Face à la rigueur, la nécessaire justice fiscale

Jeudi soir, Sarko a annoncé qu’il se refusait à être le président qui augmenterait les impôts. Et pourtant, il l’a déjà fait. Simplement, dans le meilleur des cas il joue sur les mots, et dans le pire il nous prends pour des biiip.

Car comme vous le savez, les impôts ne sont pas seulement ce que vous réglez au fisc –les impôts directs- mais l’ensemble des prélèvements, qu’ils soient directs ou indirects. Cela inclut les redevances, les taxes, les cotisations sociales, et les prélèvements obligatoires.

Et la douloureuse est déjà salée. Pour mémoire, depuis 2007, près de quarante nouvelles taxes ont été créées. Rien que depuis septembre, nous avons eu droit à la taxe Coca sur les boissons sucrées, au relèvement des taxes sur le tabac, et le Projet de Loi de Finances apportera son lot de nouvelles taxes en temps et en heure, sachant que la hausse partielle de la TVA est déjà à l’étude. Si pour l’instant la presse se fait l’écho d’un taux intermédiaire de TVA entre celui à 5,5% et celui à 19,6% -qui serait de l’ordre de 7 à 8%- reste à savoir comment étant donné que nos accords européens contraignent franchement la liste des produits et services qui pourraient en bénéficier. Ca sent le casse-tête chinois…

Quoi qu’il en soit, il y aura de nouvelles taxes –donc de nouveau impôts- qui touchent directement une population déjà en mal de pouvoir d’achat. Le grand mot est lâché : oui, celui qui prétendait qu’il serait le président du pouvoir d’achat est en réalité celui de la hausse des impôts. Certes, la crise est là, et il faut bien trouver des ressources. Les plus hauts revenus ont été mis à contribution, par la création d’un impôt exceptionnel qui durera jusqu’à ce que la France entre à nouveau dans les critères de Maastricht, à savoir maintenir le déficit public à 3% du PIB. Et les revenus du capital ont été partiellement taxés.

Reste que l’on pourrait faire mieux. Car aujourd’hui, la question n’est plus de savoir s’il faut augmenter ou non les impôts : l’état de nos finances le nécessite absolument. La dette ne cesse d’augmenter, au-delà des 1200 milliards d’euros, et le seul remboursement des intérêts occupera l’an prochain le premier poste budgétaire. Le déficit public, quand à lui, a plus que doublé depuis 2007, passant de 3,2% à 7,1%. La situation est donc grave, et nécessite un effort national auquel chacun doit participer.

La vraie question aujourd’hui reste de savoir qui taxer et de comment procéder. Face à l’ampleur des trous dans la carlingue de nos Finances Publiques, ça n’est pas une couche de mastic ou quelques rustines qui vont faire l’affaire, sinon on court au crash. Inutile de se raconter des histoires : le coup de rabot sur les niches fiscales, ou la hausse de quelques points de la TVA, ne suffiront pas. Aujourd’hui, il est indispensable de réformer en profondeur la fiscalité.

Et cette réforme doit impérativement mieux répartir l’effort, qui doit être partagé : chacun doit en effet contribuer selon ses moyens. C’est vrai pour les citoyens, qui n’ont pas tous les mêmes revenus –du travail mais aussi du capital-, mais également des entreprises : les grandes structures ont mieux résisté à la crise, leur effort doit donc être plus important que celui des PME, qu’il faudrait au contraire soulager. Des pistes existent, de l’augmentation des grosses successions à la création d’une nouvelle tranche de l’impôt sur le revenu pour les plus riches, en passant par une surcote de l’impôt sur les sociétés pour les grandes entreprises, et j’en passe.

Reste à avoir le courage de faire cette réforme indispensable –ce vocable ne vous rappelle-t-il pas quelqu’un ?- pour répondre à la crise que nous traversons, sans trop alourdir le pouvoir d’achat déjà mal en point de nos concitoyens, ce qui freinerait indubitablement la consommation. Plus que jamais, la sortie de crise s’accompagne de l’instauration d’une nécessaire justice fiscale.

Le projet socialiste ne passera pas l’hiver

La révision des perspectives de croissance pour 2012 a refroidi les ardeurs socialistes.

Alors que notre bon mètre a annoncé jeudi qu’il faudrait compter sur une croissance de 1% plutôt que des 1,75% prévus, les socialistes commencent également à faire leurs comptes. Le projet socialiste a en effet été estimé à partir d’une hypothèse de croissance pour 2013 de 2,5%.

Or plus personne n’y croit, et François Hollande lui-même a estimé hier sur France 2 la prévision de croissance de 1% pour 2012 encore optimiste. Avant d’ajouter : «Pour 2012, si je suis élu, je vais hériter du fardeau que va nous laisser Nicolas Sarkozy (…) Ce que nous allons faire en 2012 sera hypothéqué par son héritage». En d’autres termes, le PS devra revoir les ambitions de son programme à la baisse.

