Hollande, et après ?

56-44. Ce n’est pas le score du match de rugby d’hier (on est en finale, on est en finale, on est, on est, on est en finale), mais grosso modo celui de la primaire socialiste.

Après un ultime affrontement dans les urnes, François Hollande l’a emporté assez largement sur Martine Aubry, avec un score de 56,57% pour le corrézien contre 43,43% pour la Lilloise. C’est donc François Hollande qui portera donc les couleurs socialistes à la présidentielle, au printemps prochain.

Immédiatement, la boîte à images se met en route, et le PS réussit bien à faire passer son message d’unité. Dès sa première prise de parole, Aubry fait le geste. Sur le perron de Solférino, les deux candidats se donnent la main, ceux du premier tour les rejoignent pour la photo : l’adversité est loin, tous derrière Hollande et peu importe qu’il fut surnommé Flamby ou taxé de représenter la gauche molle. L’heure est au rassemblement au sein du parti socialiste, condition sine qua non pour espérer l’emporter en 2012.

Car la gauche a choisi Hollande, avec une confortable avance. Celui qui, il y a quelques mois encore, subissait en interne au PS un Tout sauf Hollande, de la part d’une frange de la rue de Solférino. Et pourtant. Dès le premier tour, le mystérieux corps électoral de cette primaire l’a placé en tête, avec 9 points d’avance. Les sondages lui en donnaient 10. Avouez que c’est kif-kif.

Restait alors à confirmer cette dynamique. Un à un, tous les battus du premier tour l’ont rejoint, laissant Martine bien seule pour mener la dernière bataille. Mais c’était logique : il fallait se rassembler sur le gagnant, pour lui donner la plus grande légitimité possible. Martine n’a certes pas démérité, mais François l’a largement emporté.

Reste maintenant à transformer l’essai, et ce ne sera pas facile. Ce qui m’a frappée, hier, c’est le non vote des quartiers.  Les banlieues ont boudé la primaire, malgré les déplacements des candidats. Ainsi selon les chiffres compilés par le Parisien, au premier tour, si Paris compte 13,7% de votants sur l’ensemble des électeurs inscrits, avec des pointes à 18,4% dans le 11ème ou 19,5% dans le 3ème, la participation peine à atteindre les 5% en Seine-Saint-Denis, et 5,67% dans le Val D’Oise. Avec un record à 2,37% à Garges-les-Gonesse. Dans le même temps, la moyenne nationale est de 6,14%.

Lorsqu’on regarde où ce sont portés les votes exprimés dans ces quartiers, les résultats ne sont guère marqués. Ainsi, si le score de Ségolène Royal est légèrement supérieur, celui d’Arnaud Montebourg est en général inférieur, ce qui ne donne pas plus de poids, in fine, à la gauche de gauche. Bref, les banlieues n’ont pas vu dans la primaire un espoir dans le fait de choisir le candidat de gauche.

Je ne crois évidemment pas à la théorie avancée par certains selon laquelle ce chiffre s’expliquerait par l’impossibilité pour les étrangers membres du PS de voter. D’une part c’est faux, ils pouvaient se rendre aux urnes et présenter leur carte du PS. D’autre part, cela ne change rien en terme de pourcentage du corps électoral ayant participé au primaire : à ce que je sache, s’ils sont étrangers, ils ne vont pas plus voter au printemps prochain. La question n’est donc pas là, et sert juste à instrumentaliser ce non vote pour plaider la cause du vote des étrangers. Grosse ficelle.

Reste que la question du vote des banlieues, traditionnellement porté à gauche, se pose. S’abstiendront-elles, ou hésiteront-elles entre les candidats classiques et les extrêmes, de droite comme de gauche ? François Hollande tient là l’un de ses défis majeurs : parvenir à parler à cette population mais surtout, à être entendu.

