Auberge espagnole

Lundi, il fait froid. Et j’ai rendez-vous avec Leonardo. Pour détendre l’atmosphère, je lui propose de lui faire une blague à la Hoarau. Ca ne le détend pas.

Apparemment, on attend encore un joueur. Dont il faut que je m’occupe demain dès son arrivée. Et pas question d’en parler d’ici là. Sinon, QSI construit une statue de moi crucifiée encore plus haute que le Corcovado de Rio. Avec à l’intérieur, moi empaillée. Fear.

Direction l’entraînement, pour une petite remise en forme des organismes de nos garçons. Aujourd’hui je suis à fond sur Alex, à qui je dois apprendre à communiquer un minimum avec ses partenaires : pas question de prendre des risques sur la défense ! Je me bats un peu avec Néné et Maxwell qui lui parlent en brésilien, quelques insultes fusent. En français, parce que ni Clement ni Ancelotti ne connaissent encore le vocabulaire un peu imagé, ni la traduction qu’en fait Néné en brésilien à Maxwell.

Ce gloubiboulga de franco-italo-portugo-anglais fait marrer Ancelotti, preuve qu’il n’a rien compris. Ceci dit, il se venge tout de même. Après la séance, courte mais intense, le Coach demande à la défense de continuer à travailler la communication en français à l’intérieur. Je récupère donc avec moi le gang des brésiliens –Ceara, Maxwell, Alex-, le serbe Bisevac, les français Sakho, Areola, Le Crom, Douchez, Jallet, Armand, Camara, l’urugayen Lugano, et l’italien Sirigu. J’hésite à leur parler de Marco Polo et de Magellan…

Ceux qui posent le plus de problèmes sont Lugano et Maxwell, avec qui j’échange en italien, et Alex, avec qui je parle anglais. Le reste maîtrise la langue de Molière. Mais pas toujours l’italien, l’anglais, le portugais ou l’espagnol. Et l’ennui, c’est que les nouveaux ont des copains qui parlent leur langue, alors ils ont un peu de mal à se mettre au français. D’où cette fumeuse séance de simulation de défense imposée par le staff.

Jeu de rôle. Sirigu parle à sa défense. « Bouge de là ! » Arf, je lui ai appris un peu trop d’expressions fleuries… Ce qui donne, pour Alex, « Move your ass !» Bon, reprenons les bases : à droite, à gauche, devant, derrière, le marquage… J’en compte quatre qui dorment, dont Armand qui ronfle tellement fort qu’on a du mal à s’entendre. Armand, dormir, pléonasme. Ceara, lui, a bien les yeux mi-clos, mais c’est parce qu’il est en transe. Mamad lui fait des oreilles d’âne. Douchez se réveille en sursaut : « Je l’ai arrêté, je l’ai arrêté ! » Pauvre Nico, ça fait un moment qu’il n’a pas touché une balle autrement que sur sa Game Boy… Peut être qu’un jour on lui dira qu’en fait ce sont les briques de Tétris ?

Ca sent très fort la testostérone. Areola dessine des attributs masculins sur son bloc notes. C’est gamin, mais faut pas lui en vouloir, il est en pleine puberté. Et puis bon, s’il savait écrire, ça se saurait. Lugano me montre discrètement les siens. Je ris. Sirigu est à deux doigts de lui mettre un pain, mais finalement il tape le mur. Je ris encore plus. Verdict : deux doigts de moins pour notre gardien, un trou dans le contreplaqué de la salle. Tout à coup, Ceara brandit un crucifix façon l’Exorciste, et là j’ai peur.

Alerté par le bruit, Ancelotti passe une tête dans la salle, et tout le monde prend sa plus belle pose de premier de la classe, sourire aux lèvres et pouces en l’air façon I Like de Facebook. Pour les Oscars du futchebol, les nominés sont… Mais c’est Alex, manifestement pas encore au courant du QBQ de l’équipe, qui fait la grosse boulette : « Poupette, would you have dinner with me tonight ? I know a nice and intimate place where we can talk easily. Or do anything else. »  Alerte rouge ! Jallet éclate de rire, Ceara refait une prière, Sakho son regard de killer. Euh, je m’en sors comment ?

Les yeux de Sirigu me lancent des éclairs, il semblerait qu’il attende une réaction de ma part. Du moins si je ne veux pas dormir sur le canapé ce soir. Je me lance : « Kind of Brandao ? Last time I’ve checked, just a second ago, I had a boyfriend and he was just in front of you. You should look at that. » Et je roule une énorme pelle à mon mec, bien content que je tacle sauvagement le Tank, qui se prend donc un énorme râteau. Il pleure.

Je lève la séance avant que Sirigu ne se mette à poil, car manifestement, il n’a pas l’intention d’en rester là. Question d’autorité sur sa défense. Bon, on finira dans le sauna alors… ou n’importe où d’ailleurs. On n’est pas bégueules.

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Brest en rade !

©C.Gavelle/PSG

Samedi. Beaucoup trop tôt pour un week-end, rendez-vous est donné pour filer à Brest. Je sens que je vais payer cher ma soirée d’hier…

Il a fallu que je m’occupe d’Alex, installation à l’hôtel et dîner inclus. Vaguement eu l’impression d’avoir eu un cours de Rio de Janeiro English mais bon, c’était sympa. Il a même souri. Dingue.

Pour une fois, j’ai dormi chez moi, histoire de ne pas réveiller Goldorak en rentrant. Du coup ce matin, j’ai encore gagné un tour de RER A. Et aussi bizarre que ça puisse paraître, ça pue autant le week-end que la semaine. Même quand y’a personne dedans. Parfum œuf pourri. Bon appétit, bonjour. Résultat, j’arrive au car avec l’estomac dans l’œsophage, et ça se pourrait bien que cette fois, ce soit moi qui lâche un petit vomito. Max me tend un café. Max, mon amour. Enfin Maxwell, pas le singe. Encore que, je partage bien ma vie avec une version remasterisée de Chewbacca.

Je m’installe au fond du car avec Néné et Jolie Poupée Ménez. Qui est un peu ronchon. Faut le comprendre, il a mal à la cuisse. Moi aussi, mais pas pour les mêmes raisons. Ah ah. La décision de le faire jouer ou pas sera prise cet après-midi. J’aime beaucoup Jérémy, qui est très attachant, mais communiquer avec lui relève de la gageure. Il est tellement Ribéryophile que pour lui un COD n’est pas un complément d’objet direct, mais Call of Duty. Bref….J’enchaîne dans l’avion sur une partie de Fifa 12 avec Néné. Il me bat et danse la samba. Je grogne. Du coup dans l’avion je rejoins Sirigu, c’est moins frustrant.

Brest. Sa rade. Son arsenal militaire. Son stade Francis Le Blé. L’ambiance est… bretonne. Binious inclus. Pour consoler Jolie Poupée Ménez, je lui tends une sucette. Ca le calme, un peu. Sirigu et Bodmer se font des mamours, histoire de se délivrer les dernières consignes d’avant match. Un type derrière moi hurle « Pastore ! » Euh, pour mémoire, il n’est pas là. Une histoire de cuisse, encore. C’est vraiment tendance, la cuisse.

D’emblée, Paris joue vite et compact. Un peu façon purée maison, mais sans la lourdeur des patates. Depuis que j’ai filé des chaussettes taille enfant à Jallet, elles ne lui remontent plus sur les cuisses. Galimeiro, lui, s’offre un grand pont. Matuidi nous fait une faute : à l’aise, Blaise… Et Néné fait l’amour au poteau. Forcément, ça va beaucoup moins bien… Il a mal. Et du sang dans la bouche. Il sort se faire soigner, et Jallet tire le corner. Arrivé de nulle part, Bisevac marque de la cuisse. Décidément le maître mot ces jours-ci. Paris, 1-0.

Les bretons sont verts, et chouinent parce que Zébina était en train de se faire soigner. Oui, comme Néné. Qui d’habitude tire les corners. J’imagine qu’ils ne sont pas bien au courant. Le but engrangé, les boys jouent vite et précis, ça fait plaisir de voir de si belles combinaisons. L’arbitre, aveugle, ne siffle pas la faute sur Matuidi. Du coup Brest se sent pousser des ailes, et tente. Mais Sirigu est dessus. Evidemment. Nan mais. Néné fait un pied de nez à un breton. Pied un peu haut… Ben Bassat frappe. Sirigu bouge à peine : normal, la trajectoire est si loin de son but…

Je danse la samba. Faut bien se réchauffer. Ménez me réclame une autre sucette. Mon dieu, il va prendre 20 grammes… Joli Cul Bodmer manque de frapper. Un brestois s’approche de Sirigu. Je hurle. Je trépigne. Je me roule par terre. Jolie Poupée Ménez trouve que j’en fait trop. Ah bon ? Ca se voit à ce point que même pas tu l’approches ? Rhooo… Jaloux, va !

Galimeiro frappe. Elena, le portier brestois, la capte. Corner. Contre. Momo part à la chasse au brestois. Pendant ce temps, Joli Cul Bodmer cartonne. Placé dans le trio de tête, il se révèle… Et là, c’est le drame. Le boucher Lugano explose Momo au passage. Touché, mais pas coulé… sauf qu’il est considérablement ralenti dans ses déplacements. Fébrile, le banc observe… Néné frappe.

Jolie Poupée Ménez me reprend une chuppa chups. Il est nerveux, je crois. Le Crom est super sage. Il est vachement sympa, mais super sage. C’en est même carrément flippant. Va falloir que je le prenne en charge… Ceci dit, il est heureux d’être avec nous. Je tweete. Javier me répond. Javier tweete ! A distance, on se fait une guerre de celui qui est le plus RT. Il gagne. C’est trop injuste.

Momo ne veut toujours pas sortir alors qu’il a une cuisse en moins. Sa patte traîne sur le terrain, c’est indécent. Je fais signe à Chantôme. Enfin, je lui hurle d’y aller. Paul Clement aimerait bien être armé, à cet instant, et me dégommer. Jolie Poupée Ménez veut rejoindre le banc. Euh non, pas là… Mamad fait une jolie mimine. Sérieux ? Je me mets à hurler en italien. Coup franc logique pour Brest. Je me mets au vaudou. Et le tir n’est pas cadré… et écarté par Mamad. C’est bien, le vaudou…

Je ne tiens plus Jolie Poupée Ménez. Il est chiant en tribune ! Là, il m’arrache le bras. S’il continue comme ça, je lui arrache la crête. Je pense que la France entière m’en remerciera. Bon, on s’ennuie un peu. Le public pousse, mais en même temps pour que Paris soit vraiment en danger, il faudrait que Brest cadre. Et manifestement, ils en sont encore à la leçon sur le hors cadre. Enfin même si ça ne rentre pas, ils ont retrouvé la pêche.

Et d’un coup Brest frappe. Je suis en pleine crise d’apoplexie. Sirigu l’arrête par une magnifique parade. Je suis à genoux. Jolie Poupée me propose de rester comme ça, mais devant lui. Ma réponse le désarçonne : « T’as eu assez de chupa comme ça ».  Brest s’accroche, et retente. Sirigu une fois, Sirigu deux fois pour courir après la balle hors de la cage, Sirigu trois fois pour regagner sa cage à toute vitesse… Et Grougy, toujours hors cadre. Brest met la pression, mais Salvo résiste par une superbe nouvelle parade, les deux poings en avant. Je suis aux anges, je saute en l’air. Qui ne saute pas est un brestois !

Sissoko sort enfin, remplacé par La Menace Chantôme. Et tout à coup, Joli Cul Bodmer nous sort une reprise de volée, qui aurait pu être le but de l’année… hélas sur la transversale. Mais c’était beau ! Le temps pour Lugano de se prendre un pastis et pour Grougy d’envoyer un nouveau spoutnik dans les profondeurs de l’espace, et c’est la mi-temps. 1-0 pour le PSG.

Jolie Poupée Ménez m’emmène au vestiaire. Normalement je n’y vais pas, mais là, je ne résiste pas. Dans le couloir, certains brestois sont déjà à la chasse aux maillots. C’est seulement la mi-temps les mecs !!! C’est très sagement que je me love sur Sirigu, pour écouter les recommandations du Coach et du staff pour la seconde période. Retour dans les tribunes. Sans Jolie Poupée Ménez, qui a voulu rejoindre le banc. Je reste avec Le Crom.

Ca reprend, et Maxwell n’est pas loin de la mettre au fond. Néné également. Bis repetita. Paris aligne les gestes techniques et les passes propres, qui font la différence. Sans parler de Joli Cul Bodmer, qui a manifestement bouffé du lion : ce petit piqué qui aurait pu amener le break est juste magnifique. Bisevac et Maxwell ne sont pas en reste, ça cartonne du côté des latéraux. Puis Galimeiro se prend un coup dans le genou. Il perd un membre, mais il n’y a pas faute. Arbitre breton !

Sirigu touche une balle. Pour lui réchauffer les mains, probablement. Un brestois fait du crochet avec le tibia de Néné. Qui se fait aussitôt accuser de chercher le péno, à base de « Néné enculé ». Néné encore victime de sa réputation… et les paysans ne font pas dans la dentelle. Juste dans le crochet. Baysse tente sa chance… et manque le cadre ! Les bretons ont beau pousser, ça ne veut pas rentrer. Regard de tueur de Mamad.

Joli Cul Bodmer lance Néné par une magnifique talonnade, la frappe est hélas détournée par Elana. Vraiment ce soir, Joli Cul Bodmer nous fait un festival de gestes techniques, je suis aux anges. Et la petite volée de Jallet, dans les bras d’Elana. Ca repart en contre. Tentative bretonne. Je suis en pleine tachycardie. Sirigu l’arrête avec autorité… et quelques hurlements sur sa défense. Oui, il hurle aussi : qui se ressemble s’assemble.

Un breton veut tuer Chantôme, Bodmer fait son artiste, et Néné tue une chance de marquer en oubliant une fois de plus un Kevin plus Galimeiro que jamais… Furieux le Gam’s, il engueule Néné en plein terrain. Jallet décide que viser les buts, c’est pas marrant, et vise le toit de la tribune. Qu’il manque de peu. Un breton s’approche un peu trop de Sirigu. Je pète un câble, mais Sirigu est à la parade pour délivrer une magnifique claquette qui remet tout le monde d’accord.

S’ensuit une jolie main, que l’arbitre ne siffle pas. En revanche, il siffle la faute imaginaire de Bisevac, qui s’énerve… et se prend un pastis. Arbitre breton, arbitre en carton ! Bodmer s’offre une petite bicyclette… Néné, lui, s’amuse. Et le match s’achève sur la victoire de Paris, 1-0. Youhou ! Enfin les vestiaires, avec tout plein de garçons dedans. Le mien tire la langue, je ne peux pas m’empêcher de l’attraper au vol. La langue. Et ce qui lui est accroché.

C’est l’effervescence. Ca sent le mâle ici. Et les chaussettes, aussi. Nettement moins sexy. C’est l’heure du rituel. S’ensuit une partie de foot indoor avec le ballon de Bisevac. Oui, il a gardé le ballon avec lequel il a marqué son but. C’est trop chou. Mais on n’a pas pu s’empêcher de lui piquer. Il pleure. Je tente de dribbler Néné mais Sissoko me tâcle. Joli Cul Bodmer arrive en renfort, me repasse la balle –mais quelle bonne distribution Matt !- et je shoote Douchez qui, galant, fait mine de l’arrêter mais la rate… exprès. C’est mignon.

Pendant que la comm’ gère les interviews d’après match, je bats le rappel des troupes, direction le car. Puis l’avion, pour un vol retour très calme, avant d’enfin rentrer à la casa. Demain repos, reprise lundi après-midi !

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Au camp des Loges… (2)

Jeudi 12 janvier. Il fait beau sur Saint-Germain, le jour idéal pour rejoindre la soixantaine de supporters qui se pressent devant le Camp des Loges. La presse aussi a fait le déplacement en nombre, pour ce premier entraînement ouvert sous l’ère Ancelotti.

Au menu du jour, une séance spécifique pour les gardiens, qui s’entraînent sous nos yeux.

L’occasion de découvrir Ronan Le Crom, engagé pour un essai de deux semaines, et qui sera engagé pour la fin de la saison à l’issue de cette séance, mais aussi Salvatore Sirigu, qui fête aujourd’hui ses 25 ans.

Gilles Bourges commence la séance par un tennis ballon, remporté 5-4 par l’équipe de Salvatore Sirigu. Il enchaîne ensuite par un travail sur les arrêts et les dégagements.

L’entraîneur attend des gardiens une certaine rapidité d’action, et de la précision.

A noter que l’entraînement se fait intégralement en français, et avec un vocabulaire précis que n’a aucun mal à comprendre Salvatore Sirigu, décidément complètement bilingue.

Blaise Matuidi, de son côté, reprend l’entraînement en douceur.

Toujours blessé, le joueur réalise un footing, sous le contrôle de son coach particulier. De l’autre côté du terrain, le groupe est divisé en deux.

Sur un terrain, Carlo Ancelotti dirige une séance et sur l’autre, c’est Paul Clement qui dirige les opérations.

Au menu, travail des oppositions… et des langues ! L’adjoint s’exprime tour à tour en français, en italien et en anglais.

Les parisiens se donnent à fond. Le jeu est intense, rythmé par les coups de sifflets et indications de Paul Clement.

L’entraînement s’achève par des étirements, et un temps de récupération.

A l’issue de la séance, nombreux sont les joueurs à s’arrêter pour rencontrer leurs supporters. Comme toujours, Gameiro est adorable, Bodmer aussi, mais le plus sympathique est incontestablement Néné, qui reste longtemps discuter avec ceux qui ont fait le déplacement.

A moins que ce ne soit Salvatore Sirigu. Timide et étonné face à la ferveur qu’il déclenche, le gentil gardien se plie de bonne grâce aux multiples demandes… tout ému que le public lui souhaite son anniversaire.

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