Parce que le programme du PS coûte cher. L’UMP, lors de sa convention sur le projet du PS, l’avait chiffré à 255 milliards d’euros sur 5 ans, un chiffre allègrement gonflé. Hollande, lui, a annoncé un coût de 500 millions d’euros par ans soit un total de 2,5 milliards d’euros sur 5 ans. Soit cent fois moins que l’UMP. Selon le think tank L’Institut de l’entreprise, proche du patronat, le véritable coût oscillera entre 25,86 et 29,07 milliards d’euros par an soit entre 129, 25 et 145,35 milliards d’euros sur 5 ans*. Soit beaucoup plus que l’estimation du PS mais deux fois moins que celle de l’UMP. Des mérites de la e-démocratie et du fact-checking dans cette présidentielle…

Alors, pour réduire la facture, quels seront les ajustements ? Il est trop tôt pour le dire. Selon Pierre Moscovici, coordinateur de la campagne d’Hollande pendant la primaire, « Il y aura des marqueurs du changement comme le contrat de génération, des efforts sur l’éducation et des propositions sur la transition énergétique ». Seule certitude, la priorité affichée pour l’éducation devrait rester au menu. Reste à savoir comment ces 60 000 postes supplémentaires de personnels dans l’Education seront redéployés. Quant au contrat de génération, il dépendra évidemment de la concertation avec les partenaires sociaux.

Sur le reste, il faudra attendre janvier. Dans un entretien au Monde, François Hollande a en effet annoncé ne pas souhaiter s’exprimer sur son programme tant qu’il ne serait pas en campagne : « Je lancerai ma campagne début janvier. Tout doit être prêt d’ici là. Je travaille avec le PS pour que le meilleur dispositif soit arrêté avant la fin de l’année : les équipes, les thèmes, les chiffrages »Une position prudente qui permet d’affiner au fur et à mesure de l’évolution de la situation économique en France, mais aussi en Europe et dans le monde. Car quelle que soit l’issue du scrutin le 6 mai prochain, personne ne peut prévoir aujourd’hui la situation que trouvera le prochain président en prenant ses fonctions.

Reste que l’intention de maîtriser les dépenses publiques est là et clairement affichée, et ça n’est pas nouveau pour François Hollande. Si pendant la campagne de la primaire socialiste il a été conspué pour son manque de propositions, en comparaison avec Martine Aubry qui faisait office de révolutionnaire avec son catalogue des 3 Suisses inapplicable dans sa totalité, j’avais déjà signalé qu’il avait justement anticipé de devoir répondre à la crise. Ce qui constituait à mes yeux un gage de sérieux.

Aujourd’hui, annoncer aussi vite après sa désignation qu’il devra raboter sur le programme du PS me paraît encore plus responsable, et annonciateur d’un discours de vérité. Un axe de campagne qui dénote avec celui du chef de l’Etat, lequel persiste à prétendre qu’il n’augmente pas les impôts… après avoir créé près de quarante taxes nouvelles en quatre ans ! Et sur lequel devra forcément s’aligner le futur candidat, tout président qu’il soit.

Un discours emprunt d’une tonalité nettement plus moderne, par son optique de vérité, que l’intervention présidentielle de la veille, trop cachotière sur les hausses d’impôts. Pour l’instant, sur cette épineuse question de la maîtrise des dépenses publiques, qu’un sondage Ifop place désormais comme la priorité des Français : avantage Hollande.

*Edit à la suite d’un commentaire

SarkoShow, Acte III : Je suis le candidat qu’il vous faut

Après avoir sauvé l’Europe et bientôt le monde, puis la France, il était assez logique que Sarko songe à tirer les fruits de son dur labeur, et face enfin son autopromo, de manière plus claire. Afin que chacun comprenne qu’il sera bien candidat, et qu’en fait il l’est déjà. Sauf qu’il ne veut pas le dire.

Donc pour faire patienter, il indique que ce n’est pas le moment de se poser la question de savoir s’il doit redevenir président ou pas : « Quand nous avons fait la réforme des retraites, tout le monde m’est tombé dessus, les syndicats, l’opposition (…) Moi je m’en moque de savoir si je vais être réélu » Attention lecteur, il ne se pose pas la question parce que c’est évident : Sarkozy est bien plus candidat que président, et ce en permanence ! Tout ceci me fait penser à Zéro Janvier, le businessman-qui-a-le-blues de Starmania, dont le slogan était, dans cette comédie musicale, « Zéro c’est l’homme qu’il vous faut ». Zéro, oui, c’est bien ça. D’ailleurs j’aimerais bien savoir si Sarko aussi aurait voulu être un artiste. Et voir ses œuvres en poterie et macramé. Just sayin’.

