies, en revanche, les incarnations de Dominique de Villepin par Samuel Labarthe, physiquement et psychologiquement éloigné du vrai, de Pierre Charron par Dominique Besnehard, à hurler de rire mais trop caricatural et vraiment beaucoup moins putassier que le vrai, ou encore Franck Louvrier, trop effacé par rapport au véritable personnage, plus volubile, plus populo, et beaucoup plus proche de la presse.

Une fois notés les éléments cinématographiques permettant de décrire le cadre, La Conquête montre très vite ses limites par rapport au sujet : tout cela reste une simple comédie. Si les répliques font mouches, certaines n’ont pas été sorties dans le contexte dans lequel elles sont présentées dans le film. Pour les fins connaisseurs de la vie politique, ce catalogue de petites phrases est parfois lassant… Le film fait de nombreuses impasses, probablement liées pour une part au temps cinématographique, et pour une autre part à des aspects juridiques. Ainsi, Cécilia est présentée comme étant partie non « sur un coup de tête, mais sur un coup de cœur ». Hum, si la petite phrase est vraie, l’histoire qui l’a menée à ce coup de coeur est un peu plus complexe… Ou des limites d’évoquer la vie privée sans risquer le procès.

De même, sur la conquête du pouvoir, en tant que telle, le film fait l’impasse sur un certain nombre de points. On ne voit pas qu’avant 2004, Sarkozy se fiche pas mal de l’UMP, ni qu’il ne pèse qu’un tiers des adhérents au moment de son élection… ce qui justifie sa stratégie envers les nouveaux adhérents, pour conquérir le parti, et réussir sa campagne présidentielle. C’est pourtant là son coup de génie dans la prise de l’UMP. Sans compter l’étonnante absence du personnage d’Alain Juppé, évoqué mais non représenté dans le film.

Politiquement, enfin, La Conquête ne présente aucun intérêt. Xavier Durringer réalise une comédie, et utilise pour ce biopic les ressorts de la parodie ou du moins, de la très franche exagération. Dominique de Villepin est décrit comme un conspirateur voulant à tout prix éviter à Nicolas Sarkozy d’être président, Chirac comme un président dépassé par les événements. C’est oublier que pendant ce même quinquennat, l’un a fait le discours de l’ONU, l’autre celui de Johannesburg ou encore celui du Vel d’Hiv. Pas vraiment des fous.

Que retenir alors de La Conquête ? Vraiment pas grand-chose…
Passé la lecture de premier niveau, qui apprend finalement assez peu de choses sur les coulisses de la vie politique tant la caricature réduit le propos, il ne reste qu’une accumulation de moments copiés / collés des offs et autres confidentiels des journalistes politiques, destinés à montrer une progression temporelle et de carrière, parallèlement à une régression sentimentale. Certes, beaucoup découvriront la double face de Nicolas Sarkozy, avide d’atteindre la plus haute marche du podium politique, et en pleine douleur personnelle lorsqu’il y parvient. Ou encore, l’importance pour Nicolas Sarkozy de disposer d’un équilibre dans sa vie sentimentale comme moteur de sa vie politique, de l’influence de sa vie privée sur son caractère et donc, dans ses réactions… et parfois les décisions qu’il prend. Même si encore, le trait est très exagéré, comme le montre la fameuse réplique sur la Ferrari.

Malheureusement, les faits relatés ne sont qu’abordés dans un large catalogue, sans aucune mise en perspective. Pire, en se voulant comique, le film tombe parfois dans l’excès, en usant d’un arrière goût de café du commerce, qui atteint son summum dans l’évocation romanesque mais non crédible de l’affaire Clearstream. Le génie politique de Nicolas Sarkozy passe également au second plan, le scénario préférant mettre en valeur l’urgence du carriériste, au mépris de la construction d’une stratégie politique brillante.

Enfin, La Conquête est légèrement vacharde pour Chirac, et vraiment à charge contre Cécilia Attias et Dominique de Villepin. De quoi casser le mythe d’un film destructeur pour le président… qui au contraire, bénéficie d’un traitement plus que sympathique, pour donner un film finalement très convenu qu’il faut voir pour être dans le vent, mais que l’on oubliera très vite.

*Cet article a été écrit pour Politiko et publié à cette adresse

Black Swan

Black SwanLe lac des cygnes revisité par Darren Aronosfky. Après PiRequiem for a dreamThe FountainThe Wrestler, on peut se demander ce que Darren Aronofsky est allé faire à filmer des entrechats. Ayez confiance… Que vous aimiez ou détestez ce film, vous n’en sortirez pas indemnes. Parés pour le voyage ?

Nina Sayers est une sage ballerine étouffé par une mère à la carrière avortée pour cause de polichinelle dans le tiroir, qui surcouve sa fille pour en faire l’étoile qu’elle n’a pas été. A 28 ans, Nina est trop technique, trop douce, trop propre sur elle… Pour parvenir à la perfection, il va falloir se salir un peu. Accepter son côté sombre. Grandir… Sera-t-elle à la hauteur ?

