J’suis un chômeur abandonné…

Ce jeudi soir, les candidats se sont virtuellement affrontés sur le plateau de l’émission Des Paroles et des Actes, à une dizaine de jours du second tour de la présidentielle.

L’un après l’autre, François Hollande et Nicolas Sarkozy ont répondu aux questions des journalistes.

L’occasion pour eux d’évoquer enfin, mais très succinctement, la question de l’emploi… et du chômage. Et de constater que l’un comme l’autre n’envisage que des mesures « rustines » inadaptées. N’y allons pas par quatre chemin sur le constat : chômeurs, les politiques ignorent totalement ce que vous vivez, et n’ont pas l’intention de le découvrir. A force de clichés, ils  vous ont abandonnés. Décryptage.

Le mirage de la formation

Pour Nicolas Sarkozy, la solution se trouve dans la formation professionnelle. Selon lui, le vrai problème du chômage se trouve là. Les chômeurs ne disposeraient pas d’une formation suffisante pour trouver un emploi, ou alors, elle ne serait pas adaptée à la demande. Le mirage du plombier polonais. Les chômeurs seraient tous soit sortis du système scolaire trop tôt, soit des dangereux et irresponsables gauchistes dotés d’un BAC + 5 en socio, qui ne pourraient être absorbés par le monde du travail.

Donc Nicolas Sarkozy veut remettre tout le monde à l’école, sans aucune distinction. L’objectif est simple : donner une formation à tous, et obliger le chômeur à accepter une offre d’emploi correspondant à cette formation. Que vous soyez cadre ou manutentionnaire, peu importe. La philosophie ce cette proposition, c’est que tout est lié à vos (in)compétences, et vous devez passer au rattrapage.

Peu importe qu’il y a encore un mois, vous fûtes un excellent élément de votre entreprise, qui a mis la clé sous la porte. Il n’y a plus de crise qui tienne, vous êtes au chômage, vous êtes coupables. D’avoir eu des problèmes scolaires, peut être. D’avoir choisi la mauvaise orientation, c’est possible. Mais surtout, d’avoir perdu votre boulot. Chômeur, ton chômage, c’est de ta faute. Et on va te le faire payer cher.

Naturellement, certains sont concernés par les problèmes de formation. En premier lieu, ceux qui n’arrivent pas à entrer sur le marché du travail. Leur formation est-elle adaptée ? Si non, pourquoi les a-t-on orienté vers ces formations ? Personne ne se pose la question : mieux vaut les accuser de l’avoir choisie. Ca évitera de se demander pourquoi les entreprises refusent de faire confiance aux jeunes diplômés.

C’est tellement plus facile de faire croire que tous les jeunes qui ne s’insèrent pas sur le marché du travail sortent de formations inadaptées. Ce qui est naturellement faux. Combien d’entre eux s’entendent répondre qu’ils n’ont pas d’expérience ? Combien d’entre eux se voient proposer uniquement des stages ?  Combien d’entre eux vivotent de petits boulots très éloignés de leur formation –cette sacro-sainte putain de formation- juste parce qu’à la sortie on ne leur donne pas leur chance ? Cachez ce problème que l’on ne saurait voir !

Ensuite, il y a ceux qui n’ont pas de formation. Naturellement, ceux là ont besoin d’aide. Mais d’ailleurs, pourquoi n’en ont-ils pas ? J’entendais hier Nicolas Sarkozy pleurnicher sur les artisans qui cherchent des apprentis et n’en trouvent pas. Ce qui me donne l’occasion de vous donner l’exemple du petit frère d’une de mes meilleures amis. Romain a 18 ans. Il veut être plombier. Ca tombe bien, on manque de plombier. Mais voilà, Romain a 18 ans, et c’est son plus grand problème. Il voudrait bien retourner au lycée, pour décrocher une formation en alternance de plombier.

Mais pour être admis au lycée public qui assurerait cette formation, il doit trouver lui-même le patron qui le prendra en alternance. Bref, trouver le job. Sinon, pas de place au lycée. Mais personne ne veut de Romain. Parce que Romain a 18 ans, et que le patron devra le payer plus qu’un jeune de 16 ans qui ferait la même formation. Alors Romain s’est tourné vers Pôle Emploi. Réponse : attendre un an et sa demande sera étudiée, et il obtiendra peut être une formation de plombier.

Pour ceux qui ont besoin d’une formation, c’est déjà très compliqué. Mais tous les chômeurs ont-ils vraiment un problème de formation ? Et quelle est la part de crédit accordée à l’expérience professionnelle, appelée aussi « formation sur le tas » ?  Pour ma part, je suis titulaire d’un Bac + 3 en organisation de spectacle. Un métier que je n’ai jamais exercé. Et pour cause, c’est un secteur bouché. Je n’ai pas attendu de pointer des lustres au chômage pour remettre en cause ma formation. J’ai travaillé. Je me suis formée à partir de compétences comme l’écriture ou la communication, et j’ai appris non pas un, mais plusieurs métiers. J’ai de multiples compétences qui m’offrent l’accès à pas moins de trois jobs différents. Et ce serait un problème ?

D’ailleurs, 15 ans après l’obtention de mon dernier diplôme, il me semble que l’expérience professionnelle suffit à mes candidatures. Très honnêtement, j’ai entendu tous les prétextes du monde pour voir mes candidatures rejetées, mais jamais, ô grand jamais, personne ne m’a encore dit que c’était parce que je n’avais pas le bon diplôme lorsque je candidatais pour mon activité principale. Et pour cause : j’ai plus de 10 ans d’expérience ! Tous les recruteurs reconnaissent que cela vaut largement un diplôme…

Concrètement, va-t-on m’obliger à suivre une formation pour m’obliger à accepter ensuite deux offres d’emploi dans le domaine dans lequel je cherche déjà un job depuis un bail… ou peut on passer directement à la deuxième partie de la phrase ? Ce qui serait utile à un profil comme le mien serait plutôt une validation des acquis –qui ne prennent pas des mois comme la formule actuellement proposée par Pôle Emploi- ou une formation à la carte sur des compétences telles que les langues ou l’informatique. Mais là, ce serait plus compliqué d’appliquer l’obligation d’accepter une offre d’emploi correspondant à la formation.

Naturellement, un autre problème se pose. Si tout le monde doit obligatoirement suivre une formation lorsqu’il est au chômage, quid des CDD multiples ? Devront-ils enchaîner les formations entre deux CDD et changer tout le temps de métier, ou auront-ils une dispense ? Or c’est bien ces gens « qui travaillent quelques mois pour toucher des droits » que le président sortant vise… sans avoir conscience que pour quelques fraudeurs, l’écrasante majorité subit cette précarité et rêve du CDI qui viendrait enfin rompre la chaîne des CDD, qui rime avec logement précaire et insécurité financière.

Enfin, si la formation obligatoire pour tous est vraiment LA solution à tout, peut-on m’expliquer pourquoi Gilloux 99, qui a fait une formation payée par Pôle Emploi, correspondant aux métiers et besoins professionnels de la région dans laquelle il habitait alors (superviseur de centres d’appels, en Picardie) n’a pas trouvé d’emploi dans sa région à l’issue de cette formation si capitale pour le remettre sur le marché de l’emploi, et pointe aujourd’hui au RSA bien qu’ayant déménagé sur une région encore plus porteuse ? La solution miracle serait-elle faillible ?

Sans compter que personne n’évoque le problème capital du financement, et de l’indemnisation. Pour Nicolas Sarkozy, les chômeurs seront indemnisés pendant leur formation. Tous ? A quelle hauteur ? Aujourd’hui, un chômeur en formation continue de percevoir Assedics. Du moins, tant qu’il dispose de droits aux Assedics. Car une fois encore, la durée d’indemnisation dépend de la durée de cotisation. Certains chômeurs ne touchent donc pas d’Assedics. Pour les autres, la durée maximale est de deux ans, mais peut tout à fait être de quelques mois.

A l’issue de la période d’indemnisation Assedics, l’indemnisation durant la formation peut exister, sous conditions. Elle n’est donc pas, aujourd’hui, automatique. Elle dépend  de multiples critères, et  ne peut excéder 650 euros. Mais ce montant peut être bien inférieur. Ainsi, un de mes amis ne touchait que 200 euros pendant sa formation, qui de plus, avait lieu dans une autre région que la sienne. Il n’a pu survivre que grâce au maigre salaire de son épouse.

Mais cela choque-t-il vraiment ? Hier un internaute me disait sur Twitter : « Si tu es au RSA, tu as 400 euros par mois. Mieux vaut en toucher 650 ». Merci pour ce beau projet de vie qui nous est promis. La logique semble être la suivante. Si l’on touche 400 euros de RSA, il vaut mieux toucher 650 euros pendant une durée de formation a priori longue (si on veut disposer d’une bonne formation) et au résultat forcément aléatoire (rien ne garantit l’insertion immédiate sur le marché du travail à la sortie de ladite formation) que de risquer toucher près de 900 euros en trouvant un job au SMIC peut être le lendemain. Expliquez moi. Mais alors si, comme dans le cas de mon ami, la formation n’est indemnisée que 200 euros, alors qu’on avait 400 au RSA, c’est mieux aussi ? Et la marmotte, elle met le chocolat dans le papier d’alu ?

Tout ceci au nom de quoi ? De la valeur travail. Le « vrai » travail. Le glissement idéologique n’est pas innocent. Le « vrai » travail n’est plus avoir un emploi qui permet de tirer un salaire de son labeur. Le vrai travail, c’est être occupé, fut-ce pour une tâche qui ne correspond ni à ses aspirations, ni à ses compétences, en échange d’une indemnisation standardisé qui n’est pas fonction du marché. Pour sortir les chômeurs du travail, Sarkozy est prêt à soviétiser le travail : tous au boulot, pour un pécule uniforme, et sans rapport avec les aspirations. Et il se prétend de droite ? Sa-vou-reux !

Les emplois aidés… pour tous ?

En face, ça n’est guère mieux. En effet, pour François Hollande, la solution au chômage de masse, c’est l’emploi aidé. Fatalement, de masse aussi. Parce que pour le candidat socialiste, les gens au RSA sont éloignés de l’emploi depuis trop longtemps. Erreur. Certains n’ont jamais connu l’emploi, comme nombre de jeunes diplômés. Mais d’autres parce qu’ils n’ont pas cotisé suffisamment longtemps. Non, le RSA n’arrive pas nécessairement au bout de longues années de galère… En même temps pour François Hollande, le RSA est de 700 euros, pas étonnant qu’il ne maîtrise pas le sujet.

Donc pour le socialiste en passe d’emporter la présidentielle, tout le monde aurait besoin d’un contrat d’insertion, pour se remettre au travail. Là encore, ça peut tout à fait convenir à certains publics en perte de confiance, ou dont les qualifications très techniques peuvent nécessiter une remise dans le bain. Mais une secrétaire qui a cessé de travailler il y a 6 mois et qui est au RSA, on imagine qu’elle ne sait plus décrocher le téléphone ??? M’enfin, qu’est ce que c’est que cette manière de systématiquement prendre le chômeur pour un demeuré ? Alors on peut avoir travaillé des années, avoir des compétences reconnues par ses anciens employeurs, et tout à coup ne plus savoir rien faire parce qu’on est au chômage ?

Mais dites moi les politiques, ce n’est pas vous, par hasard, qui prétendiez que la crise ralentissait les embauches ? Alors pour les entreprises, l’argument de la crise tient, mais par contre pour les chômeurs, ça ne peut expliquer leur période sans emploi : ils sont forcément devenus débiles ! Autrement dit, on distille dans la tête du reste de la population que le chômage n’est ni plus ni moins qu’une sorte de pathologie dont les effets seraient de rendre subitement incompétent. Ma-gni-fi-que. Voilà qui va aider le chômeur à retrouver du lien social, tiens !

