Chaos, histoires secrètes de la guerre des droites

J’aime les livres politiques. Je les dévore. Ils me permettent d’alimenter sans cesse ma réflexion sur notre vie politique et d’y confronter mes propres analyses. C’est toujours un moment douloureux pour moi que de choisir de lire l’un ou l’autre, faute d’avoir les moyens de tous les acheter et d’avoir une bibliothèque locale trop peu pourvue en la matière. Mais pour les raisons qui vont suivre, Chaos, histoires secrètes de la guerre des droites, de Frédéric Lefebvre, figurait en haut de ma liste.

Octobre 2005. Je suis licenciée de mon poste d’assistante de direction par mon employeur, l’UMP, au terme d’un long processus qui ne comptera pas moins de quatre entretiens -trois préalables et celui m’annonçant la décision- tous plus surréalistes les uns que les autres. Mon dernier interlocuteur, le moins gradé, m’informe que la décision finale a été prise par Frédéric Lefebvre, qui devient par là même mon coupeur de tête.

L’idée aurait été de sacrifier une petite employée travailleuse et tranquille afin de menacer les autres permanents. Autrement dit, faire régner la terreur sur le personnel de l’UMP afin que tout le monde marche au pas. Un licenciement préventif destiné non pas à me sanctionner de fautes que j’aurais commises -le dossier était d’ailleurs vide…- mais à servir d’avertissement à des permanents qui aiment s’appeler ainsi parce qu’eux le sont quand les politiques passent. D’autres sources me « confirmeront » que Frédéric Lefebvre est à l’origine de cette idée machiavélique pour mâter les troupes.  Minority report, en pire : la condamnation de quelqu’un qui n’a rien fait pour éviter que d’autres ne commettent des méfaits. Ubuesque.

Cette histoire personnelle, sur laquelle je ne souhaite pas m’étendre car personne ne peut réellement le comprendre si ce n’est ceux qui ont vécu le même genre de mésaventure, marque le point culminant de la violence que j’ai pu subir dans ce milieu. Il en restera une blessure profonde : celle d’avoir été catégorisée par des gens -anonymes, bien sûr- comme étant d’un camp, ce alors qu’ils ne me connaissaient même pas : j’étais une petite main, reconnue comme faisant bien mon travail -ce qui n’a pas toujours été le cas de tous les permanents de partis- et ne bougeant pas une oreille. Par quel truchement suis-je devenue un danger ? Par l’affrontement fratricide de deux camps. Par le jeu des circonstances. Parce que tout simplement, j’étais au mauvais endroit, au mauvais moment. Au mauvais poste, aussi. Celui de la mouche à merdes.

Malgré ses ailes coupées, la mouche a survécu. Merci à mes vétérinaires.

Il y a quelques années, j’ai redécouvert Frédéric Lefebvre, par le biais de Twitter. Sa nouvelle manière de faire de la politique, loin du rôle de porte-flingue de Nicolas Sarkozy, un rôle auquel on l’a trop souvent réduit. Moi la première, je lui en ai mis plein la gueule. Il est probable que ce blog compte quelques anciens articles en ce sens. Parce que je lui en ai voulu. Profondément. Sans haine. Mais dans une opposition à un camp qui m’avait tant fait souffrir.

J’étais alors encore dans l’incompréhension face à la violence inouïe et totalement démesurée qui s’est déchaînée sur la mouche que j’étais : assistante de direction au service des jeunes, je n’avais aucun pouvoir, j’étais au plus bas dans la hiérarchie des petites mains, autrement dit je ne menaçais personne. Et surtout pas l’accession inéluctable au pouvoir de Nicolas Sarkozy. Et c’est précisément pour cela que c’est tombé sur moi.

Pourtant, lorsque j’ai redécouvert Frédéric Lefebvre, j’ai eu envie de m’intéresser à sa manière d’envisager son rôle d’élu comme celui d’un politique libre. Comment cet homme pouvait avoir changé ? Qu’est ce qui expliquait ce virage dans sa pratique de l’exercice politique ? Cela m’intriguait, précisément parce qu’il avait par le passé suivi aveuglément Nicolas Sarkozy. J’avais envie de comprendre les ressorts de cette mutation.

Nous avons commencé à échanger. Oh, je ne me suis pas gênée pour lui rappeler qu’il m’avait virée. Il a été étonné, et m’a pudiquement dit ne pas se rappeler d’avoir commis cet acte alors qu’il gardait un bon souvenir de moi. Je l’ai senti sincère et j’en ai été la première surprise. Alors, j’ai poursuivi les échanges et je me suis intéressée à sa mue. En constatant la réalité de sa transformation, je l’ai pardonné, sans le lui dire.

Avril 2018. Alors que je suis environ à la moitié de Chaos, histoires secrètes de la guerre des droites, écrit par Frédéric Lefebvre, l’évidence me saute à la figure : ça ne peut pas être lui qui a pris la décision finale. C’est impossible pour des raisons techniques et humaines. Je lui envoie donc un message pour lui faire part de cette conviction. Et il me le confirme : il n’a pas été ce bras armé et encore moins l’inventeur de ce stratagème qui a fait une victime : la mouche, moi.

En plus d’être immonde, celui qui a pris cette décision n’a même pas eu le courage de l’assumer et a fait porter le chapeau à un autre. On n’est décidément jamais à court de mauvaises surprises, dans la guerre des droites. C’est bien la première fois que je pardonne quelqu’un d’un méfait qu’il n’a pas commis et c’est assez cocasse. Mais l’honnêteté intellectuelle m’oblige : après tout ce que je lui ai mis dans la tête durant ses années Sarkozy -du jour où la Sarkozie a décidé que j’étais contre eux, je le suis assez naturellement devenue…- il mérite que je le réhabilite par les mêmes moyens.

Ce long préambule explique pourquoi, a priori, je ne portais pas Frédéric Lefebvre dans mon cœur et comment, par son seul comportement politique, j’ai évolué très favorablement dans la perception que j’ai de lui.  C’était nécessaire. Et rien de tel que la lecture de Chaos, histoires secrètes de la guerre des droites pour vous en convaincre.

Ce témoignage d’un homme qui s’est engagé très tôt, est dense et passionnant. Et il mérite vraiment que l’on s’y arrête. A travers son histoire personnelle, évoque son parcours politique, de ses années Sarkozy (mais pas seulement) à son choix d’être un élu libre, guidé par ses seules convictions. Au-dessus des partis, dans le sens où le parti ne dirige pas ses votes et c’est heureux : le mandat de parlementaire n’est pas impératif, c’est l’article 27 de la Constitution qui le dit ! A l’heure où l’on nous parle du changement des usages et des pratiques dans la vie politique -avec notamment la loi Confiance, votée à coups de flonflons et trompettes après l’accession à la présidence de la République d’Emmanuel Macron, je vous engage à découvrir ce qu’est réellement la modernité de la pratique politique, en lisant un homme qui la pratique au quotidien.

Mais ce livre, c’est avant tout une histoire d’amour. Pour sa femme, d’abord, et pour ses enfants. Au fil des pages, on comprend à quel point leur indéfectible soutien est capital. Leur amour pour lui alors que la politique le leur vole. C’est touchant et profondément humain. Une histoire d’amour avec la politique, aussi. Son parcours, très détaillé, évoque son engagement et ce que lui ont apporté ceux qu’il a pu côtoyer depuis tant d’années. Mais aussi, les convictions qu’il s’est forgé et la manière dont il s’est employé à les servir, à travers tant d’actions concrètes qui mettent en lumière le travail des élus sur le terrain, hélas méconnus de nos concitoyens. Une histoire d’amour pour la France et le monde, et plus largement, pour l’humanité.

L’autre grand intérêt du livre, c’est l’analyse politique livrée sur les guerres intestines auxquelles se livrent la droite depuis des décennies, véritable antichambre de sa dissolution dans la ligne Buisson. Car aujourd’hui, la droite, qui a délaissé le débat d’idées, se résume à quelques formules marketing destinée à promouvoir une ligne brune inquiétante. Frédéric Lefebvre livre en plusieurs chapitres une enquête fournie et circonstanciée sur la stratégie de rapprochement avec l’extrême droite poursuivie par Laurent Wauquiez, destinée à la conquête du pouvoir. Une mise en œuvre relativement peu apparente aux yeux du grand public, mais bien réelle dans les tréfonds des réseaux. C’est incontestablement l’un des points forts de l’ouvrage que de le mettre en lumière, avec précision.

Au fil des pages, le lecteur ressentira enfin toute la douleur de Frédéric Lefebvre dans la fin de sa relation avec Nicolas Sarkozy, qui l’a particulièrement maltraité. Ces pages plus sombres sont aussi un témoignage de la violence qui peut s’exercer dans ce milieu, hélas trop souvent, quand les hommes perdent toute notion d’humanité par goût du pouvoir. Dont ils ne font pas toujours grand-chose… Et à quel prix : celui de sacrifier des gens, petites mains ou fidèles, vouées aux gémonies pour avoir commis l’outrage de penser parfois différemment et de voter selon ses convictions au lieu de suivre bêtement les consignes du parti.

Ces pages-là m’ont touchée. En raison de mon histoire, bien sûr. Lire ses souffrances m’a rappelé les miennes et il m’est pénible de constater l’existence d’autres victimes, même si j’ai bien conscience qu’il y en a un paquet d’autres. Cela me rapproche évidemment de l’homme : bien que nos situations soient très différentes, nous avons en commun d’avoir vécu des choses difficiles et de pouvoir nous comprendre.

Mais le plus important, c’est de transformer cette violence subie en quelque chose de positif. Frédéric Lefebvre est resté humaniste, malgré tout. Il n’a pas sombré dans la haine, il a su trouver la force de dépasser tout cela pour mettre ce qu’il était intrinsèquement au service de l’action publique. Fidèle à lui-même, loyal à ses valeurs. C’est en cela que ce livre a tant résonné en moi. Parce que cet ouvrage traduit un espoir : non, nous ne sommes pas condamnés à nous coucher devant un système dont tout le monde a conscience qu’il doit changer.

Au contraire, c’est parce que nous avons connu les pires travers des coulisses du pouvoir que nous devons rester en politique : pour être nous-mêmes les acteurs de ce changement et éradiquer ces pratiques. Pour lutter contre les haines fratricides qui se jouent dans la conquête du pouvoir et remettre de l’humanité en lieu et place de la politique politicienne. C’est exactement pour cela que malgré le dégoût que m’a inspiré cette violence, j’ai choisi de poursuivre mon engagement.

Vous me direz que je suis utopiste, et c’est en partie vraie. Mais l’exemple de résilience de Frédéric Lefebvre démontre que c’est possible, pour un peu qu’on le veuille. Agir, plutôt que réagir, tel est le maître mot.

Chacun cherche sa droite

17 juin 2012. Les urnes ont parlé. La gauche a remporté ces élections législatives, dans la foulée de l’élection présidentielle. La droite, elle, a perdu. Lapalissade me direz-vous.

Non, elle a juste perdu. Elle n’a pas pris une énorme claque, puisqu’elle dispose de 226 députés (droite parlementaire). Le meilleur marqueur en est incontestablement le seul levier qu’il manque à la gauche : celle-ci ne dispose pas de la majorité des 3/5ème au Parlement, et ne pourra donc pas modifier la Constitution seule.

Pourtant, des claques, il y en a eu. Et des deux côtés. Les parachutés Ségolène (Royal) et Jack (Lang) ont échoué aux portes du palais Bourbon, obligeant la gauche à bannir le local ayant osé se maintenir en dissidence et dans le même temps, à revoir son casting pour le perchoir. A droite, les grandes gueules du sarkozysme ont trépassé : Nadine (Morano), Fredo (Lefebvre), Valérie (Rosso Debord), mais aussi Guéant, Vanneste, Garraud, Peltier.

Quelle meilleure situation la droite aurait-elle pu rêver au soir du 17 juin ? D’un côté, le PS doit gérer les suites d’une rocambolesque histoire personnelle mêlant fesses et twitter –le tweet vengeur de Valérie Trieweiler, première dame, encourageant l’opposant à l’ex du président, laquelle a perdu, quel vaudeville !- et de l’autre, la droite se retrouve débarrassée de certains personnages hauts en couleurs qui ont souvent porté atteinte à sa crédibilité. Voire à son pacte fondateur. A ses valeurs. Un sujet sur lequel l’UMP doit se pencher.

Hasard ou coïncidence, le calendrier l’impose. En effet, en novembre prochain, l’UMP réunira en congrès l’ensemble de ses adhérents pour se doter d’un nouveau chef de file, pour un mandat de 3 ans renouvelable. Voter pour un président, c’est bien, mais pour quelle vision de l’UMP ? Quelle philosophie ? Quelles valeurs ?

Avant de se choisir un chef, l’UMP doit se repositionner. Non pas, comme l’imaginent un peu simplement certains, en se mettant dans la roue du sarkozysme ou au contraire en se différenciant par la volonté de créer son propre courant, mais en s’interrogeant sur le sens de l’Union. Qu’est ce qui unit la droite parlementaire ? Quels en sont les contours ? Quelles en sont les frontières infranchissables ?

Autant de questions qui ont été mises en exergue par les deux scrutins qui viennent de se dérouler : la présidentielle, avec le rejet de la stratégie de dérive droitière de Nicolas Sarkozy, et la législative, avec l’échec des tenants de cette stratégie (à l’exception notable de certains ténors de la droite populaire, bien implantés dans le sud Est de la France).

Si l’échec de la droite aux législatives était prévisible, il aura au moins permis à l’UMP de gagner un temps précieux dans cette réflexion, car personne ne pourra contester ce bilan et la nécessité absolue d’en tirer les conséquences rapidement afin d’être opérationnels sur les nombreux scrutins de 2014. Désormais, il appartient aux ténors de se réunir, et de décider ensemble de la meilleure manière de se rassembler.

Mon petit doigt me dit depuis longtemps que ce n’est pas en se lançant dès la rentrée dans un affrontement sanguinaire entre Fillon et Copé –tous deux comptables de la stratégie qui a échoué- que l’on retrouvera un climat d’union. Leurs dérives guerrières ont parfois coûté des circonscriptions, et l’état de la fédération de Paris, en lambeaux, ne témoigne pas de leur grande capacité à diriger un parti dans le respect de l’Union. Mieux vaudrait qu’ils se refassent une virginité durant les trois prochaines années, avant de s’affronter –parmi d’autres- au sein d’une primaire qui ne fait plus guère de doutes.

Nombreuses sont les voix de droite, depuis ce matin, à sortir du bois pour défendre la primauté de la reconstruction sur la prochaine présidentielle : Baroin, Le Maire, Juppé, Raffarin, … Quoi qu’en pense encore le petit milieu politico-médiatique, en retard d’un temps faute de disposer du recul nécessaire, il devient de moins en moins probable que les deux aspirants compétiteurs Fillon et Copé, que chacun voyait s’affronter il y a quelques jours encore, ne soient les bons chevaux pour mettre en place la reconstruction de la droite.

Dimanche je voterai… François Hollande

Longtemps, je me suis demandée ce que j’allais bien pouvoir voter lors de cette présidentielle. En tant que ChiracoJuppéiste absolument pas convaincu par le bilan de Nicolas Sarkozy, je suis naturellement orpheline de candidat, faute d’un choix plus probant à droite.

Durant deux années, j’ai milité pour Dominique de Villepin, tout en doutant de ses capacités non pas de président, mais de candidat. La suite de l’histoire m’a d’ailleurs donné raison, puisqu’il ne s’est pas qualifié. N’étant représentée par personne, que faire ?

Nombreux ont été les amis à tenter de m’orienter vers deux candidats. D’une part, Nicolas Dupont Aignan. Au nom du gaullisme. Bon, j’ai toussé. De nos jours, aucun candidat n’est réellement gaulliste. Ce terme est tellement galvaudé par les profanateurs de croix de Lorraine que j’ai du mal avec ceux qui s’en prétendent.

Mais surtout, je déteste les petits candidats qui font des promesses qu’ils ne pourraient jamais tenir s’ils étaient élus. NDA nous propose de sortir de l’Euro. Mais alors, pourquoi chiffre-t-il son programme en Euro ? Pourquoi ne pas parler en francs et estimer la parité qui pourrait exister ? Parce que ça ferait mal ? Pour sûr. Lorsque j’en ai parlé à ceux qui me conseillaient NDA, j’ai tout de même eu droit à un argument collector : « OK, mais à part ça ? Il est gaulliste ». A part ça ? Ca ne me semble pas un détail…

On a aussi essayé de m’orienter vers Bayrou. Soit disant le plus proche de mes idées. Un de ses soutiens a même poussé le vice jusqu’à me dire qu’il était gaulliste. J’ai toussé aussi. Je me suis également demandé pourquoi  tout le monde tenait à utiliser avec moi l’argument du gaullisme. Sûrement un raccourci de plus en raison de mon parcours Chiraco-Juppéiste avec un passage chez Villepin. C’est très court, mais bon. C’est aussi ça les élections.

Revenons à Bayrou. Certains points du programme me séduisent. Mais voilà, ça ne me suffit pas. La présidentielle, dans notre Constitution, c’est avant tout la rencontre entre un homme et un peuple. Le programme fait partie de l’homme. Mais ne fait pas l’homme. Et en 2007, j’ai déjà voté Bayrou au premier tour. Pour quoi ? Pour que le soufflé retombe, que le Modem reste à 56k, et qu’il ne se passe rien pendant 5 ans. Jusqu’à la présidentielle.

Si encore Bayrou avait eu mieux à faire que de monter un parti, comme par exemple faire son job de député à l’Assemblée nationale, j’aurais pu me laisser tenter. Oui mais voilà… L’homme qui entend rendre la présence obligatoire au Parlement affiche un bilan en la matière… quasi nul. Encore une fois, je n’aime pas qu’on me prenne pour une truffe.

Cette situation, je l’avais anticipée dès l’été dernier. A l’époque, je venais de quitter Villepin, imaginant déjà qu’il n’irait pas au bout, et j’imaginais que peut être, Bayrou finirait par me convaincre. Mais faute d’en être certaine, je m’étais préparée à voter pour le candidat de gauche. J’ai donc participé à la primaire, pour choisir celui pour lequel je serais prête à voter sous réserve de sa qualification si au second tour le candidat PS venait à être opposé à Nicolas Sarkozy. J’avais choisi François Hollande.

Restait alors la question du premier tour. J’ai un temps envisagé l’abstention, faute de ne pas trouver de candidat qui me permette d’exprimer ma sensibilité. Non, NDA n’est pas proche de moi. Non, je ne suis plus dans le mood(em) de la génération orange, déçue de 2007. Et enfin non, je ne voterai jamais Nicolas Sarkozy. Question de principe.

J’ai d’ailleurs évoqué cette idée de m’abstenir sur Twitter. Certains retours m’ont outrée tant le politiquement correct a désormais envahi cet espace. J’ai eu de l’argument collector. Par exemple, « tes grand-mères se sont battues pour que tu puisses voter ». Non, mes grand-mères ne se sont jamais battues pour ça, merci de ne pas les mêler à ces clichés. Il y a eu de nombreuses batailles dans ma famille, mais pas celles-ci. En même temps, elles étaient toutes les deux en cloque.

J’ai aussi eu droit à « des gens sont morts pour qu’on puisse voter ». Euh… des gens sont aussi morts pour la monarchie. Et les gens qui sont morts pour qu’on puisse voter, c’était à quelle époque et avec quel résultat ? Nan je demande…

Bref, les gens ont globalement du mal à comprendre qu’il existe deux types d’abstentionnistes. Celui qui n’en a rien à faire de la politique et qui a la flemme de bouger jusqu’au bureau de vote. Et puis il y a celui qui ne trouve pas parmi les dix candidats quelqu’un qui lui convienne, qui sait que le vote blanc et nul n’est jamais commenté, et qui se dit qu’en s’abstenant, il aura un vrai poids. Il pourra faire passer son message. Et ça, c’est aussi de la politique. Toujours se souvenir qu’en toute chose il y a le champ et le contre-champ…

Bref, j’ai tergiversé. Réfléchi. Etudié la question. Et pensé à 2007. Cette année là, il était hors de question pour moi de voter pour Ségo –je n’avais pas été l’une des animatrices du site Segostop pour rien- et encore moins Sarko. Au premier tour, j’ai choisi Bayrou. Les terres du milieu. La génération orange. Qui m’a déçue ensuite, mais sur le coup c’était chouette. Et au second tour… j’ai voté Chirac.

Si c’était en 2007 l’expression d’une fidélité sans faille au président –j’ai toujours voté Chirac- ça n’a plus de sens aujourd’hui, même si ma fidélité à Chirac sera éternelle. Elle est simplement plus affective que politique depuis qu’il est retiré des affaires, ce qui ne lui accorde plus vraiment de place sur un bulletin de vote.

Reste alors le plan B. Celui pour lequel j’ai voté lors de la primaire socialiste en octobre dernier. Lorsque j’ai fait le choix d’y participer, c’était précisément pour me donner une chance de « choisir » le socialiste qui pourrait figurer au second tour… dans l’idée de voter pour lui contre Nicolas Sarkozy.

Aujourd’hui, je souhaite toujours le départ de Nicolas Sarkozy, au terme d’un quinquennat à mes yeux calamiteux sur bien des plans, notamment sur les libertés et les institutions (dont la réforme territoriale), sans parler de la déliquescence de la fonction présidentielle, de sa confusion avec l’UMP et même sa famille, de cette habitude de dresser les français les uns contre les autres, de voir des délinquants partout (y compris chez les chômeurs et les malades), d’user de l’appareil législatif à chaque fait divers, des pressions sur ceux qui le dérangent, et de flirter avec l’extrême droite. De nombreux articles sur ce blog expliquent mes divergences avec Sarkozy et bien qu’étant de droite, je ne mettrai jamais un bulletin portant son nom dans l’urne.

Et je veux voir face à lui celui qui dispose des meilleures chances de l’emporter, mais également de gérer la France. Donc, qualifier au second tour celui qui à mes yeux, et parmi ces dix candidats, est le meilleur. Bayrou m’ayant démontré ses limites en 2007 en terme d’équipes, je crois toujours que c’est François Hollande qui pourra non seulement battre Nicolas Sarkozy, mais aussi gouverner. Pour toutes ces raisons, je voterai dès le premier tour pour François Hollande.

2ème circo de Paris : le camp Fillon jette de l’huile sur le feu

Rien ne va plus à l’UMP ! Le parti majoritaire s’est trouvé un nouveau terrain de bisbilles, dans la 2ème circonscription de Paris, avec la guéguerre que se livrent François Fillon et Rachida Dati. Et ça n’est pas près de s’arrêter.

Comme je l’avais déjà expliqué, les deux élus se livrent à une querelle de chiffonniers pour savoir lequel emportera l’investiture de l’UMP pour mener le combat lors des prochaines législatives. Si François Fillon se revendique de son actuelle fonction de Premier ministre –qu’il ne sera plus au moment de se présenter devant les électeurs- pour préempter le soutien de l’UMP, il n’en reste pas moins un parachuté.

Tout comme l’était Rachida Dati lorsqu’elle a pris la mairie du 7ème en 2008. Reste qu’elle y est désormais installé, et qu’il semble plutôt légitime qu’elle souhaite s’ancrer dans son territoire : si en plus les parachutés ne doivent être que de passage, les parisiens se sentiront-ils un jour représentés ?

Cette semaine, Rachida Dati a retiré leurs délégations à deux de ses adjointes fillonistes, au motif qu’elles se sont abstenus de voter le budget… budget d’ailleurs renvoyé en seconde lecture, tous les détails sont dans cette note de Romain.

De prime abord, on peut penser que c’est une provocation de la part de Rachida Dati. Et pourtant, la maire du 7ème arrondissement a raison. De tous temps, en politique, la ligne de partage entre majorité et opposition a été le vote du budget.

Dès l’instant où ses propres adjointes ne le votent pas, elles se placent dans l’opposition. Si elles persistent dans ce choix en seconde lecture, elles auront alors officiellement constitué une opposition Filloniste au sein de l’équipe municipale du 7ème arrondissement. Rachida Dati a donc parfaitement raison de les sanctionner. Et cela ne signifie ni plus ni moins que les fillonistes sont désormais dissidents divers droite au sein de cette majorité UMP. Et Fillon veut l’investiture ? Laissez moi rire…

Mais l’UMP étant créative, ça n’est pas le seul incident de la semaine, et c’est encore le camp Fillon qui s’illustre, par la voix de Jean-François Legaret, maire du 1er arrondissement.

Dans une interview accordée au site Election Politique par César Armand, l’élu parisien s’en prend à Alain Lambert. L’ancien ministre du budget dans le gouvernement Raffarin, ancien sénateur ayant renoncé à son mandat pour rejoindre une haute juridiction, et actuel président du conseil général de l’Orne, a en effet déclaré sa candidature, souhaitant « renouer avec un débat démocratique apaisé et construit ».

Mais voilà, cette initiative n’est pas du goût des fillonistes, déjà en proie à la candidature de Rachida Dati. Interrogé sur Alain Lambert, Jean-François Legaret a commis un nouveau faux pas, en déclarant : « Je trouve cela bien saugrenu », avant de préciser son sentiment sur cette candidature : « Je crois, au contraire, qu’il va compliquer les choses ».

Saugrenu ??? Quelqu’un peut-il, en outre, informer Jean-François Legaret du parcours politique d’Alain Lambert ? Qu’il ne s’agit en aucun cas d’une candidature gaguesque, mais bien d’un homme politique aguerri –certes, qui ne se bat plus pour obtenir un poste à tout prix- et qui, au passage, a lui, réussi à devenir parlementaire –là où Jean-François Legaret a échoué- et même ministre, un poste pour lequel le maire du 1er arrondissement n’a jamais été positionné ? Et il ose trouver la candidature d’Alain Lambert saugrenue ? Quel manque de respect de la part de l’élu local !

Alain Lambert, lui, a préféré, dans sa réponse à Jean-François Legaret, ne pas céder à cette provocation, et faire preuve de responsabilité : « Comme vous le savez, j’appartiens au courant personnaliste des centristes et je m’intéresse à tenter de réunir un corpus de pensée sur la personnalisme communautaire dans un monde ouvert, en Europe et dans le Monde. Le sujet est passionnant et nous élève un peu l’esprit par rapport aux querelles de boutiques propres à la politique politicienne». L’ancien ministre du Budget n’a, il est vrai, pas la pression pour l’emporter. Ses compétences ne sont plus à démontrer, sa carrière politique est derrière lui, et son offre n’en est emprunte que de plus de sincérité.

Vu le sérieux de son profil, l’on peut aisément comprendre que la troisième voie qu’il propose ne puisse agacer.

Et pourtant, ce sont bien Rachida Dati et François Fillon qui ont les cartes en main.

S’ils cessent leurs querelles et parviennent à proposer un choix probant aux électeurs de la 2ème circo de Paris, Alain Lambert pourrait ne pas aller au bout.

Mais si la politique politicienne persiste à envenimer le débat, l’ancien ministre du Budget constituera une alternative de choix aux électeurs qui seraient plus intéressés par la politique, au sens noble du terme, que par des querelles de basse-cour dignes de Dallas. C’est donc bien la qualité du débat proposé par le(s) candidat(e-s) UMP qui déterminera le choix d’Alain Lambert d’aller au bout ou pas.