Et d’ailleurs il se lance immédiatement dans son tube du quinquennat matraqué à longueur d’éléments de langages de #QAG –Questions au Gouvernement- en plateaux télés, à savoir une diatribe anti-PS –parce que même si le PS n’a pas gouverné depuis 10 ans, c’est toujours la faute du PS- en martelant en boucle son discours sur les retraites : « Cette réforme des retraites a protégé la France et les Français. La Grèce, l’Italie, l’Espagne n’ont pas fait de réforme des retraites ». Parce que lui est responsable, il fait les réformes…Réformettes. Faut pas déconner. Mais il est mieux que tout les autres et grâce à lui la France est au top. Bon, pour avoir le comparatif avec les autres systèmes européens, c’est sur l’Observatoire des Retraites. Reste que tout ça sent toutefois le vieux disque rayé : il fait souvent le coup des retraites lors de ses déplacements en province.

Sauf que d’une part, la Grèce n’est pas dans une telle situation juste parce qu’elle n’a pas fait la réforme des retraites –ça, c’est un raccourci vraiment moisi…- et d’autre part, le Sarko qui annonce qu’en France il n’y a eu ni baisse des salaires ni des pensions de retraites est le même qui laisse son gouvernement préparer un décret prévoyant la baisse des indemnités journalières de maladie. Certains vont donc bien voir leurs revenus diminuer, et pas n’importe qui : ceux qui sont en difficulté.

Le tout par décret, sans passer par ces curieux petits bonhommes qui s’agitent dans un, pardon deux hémicycles dont l’un dirigés par de dangereux gauchistes, ils pourraient amender l’article du PLFSS dans lequel cette disposition aurait du se trouver vu qu’il est en ce moment à l’étude à l’Assemblée. Du coup le gouvernement va passer par décret et ni vu, ni connu, ce sera adopté à l’unanimité du signataire, le président de la République ou le Premier Ministre. Franchement, y’a pas de quoi se vanter.

Mais mes aïeux, vous n’avez encore rien vu. Alors que notre bon mètre veut évoquer la stratégie de dumping de certains pays émergeants, on nage vraiment dans le show télé, avec cette référence à la série télévisé les Borgia : « Depuis 30 ans, les grands pays émergents, Inde, Brésil, Afrique du sud, Mexique, ils ont des bouches à nourrir, ils ont envie de progrès ». Les Borgia. Au XVème siècle, en Italie. Avec en option, la petite touche mini bling-bling qui nous apprend que notre bon mètre a Canal + puisqu’il regarde cette série. Bon, on n’est plus dans la Rolex, mais ça reste un peu tape à l’œil, le chef de l’Etat qui se la joue avec son accès au pay-per-view… Dis, tu ne veux pas me passer tes codes Foot + ? Nan parce que pour mes articles sur le PSG, je rame à trouver des streaming potables…

Sarkozy multiplie les allusions aux échecs des précédents gouvernements socialistes, avec pour leitmotiv le bilan désastreux des 35 heures : « Il faut accepter de prendre les mesures courageuses nécessaires… à partir du moment où on vit plus longtemps il faut cotiser plus longtemps pour sa retraite… (…) l’affaire des 35 heures a été une folie payée par les ouvriers et les salariés les moins formés… (…) y’a eu une délocalisation et une pression supplémentaire sur les salaires, ça a été une catastrophe sociale ».

Euh… N’ont-elles pas été démantelées ? A part dans certaines structures, elles ne sont plus en vigueur. Et la loi TEPA, sa grande loi, a tout de même servi à mettre en place les heures supplémentaires… achevant ainsi d’enterrer les 35 heures. Aussi, il serait peut-être temps de changer de disque. Ou alors de constater que les dispositifs qu’il a mis en place pour les enrayer ont échoué. Eh ouais. Faut rester cohérent.

Peu importe, de toutes façons, c’est la faute des socialistes. Et sur ce sujet, notre bon mètre attaque grassement : « C’est pas mon genre de dire que c’est la faute des autres, je prends mes responsabilités, mais je n’étais pas ministre en 1983… ». Sarko, toujours autant rat de caniveau, tout ceci manque de hauteur… Mais la fin justifie les moyens. Parce que le socialiste, voyez-vous, Sarko aimerait bien l’éliminer au premier tour. Histoire d’affronter Marine et qu’on soit obligés de se foutre une pince à linge –ou le panier de pinces tout entier- sur le nez pour aller voter. Ce serait bien pratique…

Et donc, il martèle sa vision manichéenne du bien et du mal, ou plutôt du travail et de l’assistanat : « Nous avons tous une responsabilité… Mais ce modèle d’assistanat qui consiste à laisser les gens chez eux… non (…) la stratégie est claire : travail, innovation, formation, investissement ». En enjolivant largement son bilan sur les heures supplémentaires en affirmant que «c’est 9 millions de salariés qui ont gagné en moyenne 450 euros de plus » -en français correct, on dirait « ce sont », mais passons, Monsieur Bescherelle est déjà mort plusieurs fois ce soir- et en omettant évidemment les nuances. Notamment en terme d’aggravation du déficit budgétaire, ou sur l’absence d’impact sur le chômage. Des chômeurs, qui justement, aimeraient travailler mais ne trouvent pas d’emplois. Effectivement, perso, avant de travailler plus, je voudrais bien travailler tout court. Et on est plusieurs millions dans ce cas.

Puis il annonce gentiment que « quelle que soit sa situation professionnelle on a le droit de se faire bien soigner ». Là, je m’étrangle ! Six paragraphes au dessus j’ai déjà expliqué que le gouvernement veut baisser les indemnités journalières de maladie, et en plus le gouvernement a déjà fait voter à l’Assemblée l’augmentation des taxes des mutuelles ! Et bien que les éléments de langages de l’UMP prétendent que les mutuelles ne sont pas obligées de répercuter la hausse, c’est un mensonge. Comme je l’ai déjà expliqué, ces structures sont par définition mutualistes, c’est-à-dire qu’elles n’ont pour seules ressources que les cotisations des épargnants. Et que dire des déremboursements de médicaments, qui touchent notamment certaines affections de longue durée ? En quatre ans, Sarko n’a cessé d’attaquer les malade au porte-monnaie !

On passe à l’aspect programmatique et aux bonnes recettes de Docteur Nicolas and Mister Sarko. Tout d’abord, il nous apprend qu’il n’a pas la recette miracle pour réduire le déficit en un seul mandat. Nan par contre on a vu dans l’Acte II qu’il avait bien la méthode pour l’augmenter dangereusement, puisqu’il est passé de 3,2% du PIB à 7,5% en 2010 avant de redescendre à 7,1% cette année. Si ça c’est pas du foutage de gueule en règle… Donc en la matière, sa solution reste de supprimer un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. D’ailleurs, il ne se prive pas de s’en vanter : « nous avons supprimé 150 000 postes de fonctionnaires, il faut continuer ». Supprimer à la hache, n’importe comment, alors qu’il serait plus utile de raisonner par secteurs, en fonction des besoins… Fichue RGPP qu’il faudrait brûler…

L’occasion pour Sarko de taper encore un peu plus sur le programme du PS, irréaliste selon lui : « J’entends qu’on parle d’embaucher 60000 enseignants de plus, mais avec quel argent ? ». Bon déjà, il s’agit non pas d’enseignants, mais de personnels de l’Education Nationale, et qu’ils seront créés sans embaucher de fonctionnaires mais en les redéployant, dixit Michel Sapin. Rien à voir donc, avec ce qu’en dit Sarkozy.

Et là, de sortir son petit couplet sur l’assistanat, clin d’œil à Laurent Wauquiez et sa droite prétendument sociale : « Il faut que la France investisse, il faut moins d’assistanat et plus d’investissement, voilà la martingale gagnante dans tous les pays ». Une nouvelle fois, notre bon mètre, qui a cette fois endossé le costume de Grincheux, stigmatise les français : que ce soit sur le chômage ou la santé, ce sont des délinquants qui ne pensent qu’à vivre aux crochets de la société. Peu importe les réalités, le discours il faut marteler. Pour la quatrième fois. Et aucun journaliste ne l’interrompt. Cirage de pompe…

Enfin on passe à l’idée de convergence franco-allemande, un sujet sur la table depuis des lustres : «La logique de la monnaie unique c’est l’intégration économique et la convergence. Nous avons fait la monnaie unique sans rapprocher nos gouvernements (…) Il faut bien réparer toutes ces erreurs, quand on rentre chacun avec sa fiscalité (…) ça ne peut pas marcher (…) Ca n’a pas de sens que nous ayons pas les mêmes taux d’imposition avec l’Allemagne ». Sarko penche fichtrement vers le fédéralisme européen. En même temps, c’est bien par là qu’on va.

Cette petite séquence franco-allemande m’aura permis d’apprendre, grâce à la prononciation de notre bon mètre, que le ministre de l’économie allemand –monsieur Chahubleuh dixit notre président qui ne parle pas allemand- n’est autre que Robert Hue déguisé en chat bleu. Même si en vrai il s’appelle Wolfgang Schaüble, ce qui se dit Chaobleuh en bon teuton et que se serait donc plutôt un chat au bleu. Ca, c’est bon pour l’harmonisation avec les fromages-qui-puent !

Bref, rien de neuf sous le soleil pour le candidat Sarko, à part une constante qui se fait jour depuis quelques temps à l’UMP, à savoir prétendre être le meilleur sous le prétexte d’être déjà au pouvoir. Un peu court sur pattes, et pas sûr que ça suffise aux français au printemps prochain… et côté programme ?

Sarkoshow, Acte II : Je sauve la France, moi, monsieur.

Après l’Europe et bientôt le monde, cet acte II concerne le sauvetage de la France. Rien de moins.

Pour que les gueux que nous sommes comprennent bien, cela exige une nouvelle leçon de notre nain Prof –qui prend tout de même 1h15 de son temps présidentiel pour expliquer ce qu’il fait au bon peuple-, cette fois sur le budget de la France de 1974 à nos jours.

Sarko nous rappelle donc que pas un budget n’a été voté à l’équilibre depuis 1974 –ouhhh les vilains Giscard, Mitterrand et Chirac !- en omettant toutefois de rappeler que lui n’a pas fait mieux, et qu’il a allègrement continuer à creuser le trou. Parce que si on reprend les chiffres, et qu’on compare avec le départ de Villepin –et donc son arrivée-, c’est assez net pour la dette publique, mais carrément flagrant pour le déficit public qui a explosé…

Puis la leçon reprend par un petit cours de écono-maths : « Si vous vous endettez vous devez emprunter. Savez-vous que la France rembourse chaque année 49 milliards d’euros d’intérêt de la dette ? ». Ah ben oui, c’est comme quand Madame Michu fait un crédit. La banque lui demande de rembourser. Ah non pardon ça n’est pas pareil. Madame Michu ne rembourse pas que les intérêts, elle. Madame Michu, elle rembourse les intérêts ET la dette, la banque la fiche en interdit bancaire. Rappelons au passage que l’an prochain, les intérêts de la dette constitueront le premier poste budgétaire de l’Etat. Et ce, avant qu’on rembourse un seul centime de la dette.

Mais rien n’arrête notre Speedy Gonzalès national, qui trouve là le moyen de caser que nous avons pour nous notre mirifique AAA –jusqu’à quand ?- et que pour les agences de notation, « la France est considérée comme bien gérée ». Ce qui en dit long sur leur inaptitude, non ? A moins que ce ne soit con-sidérée, en deux mots ? Et Sarko se félicite que l’on soit de bons élèves, et souhaite que l’on suive l’exemple allemand « pour rapprocher la France d’un système qui marche ». Avant d’expliquer que les salaires et/ou pensions ont baissé ailleurs (Espagne, Irlande), parce que leur modèle n’était pas bon. Comprendre, ils n’avaient pas fait les réformes nécessaires, comme celles des retraites par exemple, ou encore le remplacement d’un fonctionnaire sur deux.

Mais Superman a la solution a tout : « Si nous voulons nous écarter des agences de notation, il faut réduire notre dette et notre déficit ». Diantre, on se demande bien pourquoi il les a tant creusés alors, si c’est si simple… Et que l’UMP ne nous sorte pas bêtement que « c’est la faute à de la crise » -parlons français-, parce qu’à ce que je sache, nous sommes toujours en crise.  Si on doit le faire maintenant –en pleine crise, je répète, en pleine crise- on aurait pu le faire avant.

Accessoirement, l’Europe contient juridiquement la référence aux agences de notation, donc on ne s’en écartera pas comme ça. D’autre part, on a également pris des engagements au niveau européen. Comme par exemple, que notre déficit public ne dépasse pas 3% du PIB. Villepin l’avait ramené à 3, ?… Il est actuellement de 7,1%. Maastricht, Sarko s’est bien assis dessus.

Alors forcément, il va falloir remonter tout ça. Et notre nain Prof est loin de convaincre : la convergence franco-allemande est sur la table depuis des lustres, le couple franco-allemand n’avance plus comme du temps de Mitterrand et Chirac, et on est loin de l’harmonisation, tant sur nos modèles sociaux que sur la fiscalité, la rémunération et la spéculation dans les banques sont à résoudre depuis 2008, les déficits ont été creusés depuis son élection alors qu’ils auraient du être maîtrisés. Après quatre ans au pouvoir, Sarko a surtout montré son incapacité à gérer l’économie française. On voit mal pourquoi lui confier de nouveau ce mandat.

Eh bien tout simplement parce que ce n’est pas de sa faute, mais celle des socialistes : « Quand en 1983 on a expliqué aux Français qu’on pouvait passer à la retraite à 60 ans les Allemands eux faisaient l’inverse (…) et quand en France on a fait les 35 heures, M. Schroeder, pourtant socialiste, faisait l’inverse… ». La suite est juste hallucinante. Pour Sarko, le problème n’est pas les agences de notation, mais que nous dépensons trop. Oui, c’est bien ce que pointent les agences de notation. Et même pas encore pour nous, qui avons notre AAA. Mais notre nain Prof anticipe déjà la dégradation de notre note, et nous explique donc que nous –les français- coûtons trop cher.

