Politique et internet : et les blogueurs dans tout ça ?

Participer au petit-déjeuner Politique et Internet : Je t’aime, moi non plus ? proposé par APCO Worldwide et La Revue Parlementaire était intéressant.

Chacun a pu gloser sur la place de la politique sur internet, et de la place d’internet dans la politique. En substance. Naturellement, l’échange ayant duré deux heures, nous n’avons pas pu passer la journée dessus. Subsistent donc quelques questions, auxquelles j’ai déjà pu, en tant que blogueuse, me heurter.

Pour l’instant, les politiques s’interrogent sur la manière d’intégrer internet dans leur campagne, mais sont encore dans le mythe du contrôle. Aussi, ils n’imaginent internet que comme un outil dont ils pourraient faire ce qu’ils voudraient. Et réfléchissent en terme d’applications appropriées. Dans cette optique, Internet est vécu comme un progrès. Mais dès que vous passez à l’internet comme média et source de points de vue, il n’y a plus personne. Internet est encore trop considéré comme un simple outil de propagande.

Et je sais de quoi je parle. Blogueuse, je cherche depuis quelques temps à me faire connaître des staffs de campagne des uns et des autres, pour couvrir leurs événements dans le cadre de la présidentielle. Et bien… Rien. Si j’ai pu réaliser un gros dossier sur la primaire, c’est grâce aux retransmissions télévisées. Seule exception notable, le PS local, qui lui, était ravi de disposer de ma couverture de l’événement. Sans rien me demander en retour, et surtout pas un papier favorable.

Du côté des états majors, en revanche, c’est plus compliqué. Si le staff d’Hollande m’avait permis l’accès à un de ses meetings –mon dos m’a finalement empêchée de m’y rendre- le PS national ne m’a pas accordé d’accréditation pour sa convention d’investiture. Autant je veux bien croire l’argument du manque de place, autant qu’ils ajoutent dans leur mail de réponse « dans nos locaux » alors que la convention se tient à la Halle Freyssinet –et non à Solférino- me laisse perplexe. Comment vous dire que je n’y ai pas vraiment cru ?

Quel est le problème ? J’avoue ne pas le savoir. D’autant que personne n’a cherché à tester mon influence, aussi l’on ne peut argumenter sur un potentiel manque de visibilité. Je me souviens juste qu’en 2007, il avait été bien plus simple d’être accréditée par l’équipe de Bayrou, y compris en fin de campagne, et ce sans avoir à montrer une quelconque appartenance à la génération Orange. Cette équipe avait tout simplement compris qu’il nous est plus simple de disposer une table où brancher notre matériel, et de disposer des discours remis à la presse pour traiter plus rapidement l’événement. Et donc, s’en faire l’écho au rythme 2.0.

J’espère que ces prochaines semaines, les différents partis sauront traiter ces demandes sans parti pris -ah ah-, et faire de la place au-delà des blogueurs « maison ». Faute de quoi, internet perdra de son intérêt, et la campagne sur le web avec, faute de disposer d’un regard différent, venu non point des appareils, mais de la simple populace. Politique et internet, Je t’aime, moi non plus ? C’était bien la bonne question à poser.

Primaire PS : Tribord perd la boussole !

La primaire du PS a donné le mal de mer à la droite. Pourtant, le processus était connu depuis longtemps. Il y a même eu un avant goût en 2007 avec la primaire interne du PS.

Et contrairement à ce que l’on voudrait nous laisser penser, il y avait pourtant bien eu à l’époque trois débats télévisés –mais aucun en hertzien-, pour cette primaire qui se jouait à un tour. La seule vraie différence, c’est que la primaire de 2006 était interne au PS, et non ouverte à tous les citoyens. Il semblerait que cela gêne un peu à tribord…

L’UMP est tellement obnubilée par la primaire qu’elle organise ce mardi une convention… sur la primaire. En 2007, les conventions du parti majoritaire servaient à préparer le projet, en abordant tour à tour les grands thèmes de la présidentielle. Pour la présidentielles de 2012, j’avoue avoir du mal à suivre. Soit la primaire du PS est un enjeu de société, qui justifie qu’on fasse des propositions sur ce thème aux Français, et dans ce cas la convention de l’UMP se justifie. Soit le parti majoritaire tente de se donner un peu de consistance face à ce succès populaire, et de délivrer massivement des éléments de langage à ces militants.

Pourquoi pas, mais on n’est alors plus dans la construction du projet. Dernière possibilité, l’UMP organise cette convention pour se positionner par rapport à la primaire, ce qui serait alors un peu court. D’une part, parce que le projet du PS existe depuis un moment et que sa version post-primaire, modifiée par le candidat, ne sortira pas d’ici mardi. D’autre part, parce qu’en tant que Fille de Droite, je trouverais un peu limité de se cantonner à répondre au PS dans le projet de l’UMP : cela relèverait d’un vrai manque d’ambition pour la France, et surtout, d’une absence totale d’idées. Voilà pourquoi je ne comprends pas bien la tenue de cette convention, au-delà d’un aspect thérapie de groupe qu’il me paraît pathétique d’ultra médiatiser.

Ce matin, Copé en remet une couche dans ce n’importe quoi généralisé à tribord. Sur I-télé, il explique que le ralliement de Montebourg à Hollande montre l’incapacité à tenir une ligne à gauche. Hum hum… Donc si je suis bien monsieur Copé, l’UMP n’est pas plus crédible, en allant du centre droit à la droite populaire, en passant par exemple par monsieur Vanneste qui rappelons-le, tient régulièrement son lot de propos homophobes. Si Hollande ne peut rassembler la gauche, tout pareil pour Sarkozy. Ou comment Copé assume avec convictions des propos qui plombe autant sa famille politique. LOL.

Sans parler des divergences sur l’organisation même d’une primaire. D’un côté Fillon, Accoyer, et même mon pote Aymeric s’y étaient déclarés plutôt favorables, conscients que le succès de la primaire citoyenne comme la modernité de ce mode de désignation posent question à droite.  Et je partage, en tant que Fille de Droite, totalement cette vision. De l’autre, Sarkozy a vertement tancé ce procédé. C’est dire si la primaire met Tribord en panique : les vents contraires agitent le Titanic, qui se débat en pleine cacophonie avec des morceaux de Xababa (ndlr Xavier Bertrand), Eric Raoult ou encore Morano au milieu, qui éclaboussent dans tous les sens… et souvent non-sens d’ailleurs. Dur, dur d’être de droite, par les temps qui courent…

La droite qui, d’ailleurs, s’est déjà essayée à l’exercice en interne. Si certains aiment donner l’exemple des déchirements consécutifs à la primaire de l’UMP pour la municipale à Paris, ils oublient que le système même de la primaire a existé pour la présidentielle, en 2006, