Succession de Benjamin Lancar : le changement c’est pour quand ?

On arrive en juin, et toujours aucune nouvelle des élections Jeunes Populaires. Or le mandat de Benjamin Lancar arrive à terme cette année, après deux mandats de deux ans, soit le nombre maximum possible à ce poste.

Avant même de chercher à savoir qui succèdera à l’actuel président des Jeunes Populaires, –sachant que devraient logiquement apparaître dans cette bataille les poulains de ceux qui voudront se présenter à la présidence de l’UMP, ce qui promet une belle répétition générale du Congrès-, la vraie question à se poser, c’est quand. Et ça, c’est un vrai casse-tête pour Copé. Décryptage.

Traditionnellement, les élections à la présidence des Jeunes Populaires ont lieu avant les universités d’été, occasion de confirmer le président en poste, ou d’introniser le nouvel élu devant ses jeunes. Petit problème : il n’est pas d’usage à droite de faire une université d’été en année présidentielle, donc il n’y en aura pas cette année. Ce qui ne donne pas de lieu d’intronisation pour le nouveau président jeune… ni de date d’élection.

Certes, beaucoup de jeunes pensent que le mandat de Lancar échoit le 23 août, date de la précédente élection. Mais ça n’est pas le cas : le mandat prend fin « à l’expiration d’un délai de trois jours suivant la date de la session extraordinaire du Conseil National des Jeunes Populaires élisant le nouveau Président des Jeunes Populaires », selon l’article 16 alinéa 4 du Règlement Intérieur des Jeunes Populaires.

Ce qui ouvre la porte à d’autres options : si la session extraordinaire du Conseil National des Jeunes Populaires venait à être décalée, Benjamin Lancar pourrait voir son mandat prolongé. Si elle était maintenue, l’élection à venir du nouveau président de l’UMP, prévue à l’automne, pourrait donc venir jouer les troubles fêtes dans cette élection. Ou pas, si Copé de reporter le scrutin après le Congrès, pour éviter que cette élection ne devienne la répétition générale du Congrès. Une chose est certaine : rien ne sera simple.

Sii aujourd’hui les rumeurs vont bon train sur ce que l’équipe Copé pourrait ou non décider, il est certain que ses choix à venir constitueront un très fort marqueur de l’UMP telle que la voit Copé et donc, de son projet comme éventuel candidat à la présidence de l’UMP. C’est franchement casse-gueule…

Election des CNJP en plein été ?

Le calendrier joue contre lui. Parce qu’avant de décider ce qu’il en sera de l’élection, qu’il peut toujours décider de reporter, il doit renouveler le conseil national des Jeunes Populaires et donc procéder à l’élection des conseillers nationaux jeunes populaires (CNJP). Contrairement à l’élection du président jeune, rien ne précise dans le règlement intérieur des Jeunes Populaires qu’elle puisse être décalée dans le temps. Cette faille pourrait poser problème.

Il se murmure à l’heure actuelle que ce renouvellement des CNJP aurait lieu fin juillet. Ces adhérents Jeunes Populaires, élus parmi leurs pairs, ont pour mission d’élire le Président des Jeunes Populaires, de siéger dans les groupes de réflexion décentralisées et le cas échéant procéder à la révision du règlement Intérieur conformément aux dispositions prévues à cet effet.

Prévoir l’élection fin juillet tendrait à indiquer que l’UMP actuelle aurait choisi de tenter de respecter le calendrier prévus par les statuts. En effet, pour pouvoir se présenter à la présidence des Jeunes Populaires, les candidats doivent impérativement avoir été élu préalablement CNJP, et l’être depuis au moins 2 ans. Une fois cette formalité effectuée, les candidats doivent alors déposer leur candidature « sur le bureau du Président de l’Union et du Président des Jeunes Populaires sortant au moins trois semaines avant la date de l’élection. Les nom, prénom et âge des candidats sont communiqués à l’ensemble des Conseillers Nationaux des Jeunes Populaires par lettre simple adressée au moins quinze jours avant la date de la session appelée à élire le nouveau Président ». Si les élections des CNJP ont lieu au plus tard fin juillet, une élection est théoriquement possible fin août. Si les délais sont serrés, les statuts pourraient toutefois être à peu près respectés.

A peu près. Parce que de toutes façons, de nombreux autres articles n’étant pas respectés, l’élection n’est en théorie pas valide, à moins de faire voter rapidement par le conseil actuel une disposition transitoire pour remettre les choses au carré. En effet, les modalités d’élection des CNJP prévoient deux collèges, répartis géographiquement selon les zones téléphoniques (zones 02, 04 et 05 et zones 01 et 03) qui sont censées être renouvelés chaque année, alternativement, conformément à l’article 14 alinéa 2 du Règlement Intérieur des Jeunes Populaires. Cette disposition n’est plus respectée depuis le renouvellement des CNJP de 2006 préalable à l’accession à la présidence des Jeunes Populaires de Fabien de San Nicolas. Benjamin Lancar n’a jamais remis les choses en ordre.

Or ce détail à son importance : renouveler alternativement les CNJP permettait de disposer de vrais candidats destinés à s’investir dans la vie du parti, tout en évitant les calculs préalables à une élection, à savoir faire élire CNJP des jeunes militants favorables à tel ou tel candidat. Les petits calculs sont donc toujours de mise, à grand renfort de pressions sur les fédérations : les Responsables Départementaux Jeunes (RDJ) prennent en effet position dans la course à la présidence, et font en sorte qu’au sein de leurs militants, seuls ceux favorables à leur favori soient élus. Les CNJP ne représentent donc plus leurs idées, mais celles de leur RDJ… qui est nommé par le Président des Jeunes Populaires. On a connu système moins dépendant du chef !

Ensuite, demander aux adhérents jeunes de choisir leurs représentants en plein été n’assure absolument pas leur représentativité. Peu de jeunes pourront se rendre dans leurs permanences pour voter, et ce vote étant local, il ne peut être dématérialisé. Ca promet donc un sacré mic-mac au niveau des procurations (faciles à falsifier) et donc, cela favorisera les manipulations sur le vote, en direction de tel ou tel candidat à la présidence jeunes.