A commencer par les retraités : « Quand je suis devenu président j’ai découvert avec stupéfaction qu’il y avait 15 millions de retraités, et que nous devions aller chercher de l’argent à la banque pour payer les retraites (…) travaillons plus et travaillons mieux et nous n’aurons plus peur des agences de notation… ». Le mieux serait encore de supprimer les retraites, et de travailler jusqu’à la mort, on ferait un joli bon dans le passé. Comme ça on mourrait plus tôt, et on coûterait également moins en frais de santé. Allons jusqu’au bout ! Et sinon, personne pour lui dire que sa réformette des retraites ne tient qu’à horizon 2018 et que donc, il n’a pas sauvé la France. Ni réformé les régimes spéciaux. Ni réduit le chômage. Parce qu’avant de travailler plus, il faudrait déjà travailler…

Mais c’est le candidat qui parle, et un candidat, c’est calme. Genre « La force tranquille », slogan de Mitterrand en 1988. Tu le vois au loin, le clocher ? Nan, ne sois pas mauvais esprit, ne parle pas de cloche, on attendra Pâques pour ça. Car Sarko, pour sa campagne de 2012, a décidé de se mettre dans les habits de Mitterrand. Qu’importe que le costume soit un peu grand pour lui, Sarko la joue zen. Limite humble : « Il ne faut jamais s’énerver et quand on le fait on a toujours tort…  Je l’ai déjà fait et j’ai eu tort. Mais nous ne nous sommes pas énervés contre les banques hier soir ». Pour mieux faire oublier le « Casse toi Pauvre con », pas assez présidentiel.

Le nain Prof fait son retour, pour nous expliquer qu’en 2008, « les banques ont fait n’importe quoi (…) en investissant dans les subprimes ». Limite il a découvert la spéculation en 2008. Faudrait peut-être arrêter de nous prendre pour des jambons là… Quant à la crise des subprimes, qui voulait une France de propriétaires ? En prônant les subprimes lors de la convention de l’UMP du 14 septembre 2006 ? Enfin jusqu’au dernier trimestre 2008, quand tout s’est cassé la gueule hein. Ci-joint le lien du petit rappel de ce retournement de veste en images, juste pour le plaisir.

Et comme il n’est pas à une contradiction près, notre bon mètre annonce en l’espace de trois phrases la recapitalisation des banques –pour leur permettre de disposer de fonds propres pour rassurer les épargnants-, tout en se voulant rassurant en déclarant les banques comme solides, avant d’expliquer ses choix par l’exemple, en déclarant « si les banques font faillite ». Bon, elles étaient solides les banques, ou il a fallu les rendre crédibles ?

Bref, l’accord européen a permis de recapitaliser les banques pour qui ça sentait grave le roussi à cause de la dette grecque, mais à part ça elles sont solides et il ne faut pas s’inquiéter, d’autant que le plan de soutien aux banques nous a rapporté de l’argent et qu’on est les seuls. Sauf que non : tous les Etats qui ont prêté de l’argent aux banques  ont récupéré des intérêts… et donc gagné de l’argent. C’est le principe du crédit lorsqu’il n’est pas à taux zéro. Ouh là, si moi aussi je commence à me la jouer Prof…

Bref, Sarko enclenche à nouveau le mode Superman, pour expliquer au bon peuple qu’il va moraliser le capitalisme financier. Et convoquer les banques, pour leur demander des comptes sur le plan qu’ils entende mettre en œuvre. Et pas question de déconner, hein : « il est temps de penser aux clients et moins aux actionnaires (…) nous allons aussi faire attention à ce que les bonus et les rémunérations des traders rentrent enfin dans des pratiques normales ». Mais pourquoi tout à coup j’ai cet air en tête : On m’appelle le chevalier blanc

Enfin un peu bolchévique quand même, c’est tout mignon de voir notre bon mètre draguer les électeurs de Montebourg et consorts… De toutes façons vu le contexte social, plus personne ne peut comprendre que les dirigeants et actionnaires s’augmentent sans cesse, fallait pas manger une trop grosse part du gâteau. Et attention hein, le tout sera observé par le gouverneur de la Banque de France. Ouuuuuh les banques ont peur… Elles n’en ont juste rien à foutre, les banques privées, du gouverneur de la Banque de France !