Et pour l’instant, les derniers épisodes du feuilleton ne font que confirmer la nécessité d’une alternative. Cette nouvelle incartade du camp Fillon démontre une fois de plus la suffisance de ses partisans, qui veulent s’assurer d’un résultat acquis pour leur champion avant que l’élection n’aie lieu, et s’offusque donc que quiconque, fusse en dehors de leur parti, ose se présenter devant les électeurs sans être immédiatement taxé d’être un fauteur de troubles.

Nan mais franchement, quelle idée d’oser mettre des candidats qui pourraient l’emporter face au Premier ministre !

Non seulement il quitte son fief de la Sarthe –où sa réélection n’est pas assurée- pour se trouver une petite circonscription bien à droite en théorie facile à conquérir, ce qui ne démontre pas d’un tempérament très combattif pour un Premier ministre, mais en plus, il faudrait qu’il soit seul à concourir ?

Jusqu’ici, nous avons donc un candidat Premier ministre bien décidé à obtenir de force une investiture, afin d’obtenir une circonscription confortable et trouver ainsi un point de chute loin de son fief mis en péril, si possible sans candidat en mesure de croiser le fer, et aux prix de toutes les querelles possibles et imaginables avec les autres prétendants aux suffrages. En effet dans ce feuilleton peu ragoûtant, c’est encore lui qui met le feu à la circonscription.

République exemplaire, qu’ils disait… Pour le moment, la 2ème circonscription de Paris est plutôt en proie au fait du Prince, sous prétexte qu’il serait naturel que le Premier ministre soit non seulement le candidat officiel de l’UMP –alors qu’il pourrait y avoir une primaire- mais maintenant, l’Elu. Et bien non, ce choix revient aux électeurs de cette circonscription. Et choix il ne peut y avoir qu’en présence de plusieurs candidats, fussent-ils également de droite.

Twitter et Frustration

Ce matin, le blogueur Mal Pensant a commis sur Atlantico un article exprimant toute sa frustration à l’égard du réseau social Twitter, qui serait selon lui le nouveau haut lieu du conformisme et de la « bien-pensance idiote », rien que ça, et où « l’indépendance est proscrite ».  Surprenant et faux, personne ne me dicte mes tweets…

Si d’habitude j’applique la règle qui veut que l’on ne nourrisse par le troll, il me semble toutefois nécessaire de me fendre d’un billet face à cette attaque démesurée et largement orientée, une partie de la droite ayant décidé de chouiner faute d’avoir réussi à instaurer un bon militantisme web.

Après tout ça lui fera un peu de buzz, car c’est bien ce qu’il cherchait. Mauvais buzz certes, qui lui donnera l’occasion de chouiner encore et de s’auto-convaincre qu’il a raison, mais je ne voudrais surtout pas lui faire encore plus de peine en ne lui accordant pas un peu d’attention en m’attardant quelques minutes sur cette magnifique bouse de campagne made in troll.

Parce que l’auteur n’est pas n’importe qui. Celui qui se permet de fustiger les haters en est un lui-même. A deux reprises, il a publié mon nom sur le réseau social, associé à diverses insultes, ce qui constitue une infraction caractérisée de ma vie privée. Faites ce que je dis et pas ce que je fais. Il est vrai qu’à chaque fois j’ai haussé le ton et qu’après avoir ri à mes demandes de retrait, il a finalement obtempéré en retirant les tweets incriminés. Reconnaissons lui au moins de ne pas persister dans ses comportements illégaux… Reste que l’auteur va chouiner sur Atlantico d’une attitude qu’il applique lui-même. Que de mauvaise foi dans le procédé…

Mais alors, pourquoi tant de haine à l’égard de Twitter –mais surtout des Twittos- de la part de l’auteur ? Parce qu’il est de droite. Et que pour lui, «il devient de plus en plus difficile d’être le porte-parole d’une opinion contradictoire face à une majorité de plus en plus écrasante de profils polluants, souvent anonymes, qui n’ont que ça à faire que de « trôller » et de jouer aux « haters », ou, presque aussi grave, qui s’envoient entre-eux mille politesses et mille hautes considérations esthétiques pour se faire bien voir et améliorer leur personnal branding branling. »

Amusant au passage de noter que l’auteur se permet de juger de qui est polluant ou non sur Twitter (Police du Tweet ?) tout en se livrant également à un personal branling en écrivant cet article, sans pour autant assumer ce statut alors que le simple fait de twitter revient à l’accepter. Mais revenons à nos moutons.

J’ai eu l’occasion de discuter récemment avec @deputeTardy, parlementaire de droite, à la suite du petit déjeuner Politique et Internet de l’APCO, lors duquel il avait évoqué la difficulté de twitter quand on est de droite, sous prétexte qu’aussitôt la branche entière s’en prend aux internautes de droite. Lors de cet échange personnel, j’avais livré mon analyse de cette situation à Lionel Tardy.

Premièrement, c’est faux : je suis de droite, et je suis rarement prise à partie par des internautes des autres partis. A l’exception de trois villepinistes qui m’en veulent d’avoir écrit ça, ça, et ça mais qui curieusement n’ont rien dit de ça, ça, ça et ça –alors que je suis membre de République Solidaire-, j’ai eu une ou deux fois maille à partir avec les Verts. Sinon, tout se passe bien. Bien que je sois affichée comme Twitto de Droite. Mais certes, anti-sarkozyste. Reste que mes opinions sont représentatives des valeurs traditionnellement classée à droite, à savoir notamment la liberté et la responsabilité, et que je me reconnais dans la charte des valeurs de l’UMP. Ce que je revendique sur Twitter.

Alors pourquoi ça se passe mal pour une bonne partie –mais pas tous- des Twittos de l’UMP ? Parce qu’ils sont agressifs. Rien que le terme de I-riposte pour l’équipe militante chargée de contrecarrer la gauche sur le réseau dénote un vocabulaire guerrier et sur la défensive. La riposte, c’est se placer en défense, pas en action. Ensuite, les membres de la i-riposte ne font pas dans la dentelle. Lorsqu’il en faisait partie –il a depuis quitté l’UMP- l’auteur était tout aussi clashant, et ses petits camarades ont persisté dans cette pratique : je ne compte plus le nombre d’entre eux que j’ai du bloquer pour cette raison. Quand on attaque, pourquoi se plaindre ?

Le e-militantisme n’est pas récent, il a existé dans d’autres structures de droite. Comme je l’ai expliqué à Lionel Tardy, j’ai participé à la fondation de deux mouvements militants qu’étaient Halte au blocage, pendant le CPE et qui visait à débloquer les facs, et Segostop. Pour ces deux opérations, j’étais déléguée nationale au militantisme sur le web. Et nous avions quelques principes. Au premier rang desquels un impératif : rester courtois.

Tous nos militants étaient dotés d’une fiche recensant les bonnes pratiques. Tout militant ne respectant pas les règles pouvait faire l’objet de sanctions, à commencer par une réaction désapprouvant son comportement sur le support même où il avait commis la faute. Ainsi, nous jouissions d’une bonne image. C’est tout de même simple à mettre en place ! Alors oui, ça prend du temps. Il faut savoir ce que l’on veut…

Sur Twitter, il n’y a pas, contrairement à ce que l’auteur annonce, de pensée unique. Chacun peut dire ce qu’il souhaite. La règle est juste la même que dans la vie : quand on exprime publiquement une opinion, il faut être capable de l’assumer et de la défendre, par un argumentaire. C’est là que pour l’UMP, le bât blesse. Dénué d’outils leur permettant de répondre, et disposant d’éléments de langage les prédisposant à la moquerie générale, ils se heurtent systématiquement au fact-checking effectué par les journalistes, militants des autres partis, et simples citoyens. Ce qui leur complique la tâche.

C’est là tout le problème de militer sur internet. A force de répéter comme des moutons les conneries transmises par le parti, ils sont forcément moqués s’ils les répètent sans prendre aucune distance : enfin soyons honnêtes, personne n’est à 100% d’accord avec les propos de son champion ! Ayant milité pour Villepin, il m’est arrivé de critiquer certains de ces propos ! Ca m’a d’ailleurs valu d’être trollée en internet par ses pom-pom girls. Pour autant, c’est aussi ce qui assure la crédibilité d’un e-militant.

Ainsi, d’autres voies existent. Je connais des Twittos de Droite qui survivent parfaitement sur Twitter, et qui y jouissent d’une excellente réputation. C’est le cas de @jb_r, de @romainbgb ou encore de @delphine_d. Largement suivis, ils ne sont pas conspués, et parviennent à faire valoir leurs arguments et discuter avec des gens de tous bords. C’est donc parfaitement possible.

Enfin, l’auteur prétend que nous pourrions tous nous reconnaître dans la moitié des situations qu’il décrit. Oui, l’auteur se permet de juger que nous sommes tous issus du même prétendu moule. Euh… non. J’ai tout de même joué à son petit jeu débile, et je ne me suis reconnue que dans 3 affirmations sur 12:

  • Je parle de politique étrangère : je parle de politique tout court, intérieure et étrangère, mais je LT aussi tous les matchs du PSG et Confessions Intimes. C’est grave Docteur ?
  • Je suis contre Hadopi : Twitter n’a rien à voir là dedans, c’est une position personnelle et j’ai d’ailleurs réalisé un dossier complet dessus. Et d’ailleurs, pour être un bon Twitter, faut être pour Hadopi ? Pour Ahmadinejad ? Je pose la question…
  • Je suis membre fondatrice et secrétaire du Club Bourbon et pour aggraver mon cas, j’ai inventé le LT des #QAG, ce qui fait de moi -et de ceux qui font de même- le diable aux yeux de l’auteur. Ah bon, le Twitto doit passer à la validation de l’auteur pour se voir décerner un brevet de bon Twitto ? Au nom de sa bien-pensance ?

Tiens, mais pourquoi l’auteur critiquerait-il les #QAG et le #ClubBourbon ? Pour comprendre, il faut revenir à l’historique. En février 2010, j’étais assistante parlementaire en remplacement d’un congé maladie depuis quelques mois, et mon député m’imposait de regarder les Questions au Gouvernement (#QAG). Cela m’ennuyait : les #QAG étant programmées les mardis et mercredis, je perdais 2h de travail par semaine pour écouter des députés évoquer en mode lèche-bottes l’actualité sur laquelle j’avais déjà fait une veille.

J’ai donc décidé de les live-twitter (#LT) histoire de rendre l’exercice un peu plus intéressant. Peu à peu, d’autres assistants parlementaires ont fait de même. Puis des militants et citoyens lambda se sont joints à nous. Depuis, c’est un rendez-vous, qui redonne un peu d’intérêt pour ce temps fort de la vie parlementaire, destiné à permettre au Parlement de contrôler le Gouvernement. Ce qu’il fait rarement.

Certains députés (le #LT couvre les #QAG de l’Assemblée Nationale, pas encore du Sénat) s’étant fait une spécialité de poser des questions visant à porter aux nues le travail du Gouvernement –questions parfois transmises par les cabinets des ministres interrogés-, ce qui contrevient à l’esprit même des #QAG, j’ai créé le hashtag #chupa, qui vise à signaler les députés qui se livrent à ce détournement de ce temps de la vie parlementaire. Et à la fin de chaque séance, les internautes votent par sondage pour désigner le député lauréat de la #Chupa du jour. Le tout dans un esprit bon enfant et plutôt marrant, qui ne retire rien à la marque ainsi porté sur le comportement du député ainsi récompensé.

Depuis maintenant 20 mois, ce LT des #QAG a permis d’intéresser des internautes à un moment de la vie parlementaire qui jusque là, était surtout suivi par les vieux sur France 3. Ce LT a d’ailleurs donné naissance à un LT dérivé, le #DirectAN : pendant les séances de l’Assemblée, des Twittos commentent en direct l’étude des projets de loi (PL) proposés par le gouvernement ou propositions de lois (PPL) proposées par les parlementaires. L’auteur se plaindrait-il de ces LT des #QAG et du #DirectAN , qui démontrent l’intérêt d’internautes pour le travail effectué par la représentation nationale qu’ils élisent ?

A force de commenter la vie parlementaire en direct sur Twitter, les Twittos ont souhaité se rencontrer pour échanger IRL (in real life, dans la vraie vie). On a commencé par organiser des Twitapéros en juin 2010, avant de fonder en juillet de la même année le Club Bourbon, histoire de se retrouver chaque mois pour parler politique. Ce lieu n’est pas une réunion formelle, mais justement un anti-club. Il réunit des Twittos passionnés de politique et actifs dans ce domaine sur Twitter, de toutes tendances, et en respectant un équilibre de la représentativité. Quitte à surprendre l’auteur, oui, il y a des gens de droite. S’y ajoutent des journalistes politiques, pour alimenter les échanges.

Avec le temps, le Club Bourbon a évolué, ouvrant ses portes aux politiques présents sur Twitter. Ainsi lors de certaines réunions, nous recevons un invité politique, en veillant à alterner les tendances. Pour rejoindre cette joyeuse bande et partager un verre avec nous le temps d’une soirée, le politique doit lui-même être sur Twitter. Jusque là, nous avons notamment reçu Jean-Paul Delevoye, Anne Hidalgo, Ali Soumaré, Valérie Pécresse, François Hollande, Eric Besson…

Faut il être in pour participer au Club Bourbon ? Non. Il faut être présent sur Twitter, régulièrement parler de politique, et adopter sur Twitter un comportement correct, la porte du Club Bourbon restant effectivement fermée pour les haters. Ce qui, au regard de ses exploits passés et récents –violation de la vie privée en outant la véritable identité des gens qu’il déteste, propos agressifs- exclut de fait l’auteur.

Doit-on comprendre que parce qu’il n’a aucune chance de venir une seule fois au Club Bourbon, il faudrait trouver que cette structure est un repaire de ce qu’il y a de pire sur Twitter ou pire, une secte dans la secte ? Au passage, n’y ayant jamais participé, ce qu’il en dit ne peut que relever du fantasme… Et c’est faire beaucoup d’honneur au Club Bourbon que de tenter de dézinguer un simple apéro entre amis autour de la politique. Comme il en existe d’autres pour les geeks, les modeuses, et même les juristes ! Bref, tout ça pour ça…

Tout ceci pour vous dire que Twitter n’est pas une communauté qui serait réservée à tel ou tel VIP, mais un réseau social, où chacun se suit (ou pas) selon ses centres d’intérêts. Il y a donc une vie politique sur ce réseau social… mais elle reste très embryonnaire. Oui, on commente la vie politique. Tellement que tous les partis investissent le réseau. Mais quel est le poids réel de Twitter ? Aucun.

Ici les gens parlent, mais comme l’ont très bien expliqués les intervenants du petit déjeuner Politique et Internet organisé par l’APCO, Twitter n’est qu’un lieu de débat. Autrement dit, ce n’est pas là que l’opinion se fixe. Les gens ne choisissent pas leur vote d’après ce qui se dit sur ce réseau social. En revanche, Twitter permet d’accéder à l’information et notamment au fact checking. Attribuer plus d’importance à Twitter relève du pur fantasme du militant en mal de conquête de terrain, ou du personal branling. Pour l’instant, le vecteur principal d’opinion reste la télévision, et le meilleur outil militant reste le terrain. Aussi, je crains que l’auteur ne surestime grandement ce réseau social… et ne verse dans ce qu’il prétend abhorrer.

Bref, une fois de plus la haine a été déversée. Reste qu’au nom de la liberté d’expression, et en contrepoint des autres espaces politiques mis à disposition par Le Post ou Le Plus du Nouvel Obs, c’est bien qu’Atlantico ait publié cette tribune, démontrant ainsi qu’il n’y a pas de bien-pensance sur internet, contrairement à ce que cet article décrit.

Au passage, cette tribune relève de l’opinion et non de la moindre enquête journalistique, renvoyant donc au passage Atlantico à un simple blog et non au journal d’information en ligne qu’il prétend être. En effet, il n’est indiqué à aucun endroit que c’est une tribune et non un article émanant d’un journaliste qui aurait fait une enquête pour le rédiger : ennuyeux quand on place cet article dans la rubrique Décryptage, un terme qui induit dans l’esprit du lecteur une analyse découlant d’une enquête, et non un avis personnel !

Bref, sur Twitter, il n’y a que des opinions personnelles. Si l’auteur se plaint que les siennes ne soient point majoritaire sur le réseau, à lui de convaincre ceux qui pensent comme lui de venir y défendre leurs argumentaires et représenter leurs idées. Personne ne les en empêche. Ce qui n’est ni plus ni moins que de faire de la politique.