De toutes façons cette proposition est fantasque. Vu le nombre de chômeurs, elle serait bien trop onéreuse… Il y aura certainement à nouveau des emplois aidés, mais ils ne seront ni obligatoires (au moins le candidat PS ne veut pas obliger les chômeurs à quoi que ce soit), ni accessibles à tous (comme auparavant, il y aura des conditions). Rien de neuf sous le soleil, donc. Et tout ceci ne nous dit donc pas comment les chômeurs seront aidés. Probablement parce que comme d’habitude, ils ne le seront pas.

Mais diantre, quand les politiques comprendront-il que ce que veulent les chômeurs, c’est un emploi ? Pas une formation. Pas un sous emploi. Pas un vrai travail. Un vrai emploi. Comme ceux qui sont issus des offres publiées sur internet ou dans les journaux. Des vrais jobs. Et non des cache-misères destinés à sortir des chiffres du chômage un maximum de chômeurs afin de prétendre avoir résolu le problème. Les formations comme les emplois aidés ne sont que des outils à mettre à destination de ceux qui en ont le plus besoin. Mais en aucun cas basculer dans le pérenne.

L’objectif de tout chômeur est de retrouver un véritable emploi, payé à sa juste valeur, en fonction du marché.  Ce serait bien qu’il en soit de même pour les pouvoirs publics… Hélas, ils y ont renoncé. Personne ne s’intéressera donc au comportement des entreprises de recrutement, qui utilisent des logiciels de tri de candidatures massives pour écarter des candidatures pourtant valides, et notamment celles de candidats dépassant un certain nombre de mois sans activité.

Ou encore celles qui organisent de faux entretiens en recevant des candidats ne pouvant pas répondre aux critères des entreprises clientes, le tout en 5 minutes chrono, pour prétendre avoir vu XX candidats, toucher la prime relative au poste, qui sera en réalité attribué à un membre du réseau. Ou encore l’absence d’obligation de réponse à un candidat. Ni du poids prépondérants des diplômes. De celles qui écartent des candidats sur le physique. Sur la raison politique. Ou autres discriminations. De celles qui profitent de la crise pour sous-payer leurs nouveaux salariés, et tirer ainsi les salaires vers le bas. Non, on ne parlera jamais de ce qu’il se passe de l’autre côté du miroir, ni de la mauvaise foi qui devient vraiment tendance chez les recruteurs, puisque de toutes façons, tout est de la faute du chômeur.

Entre mesures coercitives culpabilisantes et mesurettes, aucun politique ne propose de se préoccuper sérieusement de l’accès à l’emploi, en regardant dans plusieurs directions. Non, les politiques préfèrent se cacher la tête dans le sable, et omettre ce sujet. Le message reste le même que d’habitude : chômeurs, démerdez-vous !

Dimanche je voterai… François Hollande

Longtemps, je me suis demandée ce que j’allais bien pouvoir voter lors de cette présidentielle. En tant que ChiracoJuppéiste absolument pas convaincu par le bilan de Nicolas Sarkozy, je suis naturellement orpheline de candidat, faute d’un choix plus probant à droite.

Durant deux années, j’ai milité pour Dominique de Villepin, tout en doutant de ses capacités non pas de président, mais de candidat. La suite de l’histoire m’a d’ailleurs donné raison, puisqu’il ne s’est pas qualifié. N’étant représentée par personne, que faire ?

Nombreux ont été les amis à tenter de m’orienter vers deux candidats. D’une part, Nicolas Dupont Aignan. Au nom du gaullisme. Bon, j’ai toussé. De nos jours, aucun candidat n’est réellement gaulliste. Ce terme est tellement galvaudé par les profanateurs de croix de Lorraine que j’ai du mal avec ceux qui s’en prétendent.

Mais surtout, je déteste les petits candidats qui font des promesses qu’ils ne pourraient jamais tenir s’ils étaient élus. NDA nous propose de sortir de l’Euro. Mais alors, pourquoi chiffre-t-il son programme en Euro ? Pourquoi ne pas parler en francs et estimer la parité qui pourrait exister ? Parce que ça ferait mal ? Pour sûr. Lorsque j’en ai parlé à ceux qui me conseillaient NDA, j’ai tout de même eu droit à un argument collector : « OK, mais à part ça ? Il est gaulliste ». A part ça ? Ca ne me semble pas un détail…

On a aussi essayé de m’orienter vers Bayrou. Soit disant le plus proche de mes idées. Un de ses soutiens a même poussé le vice jusqu’à me dire qu’il était gaulliste. J’ai toussé aussi. Je me suis également demandé pourquoi  tout le monde tenait à utiliser avec moi l’argument du gaullisme. Sûrement un raccourci de plus en raison de mon parcours Chiraco-Juppéiste avec un passage chez Villepin. C’est très court, mais bon. C’est aussi ça les élections.

Revenons à Bayrou. Certains points du programme me séduisent. Mais voilà, ça ne me suffit pas. La présidentielle, dans notre Constitution, c’est avant tout la rencontre entre un homme et un peuple. Le programme fait partie de l’homme. Mais ne fait pas l’homme. Et en 2007, j’ai déjà voté Bayrou au premier tour. Pour quoi ? Pour que le soufflé retombe, que le Modem reste à 56k, et qu’il ne se passe rien pendant 5 ans. Jusqu’à la présidentielle.

Si encore Bayrou avait eu mieux à faire que de monter un parti, comme par exemple faire son job de député à l’Assemblée nationale, j’aurais pu me laisser tenter. Oui mais voilà… L’homme qui entend rendre la présence obligatoire au Parlement affiche un bilan en la matière… quasi nul. Encore une fois, je n’aime pas qu’on me prenne pour une truffe.