Au passage, Sarko fait un joli lapsus, déclarant que quand on fait entrer l’Etat dans le capital d’une banque, c’est une privatisation partielle. A ceci prêt que c’est une nationalisation partielle. Décidément, notre nain Prof a des petits soucis avec les notions économiques de base. Mais j’ai encore plus ri en voyant la I-Riposte de l’UMP tweeter bêtement cette erreur… Bref. C’est l’UMP en même temps, si on attend un cerveau… Il est au congélateur depuis le 28 novembre 2004, et pour l’instant la cryogénisation n’a jamais fonctionné dans le monde. Bref.

Sarko explique donc que la nationalisation des banques a toujours été une catastrophe. Même si ça a été fait en Angleterre, aux Etats-Unis, en Italie… C’est de la merde, qu’il vous dit ! Et puis d’abord, Prof a dit ! « J’ai assez à faire avec la dette de la France sans avoir à récupérer la dette des banques ». Et avec les couches-culottes, tout le monde avait compris le sous-entendu, merci.

En revanche, notre homme n’est pas convaincu par le débat sur la séparation des banques de dépôt et des banques d’affaires, qui pourtant fait l’objet d’une réflexion européenne : « On aurait des banques avec 100% de risques et des banques avec 0% de risques, je n’y crois pas trop ». Rhooo la grosse allusion au projet du PS, qui propose cette séparation. Belle transition avec l’acte III !

SarkoShow, Acte I : J’ai sauvé l’Europe et dans quelques jours je vais sauver le monde

Les deux sommets européens passés, ayant accouchés dans la douleur d’un accord arraché au forceps –pour faire comme Carla ?- il reste maintenant le G20, les 3 et 4 novembre prochain à Cannes.

Dernier temps fort de la présidence française, mais aussi gros risque pour Nicolas Sarkozy. Le programme est ambitieux, notamment en ce qui concerne la régulation mondiale et la réciprocité. Autant dire que si la montagne accouche d’une souris, ce sera un sacré handicap pour Sarkozy, qui joue depuis la crise de 2008 sur son image de sauveur, sans avoir réellement de bilan pérenne en la matière. Des rustines ont été posées, certes, mais elles ne tiennent déjà plus. C’est dire s’il joue gros.

D’entrée, Yves Calvi demande si nous sommes sortis de la crise ou si nous colmatons la brèche. Selon le président, « ni l’un ni l’autre ». Et repart sur un long historique partant de la crise de 1929, pour finalement arriver à la crise depuis 2008 : « Lorsque les américains ont décidé de laisser tomber Lehman Brothers cela a entraîné une catastrophe dans le monde entier ». Donc c’est la faute des Ricains. Ouais, mais si les Ricains n’étaient pas là, nous serions tous en Germanie, à parler de je-ne-sais-quoi, à saluer je-ne-sais-qui… puis il enchaîne, en disant que nous –les européens- ont a essayé d’éviter ça. Bref, on a sauvé le monde, parce que sinon on allait tous mourir : mode Superman enclenché. Enfin presque : « nous sommes face à une crise de la dette colossale qu’il s’agit de régler ». Parce qu’avant Lehman Brothers, y’avait pas de problème de la dette peut être ?

Revenons à l’accord de cette nuit. Pour le président, déclarer la Grèce en faillite aurait entraîné la totalité de la zone Euro. Donc « Les Grecs font des efforts mais comme ils ne pouvaient pas rembourser 200 milliards d’euros nous avons demandé aux banques d’effacer 50 % de leurs créances. » Hum… amusant lorsque l’on sait que quand DSK avait évoqué cette hypothèse, Fillon l’avait traité d’irresponsable. Doit on comprendre que notre bon mètre serait irresponsable ? Ou qu’il a baissé son slip de Superman ? Au passage, ça n’est pas 50% de la dette grecque qui est effacée, mais 50% de sa dette privée. Elle doit quand même encore un paquet aux Etats et institutions internationales (Etats, FMI, FESF, BCE) mais bizarrement Sarko n’en pipe mot.

Jusque là, on a surtout compris qu’on n’a pas sauvé la Grèce, mais surtout les banques. Et le vilain Yves Calvi ose poser justement cette question là. Et je vous le donne en mille, Sarko botte en touche, en donnant un bon coup de bâton aux grecs, qui ne sont pas blanc-blanc… Et n’y va pas par quatre chemin : « La Grèce est rentrée dans l’euro avec des chiffres qui étaient faux et elle n’était pas prête, son économie n’était pas prête à rentrer dans la zone euro et nous en avons payé les conséquences ces derniers mois ». Mais n’oubliez pas, c’est le candidat qui vous parle… Il n’hésite donc pas à rajouter qu’elle est entrée dans la zone Euro en 2001, et qu’il n’était pas aux affaires. Ca n’est pas sa faute à lui : mode Lolita enclenché. Au passage, Jospin, Chirac, bandes de gens qui soutenez Hollande de plein gré ou par humour corrézien, suivez mon regard…

Sarko passe ensuite sur le douloureux passé entre la France et l’Allemangne. Décidément ce soir on voyage dans le temps. Après le XXème siècle et sa crise de 1929, nous voilà reparti jusqu’en 1870, puis les deux guerres mondiales. C’est un bon moyen pour les élèves de 3ème de réviser rapidement et à moindre frais leur BEPC. Autant rentabiliser le cours magistral de notre cher nain Prof. Sauf que pas trop quand même, vu que pour Sarko, nous avons eu trois guerres avec l’Allemagne dans le même siècle. Aïe Aïe Aïe… D’ailleurs le voilà qui verse dans le mélo : « Puis des hommes ont dit on va ensemble construire la paix… ».

Je me vois déjà, courant nue dans les prés, un bouquet de marguerites dans les mains, et un peace and love tatoué sur le sein gauche, hurlant « Angela, ich liebe dich » à tout bout de champ, c’est le cas de le dire. Ah ah. Bref, je rêve sur ce nouvel épisode des Feux de l’Amour version amitié franco-allemande, celui dans lequel Nicolas et Angela sont un peu en froid –Nicolas balance Angela et trouve leur couple moins francs que d’autres couples franco-allemands dans le passé- mais se décident finalement à signer un accord européen pour ne pas qu’on se foute de leur gueule au G20.

Et n’allez pas dire, odieux que vous êtes, que cet accord n’est pas brillant et qu’il met seulement l’Euro sous perfusion. Vous seriez alors d’odieux colporteurs de ragots, tel ce Jacques Sapir, économiste pro-démondialisation, qui publie ce soir dans Marianne son analyse sur ce qu’il appelle « le pire accord envisageable ».

Parce qu’il entraînera selon lui la baisse de l’indépendance de l’Eurpe en internet –poids décisif de l’Allemagne et non plus du couple franco-allemand- et en externe –entrée probable de la Chine dans le FESF ce qui au passage, annule de facto toute tentative de mesure protectionniste, et met à mal la négociation sur la réciprocité-, ne rassurant que temporairement les marchés qui comprendront que ce n’est pas suffisant et reprendront rapidement la spéculation.

Jacques Sapir, lui, préconisait plutôt l’auto-dissolution de la zone euro. Et Sarko n’a pas répondu à cette tendance là, pourtant croissante dans l’opinion, des extrêmes à Montebourg. Mine de rien, ça fait tout de même entre 15 et 20% de personnes qui sont lâchées dans la pampa sans avoir eu la moindre contre argumentation. Ou le danger de faire une primaire tout seul, sans contradiction. Bref, de toutes façons on va tous mourir. Ou comment Superman a baissé sa culotte, faute d’avoir les moyens de s’en acheter une propre.

Et Pernault (Ricard ?) refroidit encore un peu l’ambiance autant que le glaçon dans le Pastis (Ricard !) : « Combien ça coûte aux français ? ». Le mec monomaniaque. Depuis le lancement de l’émission Combien ça coûte en 1990 –eh oui, ça date !- JPP n’a jamais quitté son fond de commerce. Donc selon Sarko, « La France a prêté à la Grèce 11,5 milliards d’euros. Aujourd’hui ce prêt n’a rien coûté au contraire, cela a remporté des intérêts ».

Mouais mouais mouais. Donc ça ne nous aurait pas coûté d’argent, ça nous aurait même rapporté. Parce que la Grèce ne peut pas payer sa dette, mais elle peut payer ses intérêt. Comme nous, quoi. Et la marmotte, elle met le chocolat dans le papier d’alu ? Parce que dans la vraie vie, on a tout de même payé tout ça par le Plan de Rigueur de Fillon hein. Faudrait peut être voir à pas trop nous prendre pour des jambons… Parce que tous les buveurs de Coca s’en souviennent. Même si notre président s’appelle Ni-Cola(s). Ah ah.

Bon sinon, entre deux fautes de syntaxe qui nous rappellent que le président qui met en place un examen de français plus drastique pour les étrangers visant la naturalisation ne le réussirait sans doute pas lui-même, on apprend ça a coûté 100 milliards aux banques. Bah oui, 50% de 200 millions d’euros. Jusque là on sait encore compter… Les banques qui, d’ailleurs, étaient bien obligées de jouer le jeu, sinon elle faisait face à un défaut de paiement –de la Grèce- et boum, le monde explosait. Et on allait tous mourir. Sarko se rengorge d’ailleurs, pas à une contradiction près : « Le marché c’est la quintessence du court terme (…) mais je préfère avoir une bourse qui augmente et des marchés qui nous font confiance ».

Ainsi s’achève l’acte I et l’explication du sommet européen sur cette anaplodiplose : Sarko a sauvé le monde. Et fait des figures de style, à l’insu de son plein gré. Et si on passait à la France ?