Au cœur des bleus : Italie 1- France 0

Deux équipes en bleu. La France, et l’Italie. Deux nations en difficulté après la coupe du monde de 2010.

Deux pays qui avaient à cœur de se refaire lors de cet Euro 2012, juste avant le début des qualifications pour la Coupe du Monde de 2014, en septembre prochain.

La France, traumatisée par le syndrome Knysna : les joueurs n’étaient pas descendus du bus pour s’entraîner par solidarité avec Anelka qui avait été viré pour avoir tenu des propos insultants à l’égard de son entraîneur, Raymond Domenech.  L’Italie, marquée par sa sortie de la coupe du monde dès la premier tour, quatre ans après avoir été championne du monde, et une ambiance difficile au sein de l’équipe, sans être toutefois au niveau de Knysna.

Après ces quarts de finale, on peut déjà tirer un bilan du parcours de ces deux nations qui ont marqué l’histoire du football. L’une en sort grandie, l’autre pas. Décryptage.

La France, des bleus au coeur

Des bleus au cœur, voilà ce qu’il reste de l’Euro 2012 de l’Equipe de France. Une victoire sur l’Ukraine, un nul face à l’Angleterre, une défaite face à la Suède et une face à l’Espagne. Pas de quoi pavoiser. Pouvait-on faire mieux ? Peu probable, cet Euro marquant l’échec d’une stratégie qui a consisté à renoncer au jeu, et aux ambitions affichées par Laurent Blanc lorsqu’il a pris son poste.

Individuellement, l’Equipe de France dispose de talents. Mais l’addition d’individualités ne forme pas nécessairement un collectif. De nombreux éléments contribuent l’alchimie nécessaire à faire interagir le groupe sur le terrain. Parmi eux, la technique, certes, mais aussi la gestion humaine et donc, les comportements sur le terrain et hors du terrain. Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette équipe de France a échoué.

Techniquement, difficile de se faire une idée. Peut être faudrait-il déjà avoir compris le projet de jeu et malgré mes efforts, je n’ai toujours rien compris.

Qui doit faire quoi, c’est à peu près clair, mais dans quel but, alors là… Encore faudrait-il que nous ayons une culture de la tactique en France, ce qui n’est pas notre cas. Contrairement à l’Italie ou l’Espagne. Et comme le football français est incapable de se remettre en cause, et le premier à céder au corporatisme si cher à notre bon vieil hexagone, on n’est pas sorti de l’auberge.

Face à la Suède, déjà, l’équipe était passée à côté de son match, récupérant alors la seconde place du classement, synonyme de rencontre avec l’Espagne. A croire que tout s’est arrêté ce soir là.

Certes, on peut passer à côté d’un match. Mais amical, de préférence. A ce niveau de compétition, on évite. Mais bon. L’accident de parcours existe souvent dans les phases éliminatoires – plus rarement par refus de jouer-, et ne présage pas de la suite de la compétition.

Pourtant ce soir là, après la Suède, la France a renoncé. Le staff, en conférence de presse, a déminé le terrain en donnant par avance les éléments de langage expliquant une défaite. Avant même de jouer le match, le ton était donné. Avec toute la mollesse d’un Laurent Blanc, dont on se demande comment il peut parvenir à galvaniser une équipe. Que ce soit en conférence de presse ou en bordure du terrain, on se demande parfois s’il ne tient pas le rôle du plot…

Sur le dernier match, face à l’Espagne, la tactique était plus claire : tout en défense, et si on avait pu, on aurait mis onze gardiens.

Pourquoi pas ? Ca sonne un peu catenaccio mais je crois que bon. Sur un contre, on peut toujours marquer. Mais encore faut-il que la tactique soit bien comprise, et que les joueurs défendent, au lieu de simplement adopter le service minimum.

Ce qui devait arriver arriva : l’équipe a confondu exigence de défendre pour arriver au nul à la mi-temps et jouer avec le frein à main bloqué. Résultat, un but a été encaissé à la 19ème minute –contrecarrant les plans de Laurent Blanc- sur une erreur de repositionnement de Florent Malouda, incapable de se bouger pour marquer Xavi Alonso. Manque d’envie, manque d’ambition, match perdu d’avance dans les esprits…

Le sport est une chose. On retiendra donc Hugo Lloris, Yoann Cabaye, et dans une moindre mesure, le petit retour de Ribéry –il y a eu trop peu de matchs pour en tirer des conclusions- et la bonne entrée de Koscielny mais là encore, sur un seul match, difficile d’en faire une règle.

La défaite aidant, les vieux démons sont ressortis.

Nasri, qui avait fait le malin en adressant un « Ta Gueule » à un journaliste de l’Equipe pour les critiques portées sur lui avant de se muer en Casper lors du match suivant –démontrant alors qu’il était loin de ne pas mériter les critiques-, s’est encore illustré en sortie de match, en répondant de manière très agressive à un journaliste qui tentait, certes maladroitement, de faire son boulot.

Quant à Ménez, il a franchi le mur du con par deux fois sur le terrain : une première fois en se prenant un carton jaune pour avoir insulté l’arbitre italien d’un fleuri « Va Fanculo », dans la langue de Dante histoire d’être bien compris, puis en incitant visuellement son gardien et capitaine Hugo Lloris à fermer sa gueule, pour avoir osé lui demander de se repositionner en défense.

Et ça n’est pas tout. Quand on voit Nasri et Ménez, leur échauffement est quand même révélateur d’un certain état d’esprit. Hatem Ben Arfa parle pendant ½ heure avec son adjoint.

Nasri discute ardemment avec Boghossian pour savoir pourquoi il n’est pas titulaire. Enfin Nasri et Ménez, pendant l’échauffement des titulaires, s’amusent à tirer des boulets à 20 mètres de leurs camarades. A l’évidence, ce groupe n’est pas uni, et incapable d’afficher la moindre solidarité.

Pire que tout, les réactions d’après match. Les uns après les autres, les joueurs comme le staff ont recraché les mêmes éléments de langage : l’Espagne est championne du monde, elle avait la balle, ect…

C’est certainement ce qui explique le mauvais repositionnement de Florent Malouda. Pas un pour admettre que la Roja n’a pas joué son meilleur football, et qu’elle était prenable. Simplement, pas avec des joueurs affichant une mentalité de perdants. Palme de la bêtise pour Karim Benzema : « Nous sortons grandi de cet Euro. » Totalement à côté de la plaque… et finalement emblématique de cet Euro : pile poil dans l’esprit de ces deux défaites…

Enfin pour terminer, ces joueurs, qui ont tant déçu les supporters qui aimeraient tant se réconcilier avec eux, n’ont pas daigné -dans un premier temps et avant qu’on ne les pousse- s’arrêter auprès de la petite trentaine de supporters venus les attendre, sous la pluie, à leur retour en France. Aux dernières nouvelles, ils vont en revanche bien toucher leur primes pour avoir atteint l’objectif fixé de la qualification en quart. 100 000 euros. Tout simplement gerbant.

D’autant que Laurent Blanc s’était fixé des objectifs clairs lorsqu’il a pris en main cette équipe de France :

  • Etre jugé sur les résultats
  • Retenir comme critères essentiels l’état d’esprit, le comportement, l’attachement au maillot. C’est capital. Celui qui pointe des faiblesses, qui ne veut pas l’accepter, il dégage.
  • Aucun joueur n’est indiscutable hormis Hugo Lloris

Deux ans après Knysna, les problèmes de fond persistent au sein de cette équipe de France.

Si les événements ne sont pas comparables –cette fois les joueurs sont descendus du bus et n’ont pas eu de réaction collective inappropriée-, rien n’a changé, parce que Blanc a renoncé aux objectifs et aux principes qu’il s’était lui-même fixé lorsqu’il a pris cette équipe en main.

Aujourd’hui, les fissures entre l’équipe de France et les supporters continuent de s’étendre. Parce que les joueurs n’ont pas respecté le maillot. Qu’on s’entende bien. Il ne s’agit pas d’imposer aux joueurs de chanter l’hymne. D’une part, ça a été très longtemps politisé et du coup, l’hymne n’était pas forcément chanté. Ni en France, ni ailleurs. Nous ne sommes pas aux Etats Unis, mais dans la vieille Europe, qui a été fortement marqué par les nationalismes. Désormais, beaucoup de nations le font.

Doit-on le chanter ? Certes, c’est censé être un moment de communion de la communauté nationale, c’est-à-dire des joueurs avec leurs supporters. Mais n’arrivons pas aux extrémités de la Serbie qui vire les joueurs refusant de le chanter pour raison politique, même si celle-ci n’est pas censé avoir sa place sur le terrain. Sport et politique ont toujours été mêlés, inutile de le nier… même s’il reste difficile d’imaginer qu’un joueur incapable d’aligner trois mots en français correct puisse avoir une pensée politique profonde. Il ne faut peut être pas abuser. Tout ça ressemble plus à du je-m’en-foutisme qu’à une véritable objection de conscience.

Sans aller vers ces tartes à la crème, on peut toutefois noter deux choses : d’une part, il n’y a pas de profonde ferveur pour l’équipe de France dès les premiers tours, on a plutôt tendance à se révéler supporter en demi-finale.

Ensuite, l’hymne n’est pas le marqueur de la fierté de porter le maillot. J’ai grandi avec le foot. Mon premier souvenir de match remonte à Argentina 78. Souvenez vous, l’équipe de France joue en vert et blanc, avec le maillot d’une équipe locale ! Elle ne passe pas le premier tour. Mais quatre ans plus tard, elle est en demi-finale et aurait pu aller plus loin, chacun se souvient du drame de Séville, le 8 juillet 1982. Rebelote quatre ans plus tard, au Mexique.

Cette équipe-là ne chantait pas l’hymne non plus. Mais elle était fière de porter au plus haut et le plus loin possible le maillot.

C’est ça, le respect du maillot. Et pas de dire qu’on a bien joué et qu’on a rempli l’objectif d’aller en quart quand on n’a pas mouillé le maillot. Ce que les supporters attendent de l’équipe, ce sont bien évidemment d’abord des résultats, mais aussi de la fierté. Pouvoir se dire que l’équipe a été au maximum de ses possibilités. Et en cas de défaite pouvoir se dire qu’au moins, on a tout donné sur le terrain.

Dans ce domaine, on ferait bien de s’inspirer de la philosophie de Joachim Löw, le sélectionneur allemand, qui lui aussi a reconstruit une équipe de A à Z. Déterminé à offrir du beau jeu, pour s’imposer durablement, il a affiché un principe simple : si les joueurs ont envie de suivre son projet, qu’ils acquièrent alors la culture du jeu qu’il veut leur inculquer et restent simples, dans le respect de l’autre, alors le public suivra. Car au-delà des titres qu’il entend remporter, Joachim Löw veut laisser des souvenirs ancrés dans la mémoire collective de l’Allemagne, que la Mannschaft gagne ou perde.

Pour cela, on doit user de la sélection. Non, le maillot n’est pas un dû à tel ou tel joueur qui dispose de qualités individuelles. Ca se mérite. Ensuite, le football se joue, jusqu’à preuve du contraire, à onze sur le terrain. Mais aussi avec un banc et un staff. Pour intégrer l’équipe, le joueur doit pouvoir se fondre dans le collectif. Ca n’est pas au collectif de se construire autour de lui. Et ça, tout le monde semble l’avoir oublié, à commencer par les joueurs.

Forcément, depuis qu’ils sont en centre de formation on leur rabâche qu’ils ont du talent ! Mais le talent n’assure pas la cohésion. Au contraire, il peut diviser, lorsque devant le but certains pensent plus à leurs statistiques perso qu’à passer le ballon au joueur le mieux placé. La mentalité, un point à travailler dès le centre de formation. En prenant exemple sur Lille, qui s’était séparé du petit Franck Ribéry, déjà intenable.

Concernant les instances du football, ensuite. Si Laurent Blanc n’a pas atteint ses objectifs, il ne doit pas servir de bouc-émissaire. Le foot français doit se repenser et procéder à une mutation en profondeur. La fédération n’est pas exempte de responsabilité. C’est son boulot que de gérer l’équipe de France. Qu’elle le fasse. Mais plus que tout, que les corporatismes cessent. Ah, dès qu’il s’agit de taper sur le premier étranger qui vient tenter de remettre en cause notre mentalité, tout le monde fait front.

Leonardo en a fait les frais au printemps pour avoir osé, dans une réunion interne, tenté de remettre en cause les pratiques actuelles d’entraînement, dans l’optique de tirer le football français vers le haut. Bronca générale, en mode « mais pour qui il se prend, il arrive dans notre pays et nous critique ». Alors qu’il sera le premier à sauter s’il n’atteint pas ses objectifs. Pas comme d’autres. A un moment, lorsqu’on est 16ème au classement Fifa, il faut bien se remettre un peu en question. De véritables Etats Généraux du Football ne seraient pas de trop. Enfin, si l’on sortait justement de ce corporatisme… On peut toujours rêver.

Sur les clubs, enfin. J’entendais hier Laurent Blanc se plaindre que les autres équipes nationales, comme l’Espagne, l’Allemagne ou l’Italie, peuvent s’appuyer sur une équipe dorsale constituée de leurs fortes équipes, comme le Barça et le Real, le Bayern ou encore la Juve. Certes. On touche là à un autre point, la nécessité pour le football français de se remettre en cause. Mais restons sur les propos de Laurent Blanc. N’est-ce pas lui qui ne s’est pas appuyé sur des clubs tels que Paris ou Lille, qui disposaient pourtant de joueurs sélectionnables ?