Cette situation, je l’avais anticipée dès l’été dernier. A l’époque, je venais de quitter Villepin, imaginant déjà qu’il n’irait pas au bout, et j’imaginais que peut être, Bayrou finirait par me convaincre. Mais faute d’en être certaine, je m’étais préparée à voter pour le candidat de gauche. J’ai donc participé à la primaire, pour choisir celui pour lequel je serais prête à voter sous réserve de sa qualification si au second tour le candidat PS venait à être opposé à Nicolas Sarkozy. J’avais choisi François Hollande.

Restait alors la question du premier tour. J’ai un temps envisagé l’abstention, faute de ne pas trouver de candidat qui me permette d’exprimer ma sensibilité. Non, NDA n’est pas proche de moi. Non, je ne suis plus dans le mood(em) de la génération orange, déçue de 2007. Et enfin non, je ne voterai jamais Nicolas Sarkozy. Question de principe.

J’ai d’ailleurs évoqué cette idée de m’abstenir sur Twitter. Certains retours m’ont outrée tant le politiquement correct a désormais envahi cet espace. J’ai eu de l’argument collector. Par exemple, « tes grand-mères se sont battues pour que tu puisses voter ». Non, mes grand-mères ne se sont jamais battues pour ça, merci de ne pas les mêler à ces clichés. Il y a eu de nombreuses batailles dans ma famille, mais pas celles-ci. En même temps, elles étaient toutes les deux en cloque.

J’ai aussi eu droit à « des gens sont morts pour qu’on puisse voter ». Euh… des gens sont aussi morts pour la monarchie. Et les gens qui sont morts pour qu’on puisse voter, c’était à quelle époque et avec quel résultat ? Nan je demande…

Bref, les gens ont globalement du mal à comprendre qu’il existe deux types d’abstentionnistes. Celui qui n’en a rien à faire de la politique et qui a la flemme de bouger jusqu’au bureau de vote. Et puis il y a celui qui ne trouve pas parmi les dix candidats quelqu’un qui lui convienne, qui sait que le vote blanc et nul n’est jamais commenté, et qui se dit qu’en s’abstenant, il aura un vrai poids. Il pourra faire passer son message. Et ça, c’est aussi de la politique. Toujours se souvenir qu’en toute chose il y a le champ et le contre-champ…

Bref, j’ai tergiversé. Réfléchi. Etudié la question. Et pensé à 2007. Cette année là, il était hors de question pour moi de voter pour Ségo –je n’avais pas été l’une des animatrices du site Segostop pour rien- et encore moins Sarko. Au premier tour, j’ai choisi Bayrou. Les terres du milieu. La génération orange. Qui m’a déçue ensuite, mais sur le coup c’était chouette. Et au second tour… j’ai voté Chirac.

Si c’était en 2007 l’expression d’une fidélité sans faille au président –j’ai toujours voté Chirac- ça n’a plus de sens aujourd’hui, même si ma fidélité à Chirac sera éternelle. Elle est simplement plus affective que politique depuis qu’il est retiré des affaires, ce qui ne lui accorde plus vraiment de place sur un bulletin de vote.

Reste alors le plan B. Celui pour lequel j’ai voté lors de la primaire socialiste en octobre dernier. Lorsque j’ai fait le choix d’y participer, c’était précisément pour me donner une chance de « choisir » le socialiste qui pourrait figurer au second tour… dans l’idée de voter pour lui contre Nicolas Sarkozy.

Aujourd’hui, je souhaite toujours le départ de Nicolas Sarkozy, au terme d’un quinquennat à mes yeux calamiteux sur bien des plans, notamment sur les libertés et les institutions (dont la réforme territoriale), sans parler de la déliquescence de la fonction présidentielle, de sa confusion avec l’UMP et même sa famille, de cette habitude de dresser les français les uns contre les autres, de voir des délinquants partout (y compris chez les chômeurs et les malades), d’user de l’appareil législatif à chaque fait divers, des pressions sur ceux qui le dérangent, et de flirter avec l’extrême droite. De nombreux articles sur ce blog expliquent mes divergences avec Sarkozy et bien qu’étant de droite, je ne mettrai jamais un bulletin portant son nom dans l’urne.

Et je veux voir face à lui celui qui dispose des meilleures chances de l’emporter, mais également de gérer la France. Donc, qualifier au second tour celui qui à mes yeux, et parmi ces dix candidats, est le meilleur. Bayrou m’ayant démontré ses limites en 2007 en terme d’équipes, je crois toujours que c’est François Hollande qui pourra non seulement battre Nicolas Sarkozy, mais aussi gouverner. Pour toutes ces raisons, je voterai dès le premier tour pour François Hollande.

Taxe crampons : quels risques pour la Ligue 1 ?

François Hollande imaginait-il lundi soir, sur le plateau de TF1, qu’il déclencherait un véritable tollé dans le monde du football français en annonçant sa proposition de taxer à 75% les revenus au-delà du million d’euros ? Probablement pas. Et pourtant. Depuis, le monde du ballon rond est en ébullition, la très grande majorité des acteurs étant vent debout contre cette proposition. Décryptage.

En France, la mesure proposée par François Hollande devrait concerner environ 3000 contribuables, les plus fortunés. L’idée du candidat socialiste est de faire participer plus à l’effort national ceux qui gagnent le plus. Et donc de leur ponctionner un plus gros pourcentages de leurs revenus au-delà d’une somme plancher, fixée à 1 million d’euros par an. En soi, l’idée n’est pas mauvaise. Là où le bât blesse, c’est qu’elle risque de déstabiliser tout un secteur, qui commençait juste à reprendre des couleurs. D’où les inquiétudes des professionnels du football.