Car le danger bleu Marine guette… Non pas spécifiquement en banlieue, mais partout. Or la question sera bien de se qualifier au second tour. A l’heure actuelle, de nombreux candidats jouent la carte facile de l’anti-Européanisme, taclant l’Europe et l’Euro à tout bout de champ, en faisant croire à la population que sans l’Euro ni l’Europe, la vie serait plus belle. Qu’importe les conséquences réelles qu’engendrerait la sortie de l’Euro, ou la complexité d’en sortir : ceux qui tiennent ce discours n’ont aucune chance de gouverner.

Et c’est bien là que le bât blesse : c’est justement parce que personne ne peut juger sur pièce que les extrêmes ont recours aux idées populistes. Reste que ceux qui les auront cru conserveront l’impression de ne pas être entendus. Avec plus ou moins de rancœur et d’agressivité. Surprenant cependant que personne ne s’étonne de trouver dans ce pêle-mêle les souverainistes de Dupont Aignant ou la gauche du PS de Montebourg aux côtés des extrêmes de droite et de gauche, de Marine Le Pen à Mélenchon et Poutou. Tout de même, tout le monde n’a pas la géolocalisation politique contrariée !

Que les petits candidats se mettent à racoler ainsi risque de mettre sérieusement en danger le candidat du PS, tout comme celui de l’UMP. La souffrance de la population finit par détourner une partie de l’électorat sur les bords, que ce soit d’une tendance ou de l’échiquier. En ce sens, le premier tour pourra être serré.

EELV sera tout aussi démago que Mélenchon, et offrira une solution toute aussi radicale, mais plus acceptable aux bobos en raison d’une image plus hippie chic, là où Hollande sera tenu d’éviter les fausses promesses pour ne pas décevoir s’il l’emporte, et garder un discours audible au regard de la situation intérieure, mais aussi de la France en Europe et dans le monde. Ce que n’ont pas nécessairement à faire les petits candidats… On l’oublie trop souvent, mais c’est aussi le jeu du premier tour.

Reste qu’Hollande devra faire face a minima à Poutou (NPA), Mélenchon (PC/Front de Gauche) et Joly (EELV), faute d’avoir pour l’instant des nouvelles de Schivardi (et son moins de 1%) et Chevènement (ira, n’ira pas ?). Autant de candidats qui feront mathématiquement baisser son score, quitte à le faire passer en troisième position.

Cette division des voix sera moins importante à droite, où le candidat Sarkozy affrontera a minima Marine Le Pen (FN). Et peut être Dupont Aignan (DLR), Boutin (FRS) et Miguet. Difficile en effet de comptabiliser Bayrou le centriste dans les voix de droite, le Modem étant désormais quasiment autant de droite que de gauche en matière de répartition des voix (à peu près 60 à droite/40 à gauche en 2007).

Ne nous y trompons pas, 2012 ne sera pas 2002. Mais plusieurs éléments sont à noter. Tout d’abord, comme je l’ai déjà expliqué, il y aura du mouvement dans l’électorat de droite. Le rejet de Nicolas Sarkozy est bien plus fort que l’UMP ne veut le faire croire, et le premier symptôme en est la désaffection pour le soi-disant candidat naturel au sein même des militants et des élus. Les prises de positions en ce sens se sont multipliées, et traduisent un vrai malaise. Second symptôme, la participation d’une partie de l’électorat de la droite et du centre à la primaire du PS : à l’exception des quelques fanatiques de Sarko qui ont bêtement voulu fausser le scrutin, ceux là sont prêts à franchir le Rubicon au second tour.

Reste, une fois encore, la question du premier tour. A droite, le rejet de Sarkozy se répartira en cinq tendances : abstention pure et simple, vote au centre, vote vers un petit candidat, vote FN, et vote à gauche. Parmi ces choix, les plus gros mouvements seront sur le vote au centre et le vote FN. A moins d’un trop fort risque FN qui pousserait les anti-Sarkozy porté sur le centre à voter utile dès le premier tour.