N’est-ce pas lui qui n’a pas voulu d’un Sakho -au motif qu’il n’a pas suffisamment joué dans son club, alors qu’il avait pré-sélectionné Gourcuff (qui n’a quasiment pas joué depuis 2 ans) ou retenu Mexès qui cire le banc du Milan AC ? Quand on voit la fiabilité de la charnière, nul doute que Sakho avait sa place. N’est-ce pas lui qui n’a pas voulu de Jallet, très en forme, au motif qu’il n’avait jamais été sélectionné auparavant, alors qu’il avait pré-sélectionné  Yanga M’Biwa ? La mentalité exemplaire d’un Jallet eût pourtant été très utile au sein de ce groupe… On peut aussi citer Mavuba, pour Lille. Et d’autres.

Que Laurent Blanc reste le sélectionneur ou qu’il parte, le constat est clair : l’étoile de notre maillot ne brille plus, il faut changer tout ça. Mais comment ?

Par une profonde mutation des esprits, et l’instauration de quelques règles simples. Sans développer dès maintenant les modifications à apporter dans l’ensemble du football professionnel, arrêtons nous déjà sur quelques pistes de changements à apporter au sein de l’équipe de France.

Et pour cela, ouvrons nous sur l’extérieur, et regardons une autre histoire de bleus pour y trouver quelques idées. Edifiant.

 

L’Italie, le cœur des bleus

Quand Prandelli prend la succession de Lippi en 2010, il hérite d’une équipe qui n’a pas brillé en coupe du monde, et qui s’éloigne des tifosis. Presque à poil.

Le défi est grand, il faut reconstruire, dans un pays qui respire le football. Deux ans après, il a incontestablement gagné son pari.

Armé de ses valeurs, il a mis en place un code éthique pour éviter les problèmes de comportements au sein du groupe. Qu’on se mette d’accord, le code éthique ne concerne que la vie sur le terrain et dans le groupe, et absolument pas ce qui relève de la vie privée.

La meilleure démonstration en est la gestion de Balotelli : lorsqu’il a fauté, il a été écarté de la sélection. Lui gardant sa confiance, Prandelli a sélectionné Balotelli dans les 23, et son comportement ne pose pas problème dans le groupe. La confiance et le dialogue dans la gestion humaine des cas difficiles, voilà la méthode Balotelli.

Entrons dans le système Prandelli. Techniquement, d’abord. Il est investi dans sa mission. Régulièrement en contact avec les clubs, où il se rend, il suit les joueurs. Ce qui lui permet d’éviter en partie l’écueil des sélections nationales qui n’ont que trop rarement leurs joueurs. Il les connaît, les suit, sait s’ils ont besoin d’un coaching personnalisé ou pas.

Avec ce vestiaire bigarré, Prandelli a réussi à monter un groupe. Certes, il dispose de cadres sur lesquels il peut se reposer.

Mais qu’on ne tombe pas dans cette illusion. Buffon a été blessé, Pirlo a eu des hauts et des bas poussant Galliano à s’en séparer, sans parler de De Rossi. A côté de ces cadres, il a aussi des Balzaretti, de Palerme, ou Diamanti, de Bologne. Pas vraiment le top de la série A. Enfin, Prandelli a conservé Cassano, victime d’un grave problème cardiaque fin octobre, et Balotelli, l’enfant terrible.

Le résultat ? Depuis le début de cet Euro, l’Italie surprend tout ceux qui ne l’ont pas vue se reconstruire. Dès son premier match, elle a accroché l’Espagne, obtenant un match nul. Comment ? Regardons les jouer : au-delà du caractère formidable de ce collectif, l’Italie observe toujours son adversaire dans les 20 premières minutes, puis s’adapte. L’Italie a cette capacité, dans le jeu, à s’adapter au style de ses adversaires.

Le match face à l’Angleterre n’a pas dérogé à la règle. Il aura fallu 20 minutes aux Azzurri pour régler les problèmes posés par les anglais dans les couloirs, et les contraindre à jouer dans l’axe. Dès lors, les italiens ont bloqué les ballons. Sans conserver la balle à l’espagnole, ils ont montré une véritable force de récupération en milieu de terrain. Le tout agrémenté d’un Pirlo à la distribution, pour envoyer les ballons vers l’avant et tenter de percer la défense anglaise.

Ensuite, et malgré l’absence de Chiellini, blessé, la défense a assuré : que ce soit dans la charnière, qui a bien protégé les buts de Buffon, ou les latéraux Abate et Balzaretti, qui savent autant se repositionner en défense que monter très haut pour soutenir l’avant, tout le monde a tenu son poste.

Enfin Buffon, sollicité dès les premières minutes de jeu, a été magistral, produisant des arrêts décisifs.

Mais l’Italie version 2012, c’est plus que de la technique : c’est un état d’esprit. De l’hymne national, chanté par les joueurs et tout le staff à fond les ballons, au comportement irréprochable sur le terrain, l’équipe a montré son caractère. Solidaire et unie, la Squadra Azzurra a tout mis sur le rectangle vert : ses tripes, et son cœur. Comment alors ne pas vibrer pour cette équipe ?

Hier, l’Italie a tout connu : les poteaux, la transversale, les immanquables manqués juste devant le but, les arrêts de Hart, … Mais elle n’a jamais lâché.

Mieux encore, elle a toujours été soutenue par son coach. Lorsque Balotelli manque sa première occasion, Prandelli lui glisse : « ça n’est pas grave, tu auras la suivante ». Qu’il n’a pas eue, mais qu’importe : le jeune joueur a persisté à tenter. Comme ses camarades. Personne n’a baissé les bras. Pas même après le but de Nocerino, finalement refusé pour hors jeu. Pas même à cause de la fatigue des prolongations. L’Italie a joué, de bout en bout.

Et s’est montrée vraiment solidaire. Deux exemples avec les explications données après le match par deux cadres de la Squadra Azzura.

Pirlo, troisième à tirer son pénalty – le moment charnière des tirs aux buts-, voit Joe Hart faire le malin dans sa cage. L’Italie compte alors un but de retard, à la suite du pénalty manqué de Montolivo. Expérimenté, Pirlo tente le coup très osé de la Panenka, à la fois pour calmer Joe Hart, et remotiver son équipe.

Et Buffon. Capitaine de l’équipe, il sait qu’il doit arrêter un pénalty pour sauver l’équipe. Ashley Young touche la transversale, les équipes ont donc chacune raté un pénalty. Nocerino a réussi le sien.

Il est désormais vital, pour l’emporter, d’en arrêter un. Conscient, Buffon prend ses responsabilités, et arrête le tir d’Ashley Cole. Derrière, Diamanti réussit son tir au but, et l’Italie est qualifiée.

Ensuite, et ça n’est pas un détail, Cesare Prandelli n’est pas du genre à se chercher des excuses : quel que soit le résultat, il assume. Les échecs comme les victoires. Quant aux joueurs, ils ont l’habitude de répondre à la presse, et de faire face aux critiques. Même lorsqu’il faut répondre à une armada de questions sur le calcioscomesse, le scandale des paris truqués, juste avant la compétition. J’ai bien tendu l’oreille : pas un « Ta Gueule » adressé à la presse… juste des joueurs effectuant parfois des mises au point, mais répondant aux questions dans le calme et avec détermination. Buffon, par exemple.

Sans être non plus toujours exempts de dérapages dans leurs propos dès que l’on sort du cadre du football : on se souvient de la sortie homophobe de Cassano sur l’homosexualité présumée de deux joueurs de la Nazionale.

Sur le terrain, il a aussi fallu l’intervention de Bonucci pour empêcher Balotelli de faire une Nasri après son formidable retourné placé au fond des filets, face à l’Irlande.  Reste que si Cassano et Balotelli sont deux cas difficiles à gérer, la gestion humaine de Prandelli aura permis de ne pas mettre en danger l’équilibre du groupe et de limiter ce type de débordements.

L’Italie a su se construire un collectif. Un groupe soudé, qui travaille dans une bonne ambiance malgré les caractères parfois difficiles de certains, dans une alchimie pas si évidente à trouver entre de très jeunes joueurs inexpérimentés et des cadres confirmés dont certains ont tout gagné – quatre champions du monde dans le groupe- pour afficher une véritable unité, y compris avec le banc, loin des préoccupations individualistes, dans l’objectif unique de gagner : en jouant avec le coeur.

La Squadra Azzurra, minée par des soucis d’ambiance en 2010, a retrouvé son âme.  Droit au coeur des tifosis, que la Squadra Azzurra sait soigner . Que ce soit individuellement, avec un Buffon qui galvanise les supporters via sa page Facebook, un modèle du genre, ou collectivement, à travers les séances d’entraînement en public ou les rencontres avec les joueurs.

Cerise sur le gâteau : les italiens ont décidé, par solidarité avec le peuple italien très touché par la crise, de ne pas toucher de primes : la fédération a donc décidé de les reverser aux victimes du tremblement de terre qui a touché l’Emilie Romagne juste avant la compétition. Une histoire de cœur…

Quoi qu’il arrive maintenant, l’Italie a déjà gagné son Euro. Parce que désormais, qu’elle gagne ou qu’elle perde, le défi a été remporté : cette équipe s’est reconstruite, et a su se transcender pour jouer avec le coeur.

Ce petit supplément d’âme qui fait la fierté des tifosi. Et au-delà de l’Euro, elle est sur les bons rails pour poursuivre ce travail en vue de la Coupe du Monde de 2014. Prandelli a réussi son pari. Reste maintenant à terminer cet Euro au plus haut… et à reconquérir des titres, jusqu’à accrocher, dans l’avenir, une cinquième étoile sur le maillot.

Coupe de la Ligue : Paris finit en fondue bourguignonne*

Pour son quatrième match en dix jours, après Ajaccio en championnat, Bratislava en Europa League, et Dijon en championnat, Paris rencontrait pour ce huitième de finale de Coupe de la Ligue… Dijon. Cette fois en terre bourguignonne. Un vrai match retour. Inutile de vous préciser que les joueurs de Patrice Carteron n’entendaient pas faire de la figuration. Et Dijon, c’est le bonheur pour une fille, y’a de la place pour la métaphore culinaire…

17h. Les joueurs entrent sur la pelouse sur la musique de Star Wars. C’est qu’ils ont de l’humour les dijonnais, à sa voir comme les rebelles venus défier l’Empire parisien. Serait-ce un signe ? Sur le banc parisien, chacun sait bien que la partie n’est pas gagnée. Pastore est là, mais dans les tribunes, mis au repos. Bodmer et Armand reviennent de blessure, tout comme Sakho qui n’a repris le chemin du stade que récemment. Enfin Chantôme, Hoarau, Matuidi et Bisevac sont toujours à l’infirmerie.

C’est dire si l’effectif parisien est réduit. Conséquence, beaucoup de joueurs ne jouent pas à leur poste habituel. Tout ceci modifie complètement l’organisation parisienne.

C’est aussi, du coup, l’occasion pour Erding de revenir dans la lumière, et pour le petit Bahebeck de montrer le bout de son nez. Mais Paris a l’envie, et se met d’emblée dans le match, avec un jeu très offensif.

Dès la 6’, Erding tente sa chance, mais joue vraiment de malchance : la balle trouve le gardien puis le poteau ! Menez se montre un peu, l’occasion de constater qu’il a légèrement tondu le renard mort qu’il s’évertue à porter sur sa tête. Dijon n’est pas en reste et profite de l’inattention de Camara, mais Sakho est là. Heureusement… Et le jeu dijonnais n’est pas suffisamment fort au milieu pour lutter.

Menez reprend la balle assez facilement, pendant que les troupes dijonnaise digèrent leur abus de mayonnaise. Dans le stade, un supporter parisien se met tout seul à chanter l’hymne : « Allez Paris Saint-Germain » ! A la 15’, une vilaine faute sur Menez permet d’obtenir un joli coup franc. Reprise de Bahebeck, petit enveloppé du droit et but !  Le jeune joueur de 18 ans permet au PSG de mener au score. 1-0 pour Paris.

Dijon se reprend, Jovial centre pour Mandanne qui rate sa tête et envoie sa pastèque loin, loin, loin dans la galaxie. Erding fait une percée dans la surface, mais Jallet rate son tir sur la passe pourtant magnifique d’Erding. Groumpf. Ceci dit, Erding, décidemment très en forme, rate sa reprise sur la passe de Menez mais la met au fond. On n’en est qu’à la 22’, et déjà 2-0 pour Paris. Ca commence à sentir bon !

Camara célèbre ce but par une faute sur Jovial qui lui, ne doit pas être à la fête. Faute de cadrer son tir, Dijon n’inquiète pas Douchez. Mais attention, le dijonnais est comme les tâches de moutarde, tenace. Cette jeune équipe est très combattive, et entend bien se battre jusqu’au bout. Donc elle tente. Autant qu’elle peut. Bahebeck adresse la réponse du berger à la bergère, tente, et se foire aussi. Mais bon. Jallet veut effacer l’affront et lance une belle frappe. Dans les bras du portier Moutarde, très bon au cours de ce match.

Et puis c’est le drame. A la 30’, Lugano accroche un peu le maillot de Jovial, qui se jette un peu n’importe comment, et c’est le péno. Diego, tu fais biiiip ! Sankharé le tire, Douchez est battu. Paris 2 – Dijon 1.

Le match est relancé. A noter qu’en une demi-heure, on enregistre déjà 3 buts. On ne rigole pas avec la Coupe Moustache, ici ça n’est pas la Ligue 1 !

Bodmer, de retour de sa déchirure, entend bien faire remarquer sa faim de but. Il frappe mais trouve sur son chemin le gardien Moutarde, décidément très sollicité depuis ce début de match. Armand, qui joue en milieu défensif, a conservé ses mauvaises habitudes de défenseur, et commet une faute qui vaut un coup franc. Lugano étant aux fraises, Bérenguer n’a aucun mal à planter sa frappe croisée au fond de la cage de Douchez, pas aidé par sa défense. A la 34’, on en est déjà à quatre buts : Paris 2 – Dijon 2.

Et tout ce petit monde n’est pas fatigué : ça joue ! Saluons au passage Dijon, remonté à la force du mental. D’ailleurs, les bourguignons commencent à se lâcher.

Joli Cul Bodmer est écarté par un coup de fesse d’un dijonnais. Pendant ce temps, le Coach Carteron hurle… Menez tente sa chance et frappe juste au dessus de la transversale. A croire que le PSG a la guigne. Et le jeu manque franchement de précision : trop de ballons sont perdus… Bodmer, quant à lui, fait une jolie percée mais tarde trop à passer la balle. Toujours la même chose…

Tout ça commence tout de même à me rappeler furieusement le match de l’an dernier contre Montpellier. Paris menait 2-0, et s’est fait remonter, pour terminer sur un match nul 2-2. Et là, vu les trous d’air qu’on affiche en défense, et la sieste collective à l’avant, ça pourrait être pire. Fear. Heureusement, l’arbitre siffle la fin de première période. A ce stade, je prie déjà Saint Antoine Kombouaré de modifier la compo de l’équipe, pour faire entrer Néné et Gameiro. Parce qu’à la mi-temps, c’est bien du côté de Dijon que la mayonnaise prend !

A la reprise, les mêmes joueurs entrent sur le terrain. Y compris Lugano. Il faut dire que Kombouaré n’a pas beaucoup de solution de rechange en défense…

J’envisage sérieusement d’appeler SOS Cardiologie pour prendre une bonne dose de bêtabloquants pour survivre aux 45 minutes qui suivent. Jallet tente de s’illustrer par une jolie reprise, de nouveau écartée par ce décidément bon portier Moutarde, qui s’appelle Tchagouni dans la vraie vie. Rendons à César…

Néné et Gameiro sont enfin à l’échauffement, mes nerfs se relâchent. Pendant ce temps, une nouvelle frappe dijonnaise part explorer la galaxie. Sonde ou ballon ? Reste que cette équipe est fichtrement offensive, et défend bien son steack moutarde !  50’ tout rond, c’est une bien belle heure pour l’apéro. Du moins au goût de Lugano, qui file direct au bar en se prenant un pastis pour un vilain coup de coude sur un dijonnais. Diego, tu fais vraiment biiiip ! Enfin vu les fautes commises et le péno concédé en première période, on s’étonne presque qu’il n’en soit qu’à un carton jaune.

Mes prières à Saint Antoine Kombouaré se font plus intenses mais manifestement, je ne suis pas encore tout à fait au point question télépathie. Paris obtient un corner, frappé par Joli Cul Bodmer, suivi d’une frappe de Bahebeck, stoppée par Tchagouni. Sur la pelouse, la moutarde commence à monter au nez, des deux côtés, et Menez se prend un pastis pour avoir un peu trop exprimé sa frustration. A ce stade, le PSG se trouve en difficulté. Et ne doit qu’au manque de cadrage de Dijon de tenir pour l’instant le score nul. En d’autres termes, ça sent le roussi.

A la 58’, Jolie Poupée Menez se reprend, mais une fois de plus, a la poisse : il croise un peu trop son tir, qui échoue au ras du poteau… Tout ceci va finir en potence !

Bon Malouda laisse traîner son pied mais évidemment, ça n’est pas sifflé. C’est Lesly, le petit frère de Florent –oui Lesly peut aussi être un prénom de mec, certainement un hommage à l’acteur Lesly Nielsen, de Y’a-t-il un pilote dans l’avion– et donc pas Lugano. Inutile, donc, de sanctionner. Lugano qui, d’ailleurs, défend très bien à la 60’. Si, si…

Mais une minute plus tard, c’est de nouveau le drame pour Paris. En pleine action dans la surface, le ballon atterrit malheureusement sur le bras de Camara, et la main est sévèrement sifflée. Sévèrement, parce qu’on voit nettement au replay Camara mettre son bras en arrière alors qu’il est encore en l’air. Que pouvait-il faire de plus ? Mettre son slip de Superman, voler sur le côté, choper une scie, et se couper le bras ???

Bref, main dans la surface ça vaut un péno, mais franchement là… Y’a pas main. Y’a au mieux bras, et bras mis en arrière. Donc intention de ne pas faire faute. Sachant qu’il était encore dans son saut et ne pouvait donc se déplacer. Bref… Jovial transforme le péno. Paris 2 – Dijon 3. Le match bascule.

Mais le PSG se bat. Hélas, à la 65’, Paris est malheureux, Paris est tout poisseux sur cette frappe de Bahebeck, qui fait une magnifique golden barre… Ensuite, le match s’envenime, et des deux côtés, les joueurs commencent à perdre leurs nerfs. D’abord Joli Cul Bodmer, qui manque de zénitude et se prend un carton. Allez hop au bar pour sa ration de pastis ! Pendant ce temps, je fulmine en entendant le commentateur de France 2 parler de fatigue du PSG en évoquant le match d’Europa League face à Bratislava où les parisiens avaient terminé à 9. Euh, ca n’étaient juste pas les mêmes joueurs, l’effectif a tourné !

A la 69’, Saint Antoine Kombouaré fait enfin entrer Néné à la place de Bodmer, et Gameiro pour remplacer Erding. Que le public immonde de Dijon siffle allègrement. Y’a du Footix sauce moutarde plein le stade…

Et là, Paris se déchaine, et se lance dans un déferlement de frappes sur la cage de Dijon. Menez se lance dans un show incroyable, dribble, donne en retrait à Gameiro… qui loupe sa tête à deux mètres du but et nous offre une seconde golden barre. Quand ça veut pas…

La cage dijonnaise défend comme elle peut sous le feu parisien. C’est de la folie, Paris résiste ! Dijon devient franchement mauvais, d’ailleurs. Menez dribble de nouveau toute la défense mais se prend la jambe droite dans la jambe gauche, et se rate. Jolie figure, toutefois. Pendant ce temps, y’a de la moutarde partout sur la pelouse, Malouda est resté au sol. Il sort dans la foulée.

Jovial tente la balle de 4-2 mais la rate. Heureusement que Dijon n’est pas au top pour cadrer ses frappes, sinon le tableau d’affichage en aurait pris un coup. Côté parisien, Jolie Poupée Menez joue trop perso. Comme d’hab.

Ca devient franchement usant, ce manque de collectif. La tension est vive sur la pelouse, et l’arbitre sanctionne enfin Mandanne pour ses multiples fautes. Le dijonnais rejoint ainsi Menez, Lugano et Bodmer au bar pour un petit jaune. Ca n’empêche pas Mandanne de mettre une mandale à Ceara. En même temps Mandanne qui met une mandale, phonétiquement on n’est pas loin. Ceci expliquant sûrement cela.

La caméra de France 2 s’arrête sur les tribunes et la mine déconfite de Javier Pastore, tout triste. Hum, je veux bien consoler El Flaco, moi… Néné tente une jolie frappe enroulée mais une fois de plus, le Portier Moutarde veille. Une fois de plus, très beau match pour Tchangouni, le gardien dijonnais. Ca fighte un peu entre Ménez et Mandanne, là franchement je rêve du rouge, mais bon. Néné tente une dernière frappe directe alors qu’il aurait pu passer en retrait, et c’est terminé. Bravo à Dijon pour sa ténacité qui lui a permis de remonter et de l’emporter 3-2, prenant ainsi sa revanche de dimanche dernier face au PSG.

Paris quitte ainsi la Coupe de la Ligue, tout comme Rennes et Montpellier, qui se sont également inclinés lors de ce huitième de finale.

Le PSG devra encore travailler le collectif, pour évacuer cette vermine de jeu personnel, calmer Lugano qui a pris 4 cartons en 5 matchs, et parvenir à mieux construire son jeu. Car si le plan technique Paris brille, et notamment du côté des dribbles et des tirs cadrés, il faut encore parvenir à se trouver, notamment à servir Gameiro en pointe.

Un jeu à mettre en pratique dès samedi face à Caen, puis jeudi face à Bratislava et le dimanche suivant à Bordeaux. Histoire de confirmer le statut de leader des parisiens, au-delà de la Ligue 1.

*Article également publié sur Carnet Sport à cette adresse