Des joueurs surpayés, oui, mais…

Naturellement, les joueurs gagnent énormément d’argent. Des sommes folles. Considérables. Choquantes pour beaucoup. Des conditions de vie fastueuses sur lesquelles personne n’a envie de verser une larme. Evidemment. Mais pas uniquement en France. Le football est un business international, dans lequel les émoluments sont fixés lors des transferts, en fonction de la valeur marchande du joueur, basée sur son mérite professionnel, et ses résultats. Ce gigantesque marché est peut être choquant, mais il serait illusoire d’imaginer que c’est la France, seule, qui, en baissant le revenu net après impôt des joueurs, va casser ce marché. Conséquence directe : si la France est le seul pays à adopter une telle mesure, les joueurs iront voir ailleurs.

On m’objectera qu’il faudrait trouver des pays pour les accueillir. Certes, le millier de joueurs pros en France ne trouvera pas de terre d’accueil, mais selon l’Union Nationale des Footballeurs Professionnels (UNFP), ce sont plutôt 120 à 150 joueurs qui sont concernés par le palier du million. Et qu’on ne nous dise pas que bien moins de joueurs sont concernés : les revenus des joueurs ne concernent pas uniquement leurs salaires, mais incluent également les primes et les revenus connexes provenant de la publicité et des équipementiers. Tout ceci même si le chiffre sera revu à la baisse, le palier passant à 2 millions d’euros par an pour les joueurs mariés. Paraît-il.

Reste que parmi les joueurs concernés, bien peu auront du mal à trouver un contrat à l’étranger. Si l’on prend le top 10 des joueurs les mieux payés, imaginez-vous qu’un seul d’entre eux galère pour trouver un club anglais, allemand, espagnol ou italien ? On ne nous prendrait pas pour des jambons par hasard ?

1. Javier Pastore (PSG) : 5,3 M€ (+500 000 € de variable)
2. Joe Cole (LOSC) : 4,8 M€ (1,8M€ payé par le LOSC, le reste par Liverpool)
3. Yoann Gourcuff (Olympique Lyonnais) : 4,4 M€
4. Lucho Gonzalez (Olympique de Marseille) : 4,3 M€
4. Cris (Olympique Lyonnais) : 4,2 M€
5. Lisandro Lopez (Olympique Lyonnais) : 4,1 M€
6. André-Pierre Gignac (Olympique de Marseille) : 3,8 M€
7. Alou Diarra (Olympique de Marseille) : 3,8 M€
8. Kim Källström (Olympique Lyonnais) : 3,7 M€
9. Kevin Gameiro (PSG) : 3,6 M
10. Bafetimbi Gomis (Lyon) : 3,5 M

Hélas, cette mesure étant présentée pendant la présidentielle, elle s’accompagne du barnum qui va avec, et des grands mots qui n’ont que peu de relation avec la réalité économique du monde du football. Depuis l’arrivée des qataris au PSG, il est en effet de bon ton de cracher sur les joueurs sous prétexte qu’ils gagnent des millions. Peu importe qu’ils n’aient pas été à l’origine de l’envolée des prix, et qu’ils n’en soient que de simples pièces.

La pensée populaire vaut, en temps de crise, qu’on tape sur les plus riches, sans chercher à comprendre. Et attention, les grands mots sont de sortie. Ainsi, il en va du « patriotisme ». Peut-on m’expliquer en quoi Javier Pastore, de nationalité argentine, devrait être patriote ? Solidaire en temps de crise, je veux bien, mais patriote… Bref, on frise le ridicule. Tout ça parce qu’il y a une élection présidentielle, et que le militantisme, dans ces cas là, fait peu de cas de la mesure. Hélas.

Du côté des clubs

Contrairement à ce qu’imaginent certains, ces départs ne seront pas forcément volontaires pour certains joueurs. On l’a déjà vu lors du mercato de janvier : faute de pouvoir continuer de payer le salaire de Lucho Gonzales, l’OM a du s’en séparer, et le vendre. En conséquence, la question porte finalement peu sur les joueurs : certains iront voir ailleurs, d’autres seront vendus par leurs clubs, y compris à perte, pour éviter des problèmes financiers. Pour un PSG qui investit des centaines de millions d’euros depuis l’arrivée de ses nouveaux propriétaires qataris, combien de clubs le nez sur le compte en banque ? Et c’est bien là l’enjeu : quid des clubs ?

Comprenons nous bien. Il ne s’agit pas de pleurer sur le salaire des joueurs. Certes, Christophe Jallet s’est exprimé de manière un peu maladroite, parce qu’il n’avait manifestement pas eu en ligne son conseiller fiscal, et donc pas compris que les 75% ne seraient pas ponctionnés dès le premier euro gagné. D’autant qu’il ne devrait pas être concerné : Christophe Jallet touche un salaire hors primes et autres revenus de 100000 euros par mois, soit 1,2 millions par an… mais est marié. Et donc sous la barre des 2 millions d’euros annuels, le palier étant doublé pour les joueurs mariés paraît-il. Mais là où Dhorasoo a tort quand il dit que « les footballeurs sont déconnectés de la réalité », c’est parce qu’il oublie que ce ne sont pas les joueurs qui ont créé ce marché fou. Dans cette histoire, ils ne sont que des marchandises. Et pour quelques années seulement.

Les inquiétudes du monde du football et la levée de bouclier ne portent donc pas sur les salaires de joueurs, les plus cotés pouvant de toutes façons aller toucher le même salaire ailleurs, mais bien sur l’avenir de nos clubs de Ligue 1 au regard de la situation européenne et mondiale. Car la France n’est pas seule au monde, et ne va pas changer les choses toute seule, avec ses petits bras musclés. Et ce que reproche aujourd’hui le monde du football à François Hollande n’est pas d’avoir instauré une taxe anti-footballeurs –cette mesure ne les visait pas- mais de ne pas avoir compris les dangers que feraient peser une telle mesure sur l’économie du football et du sport de haut niveau.

L’effet sera immédiat : les salaires des joueurs ne bougeront pas d’un iota, du fait du marché international, mais les clubs, eux, devront intégrer dans leur masse salariale le surcoût lié à ces nouvelles charges, puisque c’est bien eux qui les paieront… du moins s’ils veulent retenir leurs joueurs, honorer les contrats, ou attirer de nouveaux joueurs de même calibre. Le nier serait tout simplement hypocrite.

Les ressources des clubs proviennent, en grande partie, de la billetterie, du merchandising, et des droits TV. Si les grands joueurs décident de quitter le territoire pour des raisons fiscales, il est évident que la Ligue 1 perdra en attractivité. Ce au moment où justement, elle commençait à se relever, après des années difficiles. Moins de joueurs de talent, ça veut dire moins de monde au stade, donc moins de recettes de billetterie. Mais aussi, moins de vente de maillots et autres goodies, donc moins de recettes de merchandising. Mais surtout, à terme, cela engrangera une baisse des recettes liées aux droits TV, les diffuseurs devenant forcément moins généreux pour payer un spectacle moins intéressant. A terme, ce sont donc toutes les recettes des clubs qui risquent de baisser.

Or dès 2013, les clubs seront soumis par la FIFA au fair-play financier, qui sera progressif jusqu’en 2018. Le principe est simple : les clubs devront vivre avec leurs recettes propres, et ne plus compter sur qui que ce soit, pouvoirs publics et actionnaires inclus, pour boucher les déficits ou effacer les ardoises. Une idée plutôt intéressante pour cesser toute forme de concurrence déloyale entre les clubs et calmer un peu le jeu. Mais qui peut, dans le cas d’un championnat en perte de vitesse, avoir des effets pervers. En effet si les recettes des clubs baissent, et comme les clubs ne pourront pas réinjecter d’argent en vertu du fair-play financier, ce sera un cercle vicieux : ils ne pourront plus recruter, même un niveau en dessous, et donc, le championnat de France n’aura plus de possibilité de se relever. Et c’est bien ça qui inquiète les clubs français.

Aujourd’hui, les joueurs suivent pour la plupart un processus de carrière qui les mènent du centre de formation jusqu’en Ligue 1, et c’est une fois repérés dans le championnat qu’ils partent poursuivre leur carrière à l’étranger. Si la Ligue 1 perd de son attractivité, les joueurs cèderont aux vautours qui les attendent déjà à la sortie des centres de formation, et ne passeront plus par la Ligue 1 pour faire leurs armes.

Et les supporters. Parce qu’eux en paieront de toutes façons les pots cassés. Déjà, la suppression du Droit à l’Image Collectif, qui permettait aux clubs une exonération d’environ 30% sur les charges sociales, avait fait du mal dans les caisses, notamment des club les moins riches, touchés de plein fouet par la suppression il y a deux saisons d’une recette bienvenue pour faire face à la concurrence. Ensuite, le fair-play financier, en limitant les dépenses aux ressources propres, faisait craindre une hausse des prix des billets, des abonnements et du merchandising. Mais si en plus il faut compenser le salaire des joueurs, alors on ne pourra y échapper. Progressivement, une place en virage au Parc des Princes, aujourd’hui entre 15 et 20 euros, pourra atteindre les 100 euros comme c’est déjà le cas en Angleterre. Dès lors, le football ne sera plus un sport aussi populaire…

Des dérives à stopper

Naturellement, le monde du football a généré ces dérives. Car depuis 20 ans, les grands clubs ont fait exploser les salaires des joueurs, se les arrachant à coup de millions qu’ils n’avaient pas forcément en caisse. Résultat, le marché est devenu ce qu’il est, et les clubs ont soit vu leurs ardoises purement et simplement effacée, comme la dette fiscale du Real Madrid par le Roi d’Espagne, soit renfloué leurs caisses grâce à l’injection massive de dollars par leurs fortunés propriétaires. Résultat, la planète foot a vécu au-delà de ses moyens, fait grimper les prix jusqu’à ces sommes folles, et généré une bulle financière qu’il serait, en effet, de bon ton d’exploser, histoire de revenir à un niveau plus en phase avec le reste de l’économie mondiale, et surtout, la décence.

Ces excès n’a pas échappé aux instances du football mondial, et c’est justement dans cette optique que la FIFA a tenté de se doter d’un outil pour limiter les dégâts, en instaurant le fair-play financier. Reste naturellement à savoir quels seront les moyens mis en place par la FIFA pour contrôler la gestion des clubs, dont certains ne manqueront pas, il est certain, de chercher à échapper aux sanctions… qui elles aussi devront être suffisamment dissuasive. Et le poids de la FIFA étant relatif, la partie n’est pas gagnée.

Si en Europe, on peut imaginer que la perspective de se voir priver de Ligue des Champions pourrait en calmer plus d’un –il faudra prévoir des sanctions de ce type, et non simplement des amendes-, on peut aussi légitimement se demander ce qui arrêtera les clubs chinois ou du Caucase, vers qui se dirige maintenant la bulle financière, à grands renforts de salaires encore plus indécent, comme en témoigne le recrutement de Samuel Eto’o par le club le club russe l’Anzhi Makhachkala pour 20 millions d’euros par an, soit le double du salaire de Messi au Barça. Et ce n’est pas le seul. Attention par là-bas, on regarde peu l’origine de l’argent, les mafias locales ont de beaux jours devant elles… C’est aussi l’un des points noirs du football actuel.

Alors oui, le football international est à la croisée des chemins, et doit se remettre en question. C’est bien ce que tente d’entreprendre la FIFA. Mais dans le même temps, si nos législations nationales mettent à mal notre sport de haut niveau, nous aurons du mal à nous montrer compétitif, et nous prendrons alors le risque de tuer la Ligue 1. Quand on défend nos industries, en cherchant à garder l’emploi sur le territoire national, quel intérêt y-a-t-il à tuer un de nos pôles de compétitivité, qui génère près de 50000 emplois directs et indirects ? N’est-ce pas un peu contradictoire ? Tout ça pour une mesure reconnue par le candidat PS comme « symbolique », qui ne rapportera pas grand-chose à l’Etat, et peut être même des pertes si ces joueurs, qui payent beaucoup d’impôts, partent ailleurs ?