En d’autres termes, le conseil national des jeunes populaires issus de ce scrutin ne sera pas valide, comme c’est le cas depuis 2006. Et donc, un président issu de ce corps électoral partira déjà avec un handicap. Si en 2006 cela avait agité les jeunes populaires, avec en toile de fond le dossier du candidat UMP à la présidentielle de 2007, ça n’a plus été le cas depuis, tout le monde dans l’UMP se pliant aux désidératas de Nicolas Sarkozy, devenu président de la République. L’UMP n’avait déjà plus de président élu (en vertu des dispositions transitoires votées en 2007, c’est un secrétaire général qui gère le parti), elle n’allait donc pas être très regardante sur cette petite entorse à l’élection des CNJP. Qui plus est, cette entorse était plus due à l’incompétence des jeunes populaires en terme de règlement intérieur qu’à un souhait véritable de contourner le règlement, comme ce fut le cas pour Fabien de San Nicolas en 2006.

Dans un monde parfait, l’élection devrait avoir lieu à une date à laquelle les adhérents jeunes peuvent se prononcer –c’est-à-dire hors vacances scolaires- et remettre les compteurs à zéro en élisant cette fois ci des CNJP dans toutes les zones, charge au futur président jeune d’organiser les élections des zones prévues l’an prochain, afin d’assurer le renouvellement partiel tel que prévu par les statuts. Peu probable que ce soit réellement le cas : l’UMP se contentera probablement d’une élection en plein été, sans remise à plat, donc discutable.

Les jeunes, un enjeu

Une fois les CNJP élus, se posera la question de l’élection du président des Jeunes Populaires. Avec en toile de fond, la guerre Fillon-Copé. Nul ne doute en effet que chacun d’entre eu présentera « son » jeune. Parce que c’est une formidable répétition générale pour l’élection à la présidence de l’UMP.  Certes les votants ne sont que les jeunes, mais ça permet à chacun de se faire une idée de son poids sur cette tranche traditionnellement chérie de l’électorat. Attention toutefois, d’autres s’y sont cassés les dents. Revenons quelques années en arrière.

En 2004, Juppé avait quitté l’UMP, allait être remplacé à l’automne, sans aucun suspense sur le nom du futur élu. Sarkozy ne souhaitant pas intervenir directement dans l’élection jeune, il avait laissé son entourage gérer le cas de « son » candidat. Faute de disposer alors d’un fort courant sarkozyste (pour mémoire, les sarkozystes ne s’étaient pas investis dans le parti jusqu’à ce que Sarkozy décide de se présenter à la présidence, ils n’avaient donc pas ou peu de relais), il avait fallu aller chercher du côté des mécontents de la Secrétaire Nationale d’alors, Marie Guevenoux.

C’est François Guéant, le fils de, qui était à la manœuvre. Aidé par les fillonnistes, furieux de n’avoir pas été désignés équipe nationale en 2000 comme cela leur avait été promis, en voulaient par principe à toute équipe nationale nommée depuis. Bien qu’issue à l’origine de DL, et n’ayant donc rien à voir avec ces histoires, Marie Guevenoux était elle aussi, détestée, au nom de ce principe. Cette alliance ne doit évidemment rien au hasard. Guéant + Fillon, ça me rappelle quelque chose… Oh wait !

Cette fine équipe a fini par trouver au sein de l’équipe nationale de Marie Guevenoux un jeune qui se voyait déjà en haut de l’affiche, Matthieu Teillet. C’était parti. A cette époque, le vote pour l’élection du président des jeunes était physique et non dématérialisé, sur le lieu des universités d’été, organisé par le centre national et en présence de délégués des candidats, donc relativement cadré. Matthieu Teillet a pris une claque, et Marie Guevenoux, secrétaire nationale à la jeunesse, est devenue la première présidente des Jeunes Populaires. Le candidat de Sarkozy a perdu. Pour la simple et bonne raison que le candidat Sarkozy ne s’était pas impliqué dans cette campagne. Chacun sait cependant que la face de l’élection eût pu en être changé s’il avait montré un signe en faveur de son poulain, et que le résultat l’a fort  irrité.

L’année suivante, et alors qu’il restait encore un an de mandat à Marie Guevenoux, elle a choisi de démissionner de son mandat. Les relations avec Sarkozy, qui ne supportait pas de ne pas l’avoir choisie et qui en plus ne la voyait que comme une chiraco-juppéiste, étaient telles qu’elle a estimé plus bénéfique pour le mouvement de jeunes de se retirer.

Pour le comprendre, il faut revenir aux philosophies qui s’affrontent. D’un côté, les fondateurs de l’UMP (Alain Juppé en tête), qui cherchent à mettre en place une UMP moderne (elle avait alors 3 ans), avec un mouvement de jeunes non pas indépendant, comme les MJS chez les socialistes, mais relativement autonome, c’est-à-dire avec un fonctionnement qui lui est propre, et non calqué sur celui des aînés. L’objectif était alors de les préserver au maximum de l’effet fan club, d’éviter de les entraîner dans ces guéguerres, et donc de laisser tout le temps nécessaire à la formation politique nécessaire pour en faire de futurs élus compétents sur le fond, qui n’arriveraient pas dans le système juste parce qu’ils s’étaient attachés à un élu national. Ca, ils pouvaient toujours le faire au local.

Cette conception, qui s’est appliquée dès la naissance de l’UMP, a été mise à mal par l’arrivée de Nicolas Sarkozy. Issu du RPR, étant lui-même devenu président jeune à l’âge de 35 ans (!), après avoir gravi tous les échelons et mangé son pain noir, ne pouvait considérer le mouvement jeune autrement qu’en une structure godillote telle qu’il l’avait connue lui-même. Autrement dit, comme un fan club tout juste bon à agiter des drapeaux quand on leur demande. Pour cela, mieux vaut s’assurer de disposer d’un jeune chiot fidèle disposés à faire toutes les léchouilles nécessaires à son maître, tout en frétillant de la queue chaque fois qu’il lui adresse un (rare) regard, et en attendant le poposte qui le remerciera de cet amour pavlovien. Choisir son jeune, c’est la méthode Sarkozy.