A gauche, ceux qui ne sont pas d’emblée convaincus par Hollande auront également plusieurs choix : vote sur un candidat plus marqué (Mélenchon ou EELV), vote extrémiste (NPA ou FN), abstention. Et ne nous y trompons pas, le programme économique de Marine Le Pen vise bien l’électorat de gauche : appeler à la nationalisation (des banques) n’a jamais fait bander la droite…

La question reste donc définitivement celle du poids du FN conjugué à celui de l’abstention, pour espérer figurer au second tour. La candidature centriste de Bayrou pourrait réunir une partie de la droite, dépourvue de candidat depuis le retrait de Borloo et l’improbable candidature Villepin, mais il reste peu probable qu’il parvienne à réitérer son score de 2007 : l’essai n’a pas été transformé, et le Modem n’est pas apparu suffisamment crédible depuis 4 ans pour porter un espoir de société qui séduirait au-delà d’une base certes élargie par rapport à ses scores régionaux, mais trop faible pour parvenir à se qualifier.

C’est donc bien l’abstention et le vote FN qui seront les arbitres du 22 avril prochain. Soit les votants auront suffisamment répartis leurs votes sur l’ensemble de l’offre politique, et dans ce cas les candidats UMP et PS se qualifieront. Soit l’abstention sera plus élevée et le vote FN plus important que l’on ne l’imagine, et dans ce cas, le candidat de droite comme celui de gauche risquent de ne pas se qualifier. Et d’offrir un non-choix au second tour.

Paradoxalement, le second tour semble plus clair en cas d’affrontement Hollande-Sarkozy. Le rejet de l’actuel président est tel que même s’il est aussi bon candidat qu’il est mauvais président, et reste capable de l’emporter sur le fil, Hollande devrait emporter les voix de la gauche jusque sur une partie de la droite, cette tendance est confirmée par la participation de certains d’entre eux dès la primaire, six mois avant l’élection. Et ce transfert sur la gauche est facilité par le choix d’Hollande, plus centriste que Martine Aubry, rédhibitoire pour une partie plus large de la droite qu’Hollande en raison de son sectarisme et surtout des 35 heures.

En réalité, seule l’abstention de gauche et des extrêmes pourrait faire basculer le rapport de force au profit de Sarkozy, qui aura du mal à remonter de son score de premier tour jusqu’à dépasser la barre fatidique des 50% des suffrages exprimés, condition sine qua non pour gagner. Reste que pour l’emporter au soir du 6 mai, il faut se qualifier le 22 avril. Après avoir rassemblé derrière lui le parti socialiste, le corrézien doit veiller à ne pas se faire déborder sur sa gauche. Voilà le vrai défi qui attend François Hollande pour les six mois qui viennent.

Sarko : de la sécurité en politique à l’insécurité politique

Ce lundi 23 août marque la rentrée politique en France. A deux jours du prochain conseil des ministres, nombreux sont les politiques à reprendre la parole dans les médias. Le Monde publie aujourd’hui pas moins de trois tribunes, toutes à charge contre la dérive sécuritaire de Nicolas Sarkozy.

Ce matin, Dominique de Villepin réagit très fortement, dans une tribune au Monde, s’indignant de la « tache de honte sur notre drapeau » et de la « Faute morale, faute collective commise en notre nom à tous, contre la République et contre la France. » Estimant que « Se taire, c’est déjà être complice », il appelle au « devoir à remplir pour tous les républicains de France, face à l’hydre qu’un président et ses courtisans voudraient réveiller au fond de chacun de nous, face à la tache qui menace de flétrir l’idée même que nous nous faisons de la France. Un devoir de refus. Un devoir de rassemblement. Un devoir de courage politique pour préparer l’alternative républicaine qui s’impose. Un devoir que nous devons assumer tous ensemble, aussi longtemps qu’il faudra, avec toute l’énergie qu’il faudra.» Autour de lui il s’entend. Ou comment lancer la rentrée politique de son mouvement République Solidaire… Reste à concrétiser par des propositions afin de construire cette alternance à laquelle il appelle, et 2012 deviendra peut être une ligne de mire pour le hérault de la République.