Poussée dans ses retranchements, luttant seule face à elle-même, Nina parviendra-t-elle à devenir celle qu’elle est ? Saura-t-elle passer de l’autre côté du miroir ? La caméra d’Aronosfky se fait enivrante pour filmer les corps et la douleur, utilisant les codes du film d’horreur pour mieux faire ressortir la violence qu’exige la métamorphose. Bourré de références (CarrieLes Chaussons rouges, mais aussi les propres films d’Aronofsky), oscillant entre rêve et réalité, pulsions et fantasmes, la construction se fait toujours plus dure, toujours plus intime, toujours plus douloureuse. Vincent Cassel en maître de ballet fou, à la fois mentor et initiateur, entraîne une Natalie Portman complètement habitée par le rôle sur son chemin de traverse.

D’une technique parfaitement maîtrisée, l’intensité de la scène finale n’est pas sans rappeler celle de Requiem for a dream. Jouant avec la grammaire cinématographique comme un savant fou, sans aucune retenue et ainsi parfaitement raccord avec le dépucelage qu’il met en image, Darren Aronosfky parvient à son but ultime : scotcher le spectateur pour qu’il assiste à ce moment rare, la naissance d’une femme, ou l’émotion à l’état pur, orgasmique. J’en tremble encore…

It has been an honour, mister Jack Bauer

3, 2, 1, 00:00:00:00… Le compteur de la série est revenu à zéro. Après 8 saisons, soit 192 épisodes, et un téléfilm (Rédemption, entre les saisons 6 et 7), Jack Bauer a tiré sa révérence. Plus qu’une série, 24 a constitué, dans le paysage audiovisuel américain, une petite révolution.

D’après un concept simple mais totalement novateur, consistant à ce que chaque épisode représente 1h, et que la totalité d’une saison représente une journée -le fameux events occur in real time-, la série a également utilisé de nouvelles manière de filmer, en utilisant le découpage de l’écran (split screen) présentant soit différents angles de prise de vue, soit différentes actions simultanées dans le temps. Un tempo destiné à maintenir une tension terriblement addictive, largement entretenue par le jeu de Kiefer Sutherland et de ses accolytes. Mention spéciale à Mary Lynn Rasjskub, interprète de la geekette Chloe O’Brian, célèbre autant pour sa moue boudeuse que pour son indéfectible soutien à Jack.

Pour parfaire cette recette efficace, 24 s’est appuyé sur une équipe d’excellents scénaristes, qui ont su créer un univers -celui de la Counter Terrorist Unit (CTU)- et des personnages complexes, oscillants entre patriotisme, traîtrise, humanité, dont bon nombre sont tombés au champ d’honneur des saisons successives, et menés par un anti-héros, Jack Bauer, forcé de faire la guerre à des adversaires souvent invisibles, et d’utiliser des moyens peu protocolaires pour parvenir à ses fins. 24, c’était aussi les questions purement politique, qu’il s’agisse d’éthique, de politique intérieure, de politique extérieure.

Chaque saison sera riche d’exemples de la complexité d’assurer la sécurité d’une nation en proie au terrorisme : de la présence dans la première saison d’un candidat noir à la présidentielle, qui sera élu au statut de la première dame, en passant par les milices, les contrats d’armement et relatifs aux matières premières, les droits civiques, les libertés individuelles, le rôle du président, celui du vice-président, le mille-feuilles des agences gouvernementales et la guerre qu’elles se mènent, les relations entre politique et terrain dans le domaine du terrorisme, les méthodes à employer avec la question évidente de la torture, et évidemment la notion même de patriotisme, et son rapport à la Constitution.

Sur le plan international, du méchant chef de guerre serbe aux opérations menées sur les différents théâtres d’opération, soulevant la question de l’ingérence, en passant par les barons de la drogue, le marché des armes sales héritées de l’empire russe, le double jeu de certains pays du Moyen Orient, les enfants de la guerre en Afrique… Autant de sujets et tant d’autres qui ont été abordés dans 24.

Si 24 a résonné aussi fort, c’est que la série a été diffusée pour la première fois moins de deux mois après les attentats du 11 septembre. Et dès le premier épisode, un avion explose… pour plonger le spectateur au coeur d’une lutte sans merci contre le terrorisme. La télé peut-elle penser les plaies d’une nation traumatisée ? Souvent qualifiée d’ultraviolente, la série finira par intégrer le questionnement sur la torture à la saison 7, signe que les temps changent. Pour autant, Jack Bauer continuera d’user des mêmes méthodes, tout juste en aura-t-il souligné l’utilité.

Il est maintenant temps de laisser Jack Bauer, l’anti-héros, par excellence, cet homme qui a sacrifié sa vie personnelle à la poursuite des pires terroristes, et de tourner la page. Avant de refermer la porte de la CTU, je vous ai compilé ici ma liste des 10 temps forts de 24. Bloop, bleep, bloop, bleep, bloop, bleep… 00:00:00:00.