Le tournant Sarkozy

Des élections anticipées ont du être organisées à l’été 2005. Les statuts d’alors précisaient que dans un tel cas de démission, seuls les délégués nationaux pouvaient prétendre assurer l’interim. Non pas pour priver les adhérents d’un vote, mais parce que le président était alors élu sur un projet de deux ans, et l’intérimaire devait poursuivre ce projet sur la fin du mandat, et non présenter le sien. La logique voulait donc que ce soit l’un de ceux qui mettaient ce projet en œuvre qui le mène à son terme. Détail non négligeable : c’est également les délégués nationaux qui constituaient le corps électoral. Sarkozy devait donc trouver le successeur de Marie Guevenoux parmi 16 personnes, et convaincre ces 16 jeunes de voter dans le bon sens.

Inutile de vous préciser que les couteaux ont vraiment été sortis. Parce que cette fois, Sarkozy entendait imposer son poulain, et par tous les moyens. Rien de plus facile le président de l’UMP que de pressuriser 16 jeunes. Enfin facile… si les jeunes sont dociles, mais ceux là étaient plutôt taquins. Les sbires de Sarkozy, Brice Hortefeux et Frédéric Lefèbvre en tête, étaient à la manœuvre. Ils ont facilement trouvé leur candidat : Fabien de San Nicolas, délégué national à l’absence de communication, avait soutenu Matthieu Teillet l’année précédente. De faible niveau politique, il était toutefois parfaitement docile. Tout semblait se passer selon le plan prévu par la Sarkozie…

Jusqu’à ce qu’un grain de sable vienne gripper la machine. Les délégués nationaux issus de l’équipe de Marie Guevenoux étaient majoritaires sur ce vote, et représentaient 12 voix sur les 16 en jeu. Ils ont donc présentés un candidat : Raphael Cognet.

Ce fut l’été de toutes les pressions. La Sarkozie n’a pas lésiné sur les moyens. Fabien de San Nicolas a bénéficié d’un emploi au sein de l’UMP en tant que chargé de mission aux universités d’été, histoire d’être en contact avec les jeunes et de préparer sa candidature. Le ver était dans le fruit. Reste qu’il existait encore cette candidature dissidente, qui avait le nombre de voix nécessaire pour l’emporter. Alors les grandes manœuvres ont commencé. Pressions, manipulations, convocations en groupe ou tout seul, tous les moyens étaient bons pour faire comprendre au 12 récalcitrants que leur intérêt personnel, professionnel et politique n’était pas de contrarier les souhaits de Sarkozy. Chantage au job pour ceux qui vivaient de la politique, menaces fiscales pour d’autres, peu importe que ces moyens eussent au final été utilisé ou non, l’objectif était de faire peur. Mais là encore, ça n’a pas marché.

Et à la veille des universités d’été de La Baule, début septembre 2005, la Sarkozie n’en menait pas large. Débarrassée de Marie Guevenoux, elle risquait de se retrouver avec l’un de ses héritiers. L’ambiance était extrêmement tendue. Les deux camps s’écharpaient sur internet, sur un forum indépendant créé par des militants. D’un côté les partisans de suivre les décisions de Sarkozy, de l’autre, les jeunes souhaitant choisir eux-mêmes leur représentant.

Pour beaucoup, il eût été logique que les délégués nationaux choisissent un candidat issue de la tendance ayant remporté les élections un an auparavant, afin de respecter le choix des militants. Pour d’autres, il fallait respecter le choix du patron de l’UMP, lui aussi choisi par les adhérents. Finalement, Raphael Cognet a retiré sa candidature. Pourquoi la maintenir, alors que l’UMP ne souhaitait pas travailler avec un autre jeune que San Nicolas ? C’eût été reproduire les mêmes problèmes que sous le mandat de Marie Guevenoux, et cela aurait rendu son départ inutile.

Les militants n’ayant pu être informés de cette décision, étant donné que tout le monde était déjà à La Baule, et qu’il était à l’époque moins facile de se connecter à internet qu’aujourd’hui, c’est dans une ambiance délétère que s’est ouvert le second conseil national des Jeunes Populaires. Un CNJP dédié au vote de résolutions sur des thématiques choisies par les Jeunes Populaires, afin de définir la ligne politique du mouvement sur ces questions. Une réflexion qui a disparu aujourd’hui, et dont hélas, bien peu de jeunes se souviennent qu’elle a un jour existé, et qu’un jour, les CNJP ont été considérés comme de vrais cadres politiques, invités à débattre comme au parlement, et à se prononcer sur des sujets tels que l’euthanasie.

Fabien de San Nicolas a logiquement été élu à 100% des voix. Mais la Sarkozie n’était pas au bout de ses surprises. A l’annonce du résultat en session plénière de l’université d’été, quelques sifflets émanant d’une vingtaine de jeunes positionnés dans l’allée centrale pour faire la claque pour le nouveau président ont émaillé le discours de départ de Marie Guevenoux. En retour, les ¾ de la salle, soit près de 1500 jeunes, ont copieusement sifflé l’arrivée sur scène de Fabien de San Nicolas, accueilli par les doux slogans « Pressions, manipulations ». La Sarkozie l’a ainsi appris à ses dépends : il faut toujours se méfier des jeunes, ils peuvent parfois se montrer taquins et indisciplinés…

Depuis, les élections jeunes sont donc surveillées comme le lait sur le feu. Et truquées en amont : les codes permettant de voter circulent auprès des gens qui votent comme il faut, afin de s’assurer du résultat. Et les candidats sont parfois découragés de se présenter… ou invités à rejoindre le ticket gagnant en échange de promesses de postes pas toujours respectées. Bref, les élections jeunes sont un vaste gag, dont la presse se délecte systématiquement.

Suppression du président des Jeunes Populaires ?

Avec un tel passif, la meilleure manière de choisir son jeune, c’est encore d’avoir des statuts le permettent : c’est plus simple de le choisir tranquillement dans son bureau, sans perdre de temps à faire des pressions sur les votants, ce qui se sait toujours et alimente la presse, et donne tous les deux ans une image désastreuse au parti. Et ça, Copé l’a compris.

Il se murmure donc que l’actuel secrétaire général de l’UMP souhaiterait faire voter des modifications importantes du règlement intérieur, et supprimer le président des Jeunes Populaires, pour revenir à l’ancienne formule ayant cours au RPR, à savoir la nomination d’un secrétaire national à la jeunesse (SNJ). Certains me rappelleront que Juppé avait nommé Marie Guevenoux à la fonction de SNJ en 2002. Certes… mais avec une feuille de route très claire : mettre en place le mouvement, et rédiger un règlement intérieur qui prévoit obligatoirement l’élection du président des jeunes populaires.

Et pourquoi ? Eh bien c’est la nouvelle épine dans le pied de Copé, qui rend ce projet de retour au SNJ totalement impossible à moins de s’offrir une jolie réputation. Si les statuts doivent prévoir l’élection du président jeune, c’est évidemment avant tout pour démocratiser le parti, mais pas uniquement. Elire le représentant jeune est aussi une obligation donnée par nos partenaires internationaux. J’ai nommé le YEPP. Kezaco ? Non, ce n’est pas un attaquant du Dynamo de Kiev. Le YEPP, c’est la réunion des partis jeunes de droite européens. Une structure qui permet des échanges au niveau international, au sein d’une Europe élargie, et qui fonctionne selon des statuts précis.

Et pour être « full member » du YEPP, il faut impérativement élire son président. Pour le savoir, encore faut-il avoir été concerné par la question, et donc investi dans le dossier des relations internationales des Jeunes Populaires entre 2002 et 2005, période pendant laquelle l’UMP et les Jeunes Populaires ont ramé pour réintégrer le YEPP. C’est dire si peu de gens se souviennent de ce léger détail… qui a pourtant son importance dès qu’il s’agit des relations européennes de l’UMP, et de son action au sein du PPE (réunion des partis politiques de droite au niveau européen et qui dispose d’un groupe au Parlement Européen, où siègent les élus UMP). Ca n’est tout à coup plus si anodin… Il ne sera pas si simple de prendre la décision de se faire virer manu militari du YEPP pour statuts non conformes, avec le sous entendu que l’UMP serait donc un parti incapable de démocratie interne. Bonjour l’image !

Quel mouvement de jeunes pour l’UMP ?

En 2002, l’UMP s’est fondée à partir de la réunion du RPR, de Démocratie Libérale (DL) et d’une partie de l’UDF. Alain Juppé a mis en concurrence les candidats au poste de Secrétaire national à la jeunesse, et a choisi Marie Guevenoux parmi les trois candidats. Les Jeunes Populaires, nés le 11 février 2003, avaient pour mission de se doter d’un règlement intérieur, à soumettre au bureau politique de l’UMP, prévoyant obligatoirement l’élection de leur président.

En 2004, le bureau politique a validé, le 15 juin, le projet de règlement intérieur proposé par le bureau national des Jeunes Populaires. Ce projet était issu du fonctionnement testé depuis la création du mouvement de jeunes. Dans la foulée, ont eu lieu les premières élections des CNJP, puis du président des Jeunes Populaires. Marie Guevenoux, candidate à sa succession, a été élue à la double majorité requise des voix et du nombre de départements nécessaires pour l’emporter. Cette disposition, qui semble anecdotique, permettait d’éviter à un candidat de se faire élire grâce au soutien unique des grosses fédérations, et d’assurer aux petites une véritable représentativité. Le conseil national des Jeunes Populaires a été mis en place, et sur l’année 2004-2005, a travaillé sur les thématiques choisies par les fédérations, pour parvenir à dessiner la ligne politique du mouvement, afin de les former au rôle de cadre et de jeune politique.

En 2005, Fabien de San Nicolas a succédé à Marie Guevenoux dans les conditions décrites plus haut. Président simplement intérimaire, il était tenu de poursuivre le projet sur lequel Marie avait été élue (mais ne l’a pas fait) et surtout, de travailler avec les délégués qu’elle avait nommé. Ca ne s’est pas passé sans heurts (pour en savoir plus, lire le blog de Pop Spirit).

En 2006, Fabien de San Nicolas s’est présenté à sa propre succession. Prévoyant, il a fait voter au préalable une modification du règlement intérieur plus conforme aux objectifs de son mentor. S’étant vu opposer une motion concurrente lors de cette réforme, il a contourné les statuts pour qu’elle ne puisse être présentée aux adhérents. Une fois de plus, la démocratie interne s’est perdue dans les méandres de la Sarkozie… Sa motion étant la seule en lice, elle a été adoptée. Et le Conseil National des Jeunes Populaires, conçu comme un parlement, a perdu ses prérogatives théoriques : ce n’est plus qu’un organe destiné à simplement ratifier les modifications de règlement intérieur prévues par l’UMP et à voter pour le président par internet… sans réelle démocratie.

Le siège national mettant à disposition de ses cadres les codes permettant aux adhérents de voter par internet, les élections ont systématiquement été entachées. J’avais moi-même fait le test en 2006. Bien qu’ayant dépassé la limite d’âge pour pouvoir me faire élire et donc voter, j’ai pu sans problème trouver un RDJ prêt à me communiquer un code, et j’ai donc participé au vote en toute illégalité… pour en démontrer les failles. Enfin contrairement à ses promesses, Fabien de San Nicolas n’a pas souhaité instaurer le suffrage universel direct. Il est vrai que contrôler tous les adhérents, c’est plus compliqué que 10% d’entre eux, et ça fait plus de codes à gérer.

Au terme de guerres fratricides, la conception sarkozyste d’un mouvement de jeunes a donc gagné : le choix d’un président sur projet ayant disparu, le mouvement de jeunes ne s’est plus interrogé sur lui-même, a cessé de raisonner en terme de formation des jeunes politiques de demain, et s’est sclérosé. Conformément aux souhaits de Nicolas Sarkozy, c’est devenu un fan club tout juste destiné à faire la claque. Si une telle conception est logique en période de campagne électorale, ça ne peut pas être la seule ligne d’un mouvement de jeunes sur les 5 années que dure une mandature et ça, les présidents qui se sont succédés l’ont complètement perdu de vue…

Faute de s’être jamais posé cette question : quelle philosophie pour quel mouvement de jeunes ? Ils ont juste bêtement suivi un chef qui reproduisait ce qu’il avait connu. Sans jamais chercher à faire évoluer cette conception, ni même regarder ce qui se passe au sein des partis frères, à l’international. Sinon, ils auraient remarqué que les premiers statuts des jeunes populaires s’inspiraient grandement de ce qui se fait ailleurs. Sous l’impulsion de Fabien de San Nicolas puis de Benjamin Lancar, les Jeunes Populaires ont donc peu à peu perdu sur tous les terrains. Dans le même temps, l’UMP a montré qu’elle avait peur de ses jeunes, peur des décisions qu’ils pouvaient prendre, peur qu’ils se choisissent un destin. Elle les a infantilisé.

En 2012, le constat est terrible : les jeunes populaires, faute d’être formés à la politique, ont regressé. Trop peu nombreux sont ceux à avoir bénéficié de formation interne. Trop souvent, ils ont cru que pour exister, il fallait faire du buzz, fusse-t-il négatif. Benjamin Lancar, qui s’est décrédibilisé avec l’affaire du lipdub, est constamment conspué, et l’image des Jeunes Populaires en a pâti. Ces jeunes, qui pourtant acceptent de donner de leur temps pour participer à la vie de la cité, sont la risée du monde politique, et même au-delà.

Pire que tout, il suffit d’échanger avec eux pour se rendre compte que la plupart de ceux mobilisés pour militer sur internet ne dispose pas des bases théoriques et historiques nécessaires pour assurer ce rôle, la plupart étant même incapable de répondre sur les valeurs de l’UMP… qui figurent pourtant en toutes lettres sur son site internet. Politiquement, ils se sont grandement appauvris, et peut nombreux sont ceux capables de savoir quelles sont les valeurs de la droite… Combien pensent encore que Sarkozy est un libéral ?

Le buzz et le bashing sont devenus les deux mamelles des jeunes populaires. On les forme à l’agressivité d’une Morano, pas à la culture d’un Henri Cuq ou à la technique parlementaire d’un Pierre Mazeaud. On est bien loin des Jeunes Populaires à l’avant-garde du parti, tel qu’avait pu le rêver Alain Juppé à la création de l’UMP. Et pourtant, comme le disait déjà Pop Spirit en 2006, une autre vision du mouvement de jeunes est possible. Celui d’un mouvement qui croit en ses jeunes, en leurs capacités, et qui les positionne comme l’avenir du parti, au lieu de la dernière roue du carrosse.

Qu’en pensera l’UMP de 2012 ? Calendrier oblige, cette question des jeunes en politique, qui n’intéresse que quelques aficionados, revient une nouvelle fois au centre des débats. Et c’est peut être la chance des Jeunes Populaires. Parce qu’après avoir servi de serpillère pendant 7 ans, ils ont enfin une chance de pouvoir être considéré par leurs aînés comme de véritables politiques en devenir, et repartir sur un projet qui leur permette à nouveau de se former et d’acquérir les fondamentaux nécessaires à leur avenir politique. Ou pas.

Ce qui nous rapproche du problème de Copé : comment voit-il le rôle des Jeunes Populaires au sein de l’UMP ? Qu’il le veuille ou non, il devra réfléchir à cette question avant même de valider le calendrier des élections internes jeunes qui lui sera présenté par Benjamin Lancar. Ou pas, s’il s’en fout ou a déjà une idée toute faite sur la question. Reste que ce qui sera l’un des derniers actes de son mandat de secrétaire général de l’UMP peut lui coûter cher s’il se plante.

Certes, Fillon ou Copé pourraient l’un comme l’autre être plutôt tentés de revenir au système de SNJ pour éviter les écueils rencontrés par leur mentor Sarkozy entre 2004 et 2006, qui ont laissé de mauvais souvenirs. Mais comme je l’ai démontré, ce sera compliqué à gérer au niveau européen, et ce serait démarrer un mandat avec l’image extérieure d’être un dictateur infoutu de démocratie interne, et l’image interne d’être infoutu de faire élire son candidat. En position de faiblesse, donc.

Ce ne sera évidemment pas le cas d’un Juppé qui lui, avait impulsé un développement selon une toute autre philosophie de développement des Jeunes Populaires et plus largement, de l’UMP. Si je ne connais pas son avis actuel, je doute toutefois fortement que la déconfiture des Jeunes Populaires ait pu le faire changer d’avis sur ce chapitre.

Quel projet pour l’UMP ?

Le dossier de la succession de Benjamin Lancar sera donc l’un des points chauds de cette fin de mandat de Copé. Nommé par Nicolas Sarkozy, il n’avait pas de réelle marge de manœuvre à la tête de l’UMP. Il ne fait aucun doute qu’une erreur dans la gestion des dossiers qui lui restent pourraient lui être fatidique.

Par chance, il lui reste un échappatoire : procéder aux élections des CNJP, même sans le respect des zones, et laisser à son successeur le soin de régler l’élection du président des Jeunes après le congrès.

Cette solution pourrait satisfaire tout le monde. L’inversion du calendrier remporterait l’adhésion des tenants de l’option « choisir son jeune », sans avoir à revenir à l’option « nomination d’un SNJ ». Du moins temporairement : le mandat d’un président jeune est de 2 ans renouvelables, celui du président de l’UMP est de 3 ans, donc un jour le problème se reposera. Mais reporter l’élection pourrait aussi convenir aux partisans de la « modernisation de l’UMP », qui aurait alors la possibilité de modifier le règlement intérieur en parallèle à cette élection, pour donner de meilleures garanties d’autonomie au mouvement et éviter les pressions qui ont eu cours dans le passé.

A contrario, faire élire le président des jeunes selon le calendrier prévu par les statuts présenterait un vrai risque. Vu le passif sur les élections jeunes, et les habitudes prises par les cadres, l’élection sera chaude. Ca s’écharpera dans tous les sens. Si un jeune copéiste se présente, il sera accusé de bénéficier des avantages du parti pour se faire élire. Si un jeune fillonniste se présente, il sera accusé d’autres maux. Les couteaux seront alors de sortie, et les médias se régaleront de ces affrontements publics, puisque les réseaux sociaux seront de la partie. Bref, ce sera une répétition générale du congrès. Le tout pendant la campagne des aînés pour la présidence de l’UMP.

Le téléscopage risque de faire mal… A l’heure où l’UMP a déjà du mal à conserver une façade d’unité, nul doute qu’elle volerait en éclat. L’élection jeune en vaut-elle la peine ? Rien n’est moins sûr… et vu la place accordée aux jeunes dans le parti, il serait dommage de mettre le feu aux poudres. Sauront-ils se raisonner pour éviter que l’affrontement n’ait lieu dès cet été ? D’autant que si les jeunes se choisissent un représentant d’un camp, et que l’autre camp emporte la présidence de l’UMP, qu’adviendra-t-il ?

Bref, ce dossier qui arrive sur le bureau de Copé n’est qu’une démonstration de plus d’un fait capital : on arrive enfin au vrai dossier de ce congrès à venir et à la vraie question qui sera posée aux adhérents de l’UMP en novembre prochain. En la matière, et quels que soient les candidats, il n’y a que deux options :

  • choisir dès 2012 son champion pour 2017 et lui donner le parti pour qu’il dispose d’une longueur d’avance dans la course à l’Elysée, et considérer alors le parti comme n’étant qu’un marchepied pour la magistrature suprême,
  • ou choisir un président de l’UMP qui développe le parti selon un projet précis tant en ce qui concerne son fonctionnement que ses valeurs, pour lui donner les meilleures chances de faire face aux échéances à venir, et donc considérer que le parti a un rôle à tenir en dehors de son positionnement pour la présidentielle.

Tout l’enjeu de ce congrès est là : l’UMP doit choisir quelle est sa conception du rôle d’un parti politique, et se trouve donc plus que jamais à la croisée des chemins.

Edit : Jean-François Copé a annoncé ce samedi lors de la réunion des RDJ que Benjmain Lancar resterait 4 mois de plus. Son successeur sera élu après le congrès de l’UMP. Le secrétaire général du parti a donc choisi l’inversion du calendrier.

La droite d’après

Depuis la défaite de Nicolas Sarkozy à la présidentielle, l’UMP n’a plus de tête. Ou plutôt elle en a plusieurs.

D’un côté Jean-François Copé, Secrétaire Général de l’UMP, et de l’autre, François Fillon, qui fut pendant 5 ans Premier Ministre. Mais aucun des deux n’est le leader naturel de la droite. Et rien ne dit que l’un des deux le deviendra. S’ils y aspirent, ils n’ont pour autant pas tous les atouts en main : l’un comme l’autre ont été nommés… et ne connaissent pas, pour l’instant, leur poids au sein du parti. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il y a du monde en embuscade…

J’entends d’ici les pro Copé ou pro Fillon m’expliquer qu’enfin c’est évident… Probablement les mêmes qui se félicitaient en hurlant du sacre de Nicolas Sarkozy à la tête de l’UMP en 2004, sans connaître les arcanes du vote. Oui, Nicolas Sarkozy avait obtenu 85,1% des suffrages exprimés, ce qui est un excellent résultat. Mais quid du poids dans l’UMP ? Alors que l’élection avait eu lieu dans un climat de pression incroyable, à grand renfort de promotion, seulement  62300 adhérents avaient choisi de voter, sur les 132922 à jour de cotisation. Soit 55% de participation.

Quant au vote blanc, nul ne saura jamais vraiment s’il était bien de 35,3% comme semblait l’indiquer le chiffre mystère de 64,7% apparu lors de la répétition générale la veille du congrès, un chiffre forcément issu du scrutin (la machine étant verrouillée) et qui ne correspondait ni à la participation, ni aux suffrages recueillis par un des candidats. Personne ne peut l’affirmer, mais si le vote blanc a atteint ce chiffre, le poids de Sarko était inférieur à 30%. Quoi qu’il en soit, le poids devait être bien faible pour que Sarkozy serre la vis si rapidement après son élection, et s’assure du soutien des cadres par la création d’une catégorie sur mesure : la représentation des nouveaux adhérents dans les instances internes.

Bref, à moins d’être installé dans le parti depuis des années et d’avoir su y tisser un réseau, notamment au fin fond des fédérations, il reste très compliqué de disposer d’un poids de taille. Et en la matière, ni Copé, ni Fillon, ne dispose du moindre début de commencement de légitimité. Parce qu’ils ont été nommés. Parce qu’ils ont fait la guerre. Parce qu’ils ont parfois été maladroits.

Copé, comptable de l’UMP

Copé, quant à lui, se heurte à un problème de taille. Bien qu’à la tête de l’UMP, il n’y est pas (encore) légitime, faute d’avoir été élu. Il pourrait se présenter au prochain congrès, mais a-t-il la poigne nécessaire ? Les débordements actuels démontrent qu’il est incapable de tenir cette famille politique. De plus, il ne s’est pas posé en chef de famille, et s’est fait imposer une direction collégiale pour mener la campagne des législatives. Une bataille sans chef de file. On pourrait appeler cela le rassemblement. Cela montre surtout l’incapacité de l’actuelle secrétaire général de l’UMP à se poser en patron, et à prendre ses responsabilités.

Enfin pour terminer, sa stratégie a toujours été de s’appuyer sur des élus qui lui doivent tout. Quels talents a-t-il fait émerger ? Oh certes, Copé a tenté d’acheter des soutiens, en nommant à droite à gauche des secrétaires nationaux, afin de les obliger. Mouais. L’armée mexicaine, ça dévalorise vite le poste, et ça ne permet pas de s’assurer un soutien fiable et durable. On ne peut pas dire que ses recrutements, à l’image de Valérie Rosso-Debord, aient vraiment été judicieux. Or ce sont autant de boulets qu’il n’a pas su gérer, et qu’il lui faudra traîner.

Quant à son réseau de députés, il est bien meilleur que celui de Fillon… et ne peut être considéré comme autrefois : on parle ici d’un réseau de députés dont il ne restera pas forcément grand-chose après les législatives, et qui en plus, est très volatile. Parce que le sarkozysme est mort entre temps. Et nombreux sont ceux à  suer en ce moment pour conserver leur circonscription, et avoir envie, une fois dans l’opposition, de donner de la voix. Encore un réseau finalement assez friable… Assez peu sur leur propre vote –le vote électronique ne garantissant pas l’anonymat, les cadres vont voter comme il faut- mais sur celui de leurs ouailles. Et c’est bien ce qui compte.

Sur le plan idéologique, il reste très marqué par des prises de positions très polémiques, qui entreront dans son bilan personnel, et peuvent froisser une partie des militants. En effet, Copé est intimement lié à ce que l’UMP a fait depuis qu’il en est le secrétaire général : qu’il le veuille ou non, il est comptable de toutes les polémiques qui ont émaillées la vie du parti. Et là encore, la preuve se fait par le contre exemple : entre 2005 et 2007, Sarkozy avait pris ses distances avec le gouvernement Chirac… justement pour se positionner pour la présidentielle.

Fillon, l’instable coucou

Fillon, lui, n’est hélas pour lui pas plus légitime, contrairement à ce qu’il imagine. Avoir été Premier Ministre est une qualité, mais est-ce suffisant ? En d’autres termes, qu’apporte-t-il de plus que Juppé ou Raffarin ? Rien. En revanche, il a de sacrés casseroles aux fesses. Première d’entre elles, sa passion pour la ventilation. Girouette de classe internationale, on l’a connu balladurien entre 1993 et 1995, devenu chiraquien en 2002 pour entrer au gouvernement, puis sarkozyste –et en opposition très marquée avec le gouvernement d’alors- lorsque Villepin ne l’a pas conservé en 2005. Il avait dit alors « Vous faîtes de moi le directeur de campagne de Nicolas Sarkozy ». On a connue personnalité plus capable de rassemblement…

Non content de suivre son intérêt personnel au sein du parti, il fait de même pour ses aventures électorales : ça ne l’a en effet pas dérangé de quitter sa terre d’élection, la Sarthe, et sa circonscription qui menaçait de tomber à gauche, pour la confortable 2ème circonscription de Paris. Coucou dans le nid de Rachida Dati. On a connu personnalité politique plus courageuse… Mais à l’entendre, il l’a fait pour se présenter à Paris. Curieusement, il ne parle plus de la capitale : a-t-il enfin compris que briguer Paris lui barrerait la route pour 2017 ?

Et pourtant il devra y aller. Cet épisode l’oblige désormais à affronter la bataille de Paris en 2014, faute de quoi il passera pour le couard qui s’est mis à l’abri. Ce qui lui coupe sous le pied tout destin présidentiel : s’il n’ose y aller, il sera un lâche. S’il y va et perd, il aura été incapable de remporter une bataille capitale (sic !) et s’il gagne, il ne pourra abandonner les parisiens pour mener les troupes en 2017. Le piège s’est refermé. A moins qu’il ne soit pardonné, mais en échange de quoi ? Rien n’est jamais gratuit. Fillon, donc, n’est pas en position de force.

Qui d’autres ?

Enfin, il se pourrait que d’autres prétendants apparaissent. Les observateurs aiment à commenter les faits comme étant joués, mais c’est oublier un peu que l’UMP est une machine complexe qui obéit à d’autres principes que ceux qui ont été montrés sous l’ère Sarkozy. L’UMP, c’est d’abord un projet d’union entre les composantes républicaines de la droite et du centre (droit), quelque chose dont on n’a plus entendu parler depuis de nombreuses années. Mais l’UMP a-t-elle vraiment renoncé à incarner ce projet ? Bien que certains aient cédé à l’appel des sirènes centristes, rien n’est moins sûr. C’est justement l’un des enjeux qui attend l’UMP de demain : faire sa mue, dans un sens… ou dans l’autre.

Rien n’est donc joué que ce soit entre Copé et Fillon… ou d’autres prétendants. Le mandat de président de l’UMP est de 3 ans. Si la droite renonçait enfin à être la plus bête du monde, elle pourrait profiter de ce mandat 2012-2015 pour remettre de l’ordre dans le parti, dans les fédérations, dans les statuts –avec notamment, la mise en place éventuelle d’un ersatz de courants, et des primaires pour la désignation du candidat-, retravailler la ligne politique de l’UMP qui s’est bien éloignée pendant 5 ans de la charte des valeurs de l’UMP, …. Ce mandat de 3 ans devrait, si la droite était maligne, être confié à une personnalité de droite indiscutable en interne, crédible, et surtout, qui ne soit pas candidate pour les présidentielles de 2017.

Et des personnalités de ce type, il en existe dans l’UMP. Elles pourraient même, ensemble, former un ticket Président-Vice Président-Secrétaire Général. Sauf que pour qu’elles se présentent, il faudrait une paix armée. Une paix que toutes les tendances s’imposeraient, en acceptant de reporter la grande baston de 3 ans, au moment des éventuelles primaires.

Copé et Fillon seront-ils assez intelligents pour choisir cette option ? L’attrait du pouvoir étant ce qu’il est, rien n’est moins sûr. Mais la possibilité existe. Et les autres prétendants aux primaires de 2017 pourraient bien être intéressés par cette perspective. Sans parler des tendances oubliées sous le sarkozysme, qui n’ont pas vraiment envie de voir les mêmes se comporter de la même manière. Le moins que l’on puisse dire c’est qu’en la matière, il n’y a que les héritiers directs du sarkozysme pour penser que tout est écrit.

L’avenir immédiat

Et pourtant, l’UMP devra rapidement se trouver un chef. Et plus rapidement qu’il n’y paraît aux yeux des observateurs néophytes. En effet, les statuts de l’UMP prévoient un congrès en novembre pour désigner le nouveau président de l’UMP. En 2004, Nicolas Sarkozy avait été élu pour un mandat de 3 ans qui prévoyait alors une nouvelle élection à la fin de l’année 2007. Soucieux de ne pas trouver à la tête du parti un opposant qui aurait pu se comporter avec lui comme il l’avait fait avec Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy avait fait procéder à une modification des statuts, qui prévoyaient, à l’article 48, une disposition transitoire instaurant un secrétariat général pour la durée du quinquennat. Nicolas Sarkozy n’étant plus président de la République à compter du 16 mai prochain, l’UMP se trouve dans l’obligation de procéder à l’élection d’un nouveau président.

Si François Baroin a annoncé qu’il n’y avait aucune urgence à convoquer un congrès avant l’été, ça n’est pas, contrairement à ce qu’ont pu penser ceux qui ne connaissent pas l’UMP sur le bout des doigts, pour renvoyer l’élection à plus tard. C’est tout simplement parce que le congrès n’est pas prévu avant… et que le processus de l’élection du président ne permet pas de l’anticiper. L’articles 26 des statuts précise que « Le Président de l’Union est élu au suffrage universel, par l’ensemble des adhérents, au scrutin majoritaire à deux tours ; les modalités de vote sont définies par le Règlement Intérieur. »

Mais les conditions de cette élection sont déterminées très précisément par le Règlement Intérieur de l’UMP. L’article 26 nous apprend ainsi que les candidatures doivent être transmises 2 mois au plus tard deux mois avant le scrutin, et disposer du parrainage de 3% des adhérents à jour de cotisation. Ces éléments posés, il devient donc strictement impossible d’anticiper l’élection avant l’été. En revanche, pour être dans les temps prévus par les statuts et permettre à l’UMP de disposer de son président en novembre, il faut que les candidatures soient parvenues aux instances en charge de l’élection au plus tard mi-septembre… et donc lancer le processus de parrainage au cours de l’été. Exactement comme en 2004.

Pour y échapper, il ne reste que deux possibilités : ne pas respecter les statuts, ou convoquer un conseil national modifiant le règlement intérieur pour permettre de reculer le congrès. Dans un cas comme dans l’autre, l’UMP se montrerait incapable de respecter ses institutions, ce qui aurait un retentissement important sur son image… à un moment où le parti tangue déjà. Et cela affaiblirait encore plus Jean-François Copé. Nul n’ayant intérêt à reculer l’échéance, l’UMP devrait logiquement convoquer un conseil national juste après les législatives, et lancer le processus, en informant les adhérents.

C’est la raison pour laquelle, à titre personnel, j’ai décidé de reprendre ma carte à l’UMP. En effet, le règlement intérieur est clair : « figurent sur les listes électorales, les adhérents à jour de cotisation au 31 décembre et au 30 juin précédant le scrutin. » Si les adhérents 2011 pourront renouveler leur cotisation jusqu’au vote, tous les autres devront, pour figurer sur les listes, être adhérents au 30 juin. Or par définition, les non adhérents n’ont pas à être informés. Il est donc important que les sympathisants de droite qui souhaitent participer à la reconstruction de l’UMP et porter leur voix pour déterminer à quoi ressemblera la droite de demain (union de la droite et du centre, ou dérive droitière ?) doivent absolument prendre leur adhésion avant le 30 juin. Même s’ils ne seront pas décisionnaires sur les candidatures qui elles, seront certainement l’objet de discussions entre les intéressés…

Sarkozy a peur de son ombre

Nicolas Sarkozy est un petit malin. Après avoir dirigé l’opposition dans son propre camp pendant 5 ans, histoire de rafler la présidence de la République, l’ancien président de l’UMP est sur ses gardes… et verrouille toutes les instances de son parti afin que personne n’agisse comme lui l’a fait.

Ainsi, le président de l’UMP ne sera plus élu. « Nicolas Sarkozy va proposer ce lundi une modification des statuts de l’UMP. Il n’est pas utile de conserver l’ancienne structure en élisant un nouveau président qui, un jour, pourrait s’opposer à lui », explique M. Gaudin, vice président de l’UMP élu en 2004 sur le même ticket que Nicolas Sarkozy.

Evidemment cette réforme, qui sera finalement votée par le congrès à l’automne, a un objectif très clair : Nicolas ne veut pas prendre le risque qu’on lui fasse ce qu’il a fait à Chirac… Comprendre : l’ancienne structure ne servait qu’à prendre le parti… et pas question pour un autre d’imaginer faire pareil !

D’où ces changements de statuts, devenus subitement nécessaires. En effet, le mandat de président de l’UMP devait être remis en jeu dès ces jours ci lors d’un congrès, vu que nous sommes à plus de six mois (six mois et quelques jours, comme c’est ballot) du renouvellement officiel des instances, prévus originellement fin novembre 2007.

Vu que Nicolas Sarkozy n’a pas été élu tout seul, mais grâce à l’union de la majorité, cette élection aurait pu aiguiser les appétits. Donc soyons démocratiques : pas d’élection à l’UMP ! C’est décidément plus que jamais l’Union des Moutons de Panurge.

Et nous avons à la tête de l’Etat un président de la République qui ne respecte même pas les statuts de son propre parti, qu’il a lui-même modifié en janvier 2006. Tout est censé être normal.

Et après on se demande pourquoi même Cécilia n’aurait pas voté pour son mari ?

La démocratie sauce Sarko

En novembre 2004, lorsque Nicolas Sarkozy a pris la tête de l’UMP –dans tous les sens du terme- il avait promis de « faire de l’UMP le laboratoire de ce qu’[il] voulait pour la France ». Jolie promesse, les foules se sont enthousiasmées…

Deux ans et demi plus tard, nombreux sont les cadres de l’UMP à avoir déchanté, même si peu le disent. La gestion Sarko s’est résumée à une purge chez les cadres et permanents du parti, au trucage d’élections internes –notamment chez les Jeunes et dans le 15ème arrondissement de Paris, enfin ce sont les deux bastions qui ne se sont pas écrasés-, au verrouillage, au non-respect des statuts au mépris total du vote des adhérents, à l’absence de conseils nationaux et donc à l’absence de vote du budget, etc… le tout dans la religion des sondages –la drogue de Sarko- et dans une ferveur militante forcée à coup de revolver sur la tempe.

Personne n’en parle ? Non… Enfin si. Un certain Slimane, conseiller national de l’UMP (le parlement de l’UMP) de Seine Saint Denis, l‘ouvre, en prenant la parole chez Jean-Jacques Bourdin, sur RMC. En direct, il rappelle ses promesses, et notamment celle de la méritocratie, jamais mise en place à l’UMP… qui selon lui (et je confirme) fonctionne selon une logique de cooptation clanique.

Vous noterez, en regardant la vidéo, que Petit Sarko se contente de faire passer cet homme élu par les militants du parti –comme lui- pour un pauvre frustré sur une investiture -ce que Slimane n’évoque pas- et dévie sur la discrimination positive (il aurait fallu que ce soit un Robert qui appelle…), sans bien évidemment répondre sur la méritocratie.

Ou plutôt si, puisqu’il vante la promotion de sa chère Rachida, trouvée dans son cabinet à l’intérieur, et non parmi les nouveaux talents du parti… autrement dit : pas de méritocratie mais bel et bien la cooptation clanique décrite par son interlocuteur !

Slimane, tu t’es fait avoir par Sarko.

Chers lecteurs, n’oubliez pas sa promesse : « Je ferai de l’UMP le laboratoire de ce que je veux pour la France ». Le 22 avril, c’est vous qui décidez…