Certains diront qu’il fallait bien faire quelque chose. Certes. Mais au lieu de se laisser emporter par le show médiatique permanent de la présidentielle, il aurait peut être fallu réfléchir. Regarder qui était touché. Etudier la situation de ce secteur. Et œuvrer au niveau européen. Ne soyons pas dupes, la crise est mondiale. Si l’on met temporairement de côté le cas problématique de la bulle qui se déplace vers la Chine et les mafieux du Caucase, et que l’on essaie déjà de régler la situation en Europe, il existe des solutions à moyen terme. Parce que toute l’Europe est en crise, et les pays où se trouvent les grands clubs sont eux aussi touchés.

L’Espagne, déjà, a supprimé la loi Beckham, qui permettait aux joueurs d’être imposés à 24% au lieu de 43%, de façons à les attirer dans les clubs espagnols. Depuis le 1er janvier 2010, les nouveaux contrats ne bénéficient plus de cet avantage énorme. Ce qui a permis de remettre les compteurs fiscaux à peu près à niveau dans les grands pays du ballon rond, et de permettre aux clubs européens de jouer grosso modo dans la même cour, d’autant que ce sont souvent les clubs qui prennent en charge l’imposition des joueurs.

Tout ça pour quoi ?

Du coup, comment ne pas être dépité par l’annonce du candidat Hollande, qui vient mettre à mal cet équilibre ? Plutôt que de jouer les gros bras de la fiscalité, il aurait été plus intéressant d’œuvrer entre partenaires européens, vers une plus grande harmonisation fiscale. Et pas uniquement pour le football ! Et donner une chance à cette mesure solidaire d’aboutir sans générer d’autres problèmes dans un secteur ou un autre.

Dommage de laisser un sujet, quel qu’il soit, être guidé uniquement par les effets pervers de la campagne présidentielle, qui prône le buzz et les mesures chocs, même si elles rapportent peu dans les caisses étant donné que là c’est la chasse à l’électeur qui intéresse. Ou comment un effet d’annonce a mis tout un secteur à feu et à sang, pour une mesure qui ne sera peut être jamais adoptée, que le Parlement se chargera d’amender et dont on verra bien ce qu’il restera, une fois les lobbyistes entrés en action.

Histoire de dépassionner le débat, terminons par un sourire puisque dans cette histoire, ce sont les wagabee, les wanabee wags, qui vont être contentes : le mariage avec un footballeur va en effet devenir tendance, vu que ce sera l’une des meilleures niches pour défiscaliser. Joueur célibataire touché par ce projet de réforme fiscale, je t’attends !

Villepin se rêve champion de France*

Villepin. Depuis deux ans, l’ancien Premier ministre souffle le chaud et le froid sur une éventuelle candidature à la présidentielle.

Il a d’abord fondé un Club, pour réunir ses sympathisants, puis un parti, République Solidaire, avant de le quitter quelques jours après sa relaxe définitive dans l’affaire Clearstream, laissant ses troupes esseulées. Avant d’annoncer ce dimanche sa candidature, prenant tous les pronostiqueurs à rebours.

Villepin. Le flamboyant. L’ancien international en fin de carrière tentant de mener son équipe en finale de la Coupe de France, mais n’offrant plus assez de résultats pour que quiconque parie un kopeck dessus. Que la phase de qualifications fut longue et pleine de contre performances ! Des succès, il y en a eu, mais ils remontent à loin, et depuis le 19 juin, République Solidaire s’était enfoncée, traversant une longue période sans victoires, entre matchs nuls et défaites.

Car le club de Villepin, bien qu’étant passé pro avec République Solidaire, n’a pas tous les atouts, et frisait la descente en Ligue 2. Déjà, son équipe est composée de jeunes pousses, dont la plupart viennent de la politique de salons, et n’ont même pas joué en CFA. Faute de temps de jeu suffisant, cette équipe est difficile à motiver et à mener pour le libéro de République Solidaire, qui joue souvent seul contre tous.

Alors que plus personne n’attendait un résultat, le numéro 10 a fini par marquer. Il aura fallu attendre les arrêts de jeu et une faute peu évidente du camp adverse pour obtenir un coup franc idéalement placé, dans la ligne des 16 mètres, sous les caméras de TF1. Du pied droit, l’ancien Premier Ministre a envoyé un véritable boulet de canon dans les cages de Nicolas Sarkozy, qui n’a rien pu faire face à la puissance de ce tir. Le mur, lui, en est resté pantois. Contre toute attente, Villepin a marqué des points, se qualifiant les 1/8ème de finale de cette Coupe de France de la politique.

Jusqu’où ira-t-il ? En quart, en déposant sa candidature au Conseil Constitutionnel ? En demi, en se présentant au 1er tour ? En finale, en se qualifiant pour le second tour ? Peu importe, il rêve de ce soir de mai 2012 où, devant la foule des supporters réunis place de la Concorde (ou ailleurs), il brandira sa Coupe de France. Et en attendant, il se motive, seul, dans les vestiaires. Les ultras sont encore là, même si on se prend parfois à rêver d’un plan Leproux tant le comportement de certains vis-à-vis des médias est indécent.

Moins nombreux, mais comme toujours lorsqu’un club obtient des résultats, les supporters reviennent au stade. Les adhésions devraient donc reprendre ces jours prochains. Notamment si l’équipe se renforce, et s’entoure de bons joueurs… Reste que comme en foot, Villepin devra en effet s’entourer de professionnels, s’il veut rêver plus haut que simplement tenter l’aventure du Petit Poucet. Un frémissement dans les sondages pourrait lui permettre d’espérer. D’autant que tout le monde aime suivre les petits clubs dès lors qu’ils ont un parcours gagnant : éternel mythe de David contre Goliath… Encore faut-il marquer.