Rachida Dati, symbole de la discrimination positive sauce Sarkozy, en disgrâce depuis de nombreux mois en raison de ses apparitions médiatiques jugées intempestives par l’actuel locataire de l’Elysée, se lâche elle aussi via le même procédé et dans le même journal. Entre un coup de brosse à reluire à l’UMP, dont elle reprend certains des arguments et à qui elle fait plaisir en cédant au leitmotiv consistant à taper sur le PS, et à Daniel Cohn Bendit qu’elle encense, Rachida Dati tisse son argumentaire à partir de la devise nationale : liberté, égalité, fraternité. Malgré un texte un peu mièvre qui enfonce bien souvent des portes ouvertes, on ne peut lui reprocher de dresser le même constat que ses petits camarades : « Notre défi aujourd’hui, en tant que responsables politiques, c’est de contribuer à créer un nouveau climat d’apaisement pour que tous les Français soient de nouveau totalement en phase avec les valeurs fondamentales de notre République. »

Enfin Lionel Jospin, candidat malheureux à la présidentielle de 2002, notamment pour avoir sous estimé l’enjeu sécuritaire, prend sa revanche en livrant lui aussi dans Le Monde ses « quelques vérités sur l’insécurité », lassé de voir l’UMP se livrer sans cesse à des attaques sur le Parti Socialiste. Osé, mais brillant. Lionel Jospin se paie donc Estrosi, ce roquet de bas étage qui me fait penser à Michael Yaoun quand il animait le Morning Live, un mégaphone à la main : Estrosi c’est un peu ça, un sarkofan toujours prêt à aboyer dans vos oreilles la politique sécuritaire du gouvernement. Tellement qu’à force, plus personne ne l’écoute : aucun crédit…

Mais là où Jospin tape dans le mille, c’est en dressant le constat d’échec de la politique de Nicolas Sarkozy en matière sécuritaire : « Certes, le président et ses ministres ne sont pas avares de proclamations. La majorité a voté une cascade de textes législatifs dont la succession même souligne l’inefficacité. En pleine surenchère aujourd’hui, l’exécutif annonce même des projets qu’il reconnaît comme non constitutionnels et dont il sait qu’ils seront censurés ! ». Après une démonstration sur la baisse des moyens affectés à la sécurité –contradictoire avec le discours du gouvernement, Jospin enfonce le clou : « Faudrait-il croire alors que pour le pouvoir et son chef, si contesté, l’objectif est moins de réduire l’insécurité que de l’exploiter ? Le président s’effacerait-il derrière le candidat ? L’espoir d’une réussite électorale reposerait-il en dernier recours sur cette exploitation ? Si ce jeu devait se poursuivre, il serait peut-être hasardeux pour le candidat, mais à coup sûr dangereux pour le pays. » CQFD.

Quand je vous annonçais que les fissures dans la majorité se transformaient en crevasse, je n’étais pas loin de la vérité. Plus les jours passent, plus la sécurité, cet enjeu qui permis à Nicolas sarkozy de monter les marches du pouvoir, désintègre sa propre majorité. Après les remous des parlementaires cet été, qu’il s’agisse des villepinistes Marie Anne Montchamp, Jean-Pierre Grand, Marc Bernier, ou de députés UMP prenant leurs distances avec le parti comme Yannick Favennec ou Etienne Pinte, c’est maintenant Christine Boutin qui confie au Point s’interroger sur son avenir au sein de l’UMP au vu de la « fêlure » provoquée par l’affaire des roms et la réaction du pape Benoît XVI, tout en indiquant que la rupture n’est pas consommée : lorsqu’on lui demande si ce serait la goutte d’eau qui pourrait entraîner une séparation ? « Pour l’instant, à l’heure où je vous parle, non ». Que ce soit par simple revanche personnelle ou volonté réelle de se démarquer sur un sujet qui interpelle l’Eglise, Christine Boutin menace en douceur d’une candidature dissidente non tranchée, mais…

Last but not least, les militants, dont certains d’interrogent. Amine, le jeune beur auquel Brice Hortefeux avait dit « Quand il y en a un ça va. C’est quand il y en a beaucoup qu’il y a des problèmes » et qui avaient valu au ministre de l’intérieur une condamnation le 4 juin 2010 à 750 euros d’amende et 2 000 euros de dommages et intérêts pour injure à caractère racial (une condamnation dont il a fait appel), annonce quant à lui sur sa page Facebook qu’il quitte l’UMP. Histoire d’enfoncer le clou, il a aussi indiqué à Europe 1 qu’il pourrait rejoindre le parti de Dominique de Villepin.  La boucle serait-elle bouclée ?

Quoi qu’il en soit, à pousser le bouchon un peu trop loin sur la sécurité, Nicolas Sarkozy a finit par affoler la boussole, et complètement perdre le Nord. L’overdose sécuritaire et l’excès de postures toujours plus dures sur ce thème ont fini par perdre le président, et dresser une large partie de la classe politique, hormis son fan club de wannabe -Morano, Estrosi, Besson et Ciotti en tête-, contre lui.

Mais qu’en pensent les français ? Pour l’instant, les sondages contradictoires s’accumulent, et il est difficile de tirer une conclusion définitive sur le sujet. Cependant, l’image de la France dans le monde pâtit de l’agitation sécuritaire de l’actuel locataire de l’Elysée, et le peuple français rarement indifférent à cette donnée : la presse étrangère, l’ONU via le Comité pour l’Elimination de la Discrimination Raciale, et maintenant l’église catholique se sont exprimés contre la politique très dure d’expulsion des roms et les amalgames sous tendus par ces choix.

En analysant de près l’action de Nicolas Sarkozy, tout un chacun peut maintenant noter que si Nicolas Sarkozy est né aux yeux des français par la sécurité, cette escalade dans la politique sécuritaire ne fait que mettre en exergue l’échec du président sur ce sujet. Depuis 10 ans, il n’a eu cesse que de déclarer la guerre à l’insécurité et pourtant, cette fuite en avant sonne comme un constat d’échec.

Au-delà des dérapages, il y a fort à parier que les français attendent plutôt des résultats concrets, sur ce thème comme sur les autres, et notamment des actions fortes sur le pouvoir d’achat, le chômage et la réduction des déficits publics plutôt que sur des postures de communication qui divisent la population au lieu de privilégier l’unité républicaine et la solidarité nationale. A bon entendeur…

Sarko noie le Poisson

Dimanche 11 juillet, finale de la coupe du monde… et de la législative partielle à Rambouillet. A ma gauche, Anny Poursinoff, qui porte les couleurs d’Europe Ecologie. A ma droite, Jean-Frédéric Poisson, député sortant UMP, invalidé lors de la législative partielle en 2009 en raison du trop faible écart de voix entre lui et l’autre candidate lors du scrutin précédent : 1 voix.

Décor : la 10ème circonscription des Yvelines, autour de Rambouillet, est le fief historique de Christine Boutin, dont Jean-Frédéric Poisson était le suppléant. Terre de droite, cette circonscription semblait acquise à la droite, où Christine Boutin avait été réélue avec 58% des voix en juin 2007. Las, l’ouragan de la Sarkozie a tout balayé sur son passage.

Tout a commencé en septembre 2009. Christine Boutin, après avoir quitté le gouvernement, décide de ne pas reprendre son siège de député. Une élection partielle est donc organisée, avec les mêmes protagonistes. Et là surprise : Jean-Frédéric Poisson remporte l’élection à 5 voix d’écart seulement… écart qui sera ramené à une seule voix par le Conseil Constitutionnel, entraînant l’invalidation du scrutin en mai dernier.

A l’époque, déjà, Nicolas Sarkozy n’est plus une locomotive pour ses troupes. En ce mois de septembre 2009, sa côte est en baisse de 6 points dans les sondages, à 39%. Officiellement, la raison de ce score très juste est locale. Certains électeurs auraient été dérangés par le projet de circuit automobile à Flins. Hum… C’est surtout un moyen pour Christine Boutin de détourner les observateurs des raisons de l’échec, tout en faisant porter le chapeau à Pierre Bédier, contre lequel elle ne décolère pas depuis qu’il l’a faite échouer dans sa succession au conseil général des Yvelines quelques mois plus tôt.

Mais à ce moment là, personne n’imagine que Jean-Frédéric Poisson ne restera pas au Palais Bourbon. A l’issue des résultats, les Verts posent naturellement un recours. Certes, il est à ce moment là évident que le risque de voir le scrutin invalidé est réel. Le 20 mai 2010, le Conseil Constitutionnel rend sa décision : les scrutins des 20 et 27 septembre 2009 sont annulés. Il faudra revoter…

Ironie de l’histoire, cette nouvelle tombe jour pour jour un an après la décision de la Cour de Cassation dans l’affaire Delfau, dans laquelle Pierre Bédier est condamné à six ans d’inégibilité. Un an jour pour jour après ce que les motards de la République ait porté moins de deux heures après le verdict l’enveloppe à celui qui est encore, à ce moment là, président du Conseil général des Yvelines. Ce qui n’arrive jamais. Un an jour pour jour après ce que Dame Christine ait tenté le putsch sur le département.

Cette très mauvaise nouvelle pour l’UMP arrive dans un contexte national particulièrement délétère. Il est évident que la partie sera difficile, et nombreux sont ceux qui pronostiquent déjà la défaite de Poisson. Pour l’Elysée, il est temps de réagir, et de protéger le Président afin que la perte de la circonscription ne lui soit pas imputable.

Et par le plus grand des hasard, dans son édition du 9 juin 2010, le Canard Enchaîné révèle que Christine Boutin touchait 9500 euros en tant que chargé de mission au cabinet d’Eric Woerth, somme énorme pour une simple chargée de mission… qu’elle cumulait de plus avec sa retraite parlementaire et ses indemnités d’élue au conseil général des Yvelines.

Peu de gens ont alors noté que le document du Canard Enchaîné sortait directement… du cabinet d’Eric Woerth, le chouchou de Sarko. Ou comment allumer un contre feu pour ne pas porter l’échec annoncé de cette législative partielle pour celui qui se fait fort depuis 2007 de gagner les partielles !!!

Le piège tendu par Sarko à Dame Christine aurait pu fonctionner. C’était stratégiquement bien joué. Hélas pour l’actuel locataire de l’Elysée, la machine s’est grippée. Les affaires se sont enchaînées, noyant l’affaire Boutin au milieu de neuf ministres et secrétaires d’Etat indélicats, usant des avantages que leur octroyait la République parfois jusqu’à l’excès : il ne s’agissait plus du cas isolé de Dame Christine, mais d’un état d’esprit au sein du gouvernement du très bling bling Sarkozy. Jusqu’à la pire de s affaires : le Woerthgate.

Dimanche 11 juillet, les électeurs de la 10ème circonscription des Yvelines ont décidé. C’est Anny Poursinoff, d’Europe Ecologie, qu’ils ont choisi d’emmener aux marches du Palais Bourbon. Cette fois, c’est un écart de plus de 1000 voix qui sépare les deux candidats, avec une participation très faible, mais cependant en hausse de plus de 3 points par rapport au scrutin de septembre 2009.

A avoir joué avec le feu, Nicolas Sarkozy s’est brûlé. L’argument qu’il avait anticipé pour expliquer cet échec annoncé s’est retourné contre lui.  Certes, dans un contexte comparable de démobilisation de l’électorat. Sauf que cette fois, ce sont les électeurs de droite, ceux là même qui avait réélu Christine Boutin sur le confortable score de 58% en 2007, qui ont boudé les urnes.

Signifiant par la même à Nicolas Sarkozy ses propres échecs, et la rupture de la connexion avec le peuple… Fusse-t-il d’un fief de droite. Echec au Roi.