Il faudra aussi recruter un bon coach, capable de fédérer l’équipe, et de mener le club à la victoire. Les recrutements à venir après la trêve d’hiver, du directeur de campagne au mandataire financier en passant par le reste de l’effectif et leur positionnement dans l’organigramme, donneront le ton qui permettra d’affiner la stratégie de campagne, et de donner au groupe la confiance pour gagner les matchs à venir.

Se pose alors la question des moyens. Si les signatures manquent aujourd’hui, il serait étonnant que déclaré candidat, il ne parvienne pas à les obtenir. Et il a jusqu’à la date limite de dépôt des candidatures près le Conseil Constitutionnel pour les déposer, en mars. C’est dire s’il a le temps de les récupérer. Le principal souci réside donc dans l’argent. Comment financer une campagne ? Comment obtenir un prêt bancaire sans l’assurance d’atteindre le score de 5% qui seul permet le remboursement des comptes de campagne, faute de disposer de sondages suffisamment hauts ?

Evidemment il y a une autre tactique, loin de l’habituel 4-4-2, utilisée par beaucoup de petits partis.  Il s’agit de faire alors campagne sans dépasser le montant minimal partagé entre tous les candidats à la présidentielle, qui était de l’ordre de 800 000 euros en 2007. Ce montant dépendra du nombre de candidats déposant leur candidature officielle, et du total alloué par décret : deux informations impossibles à connaître maintenant. Un pari.

C’est vers cette stratégie que semble s’orienter Villepin, quand il annonce ce soir ne pas avoir de moyens, compter sur les français pour l’aider, et sur le sens civique des médias. Reste à voir si cette tactique de jeu permettra au Petit Poucet de s’imposer face aux mastodontes, au point de souffler aux deux grands clubs l’éternel clasico UMP-PS, ou s’il s’inclinera lors des tours à venir de cette Coupe de France de la politique. Reste à espérer qu’il ne marquera pas contre son camp… mais qui sait : et s’il marquait le but en or ?

*Papier publié sur Marianne à cette adresse

La campagne par le vide*

En cette fin d’automne, la campagne présidentielle semble geler. Les commentateurs commentent, les politiques s’écharpent, mais sur quelle base ?

Jusqu’ici, peu de candidats ont présenté leur programme, et notamment pas les deux grands candidats que chacun voit –un peu trop tôt- s’affronter au second tour.

D’un côté, l’UMP n’a pas peaufiné le sien, et annonce déjà que le candidat sera libre de l’utiliser partiellement ou totalement. En effet, si le parti majoritaire se réunit régulièrement à l’occasion de conventions thématiques destinées à préparer le programme, il s’agit en réalité de propositions qui seront soumises à Nicolas Sarkozy… qui pourra s’en affranchir. Seule nécessité pour lui, voir sa candidature ratifiée par le Congrès de l’UMP, en vertu de l’article XX des statuts.

Etant entendu qu’il ne s’agit pas d’une investiture. Parce qu’à droite, on aime jouer sur les mots. C’est cet événement qui lancera la campagne, probablement en février… même si le président hésite encore sur la date. La rumeur court même qu’il pourrait se laisser tenter pour faire cette grande fiesta le jour de son anniversaire. Hum… peu crédible : ses conseillers devraient tout de même finir par lui faire remarquer que cela personnaliserait un peu trop la chose, et que son image en sortirait passablement écornée.

De l’autre, le PS a déjà voté un programme… que le candidat a annoncé qu’il modifierait pour tenir compte de la situation économique, qui ne cesse de varier. Le programme voté par en Congrès n’est déjà plus qu’un vieux souvenir, et il y a fort à parier qu’il sera fortement taillé à la serpe. Sans que l’on sache exactement sur quoi. François Hollande a déjà annoncé qu’il présenterait cette version upgradée de ses propositions en janvier. Sans préciser s’il pensait au début, au milieu ou à la fin du mois. Reste que pour l’instant, nada.

D’ici là… et bien tout le monde parle dans le vide. Tous les jours, les politiques s’envoient vannes sur vannes à la figure, que ce soient sur les plateaux télévisés ou dans les hémicycles, en critiquant le programme de leurs adversaires… un programme, qui, donc, n’existe pas encore. Et personne ne le note. D’abord, le petit monde médiatique s’alimente de ces piques de pure politique politicienne, à grands renforts d’émissions prétendument politiques, alors même qu’elles ne sont que politiciennes.

Mais encore pire, les politiques eux-mêmes en viennent à utiliser le temps de débat parlementaire pour se livrer à des attaques sur ces programmes fantômes, pendant les séances de Questions au Gouvernement, bien sûr, mais aussi, pendant les séances d’études des textes. Il n’est en effet plus rare de voir ministres et députés s’invectiver sur les échéances électorales et leurs prétendus aspect programmatiques, le PLF et le PLFSS en ont été le terrain. Dangereuse déviance, qui ne grandit pas le politique.

C’est le temps de la fausse campagne. Des parasites sur les plateaux, qui cherchent la sélection pour le Prix de l’Humour politique et/ou un poste dans un hypothétique futur gouvernement. Reste que tout ceci n’est fondé sur rien. Non, il n’y a pas de programme socialiste à l’heure où j’écris ces lignes, pas plus que de programme de Sarkozy.

Il y a des supputations, beaucoup de mauvaise foi, et des papillons de lumière chargés d’occuper le terrain médiatique par ce dans quoi il excelle : le vide. Et un système politico-médiatique qui s’autonourrit, sous prétexte que la présidentielle est le sujet majeur de 2012, oubliant trop souvent de s’interroger sur l’absence de contenu.

Jusqu’au milieu de l’hiver, et tant que les grands candidats ne seront pas déclarés, il en sera ainsi. Nos journées seront rythmées par les numéros que se livreront ces artistes de cirque : qui un funambule, qui un dresseur d’éléphants, qui un cracheur de feu. Ou comment les politiques et les médias ont ressuscité La Piste aux Etoiles.

*Papier publié sur Marianne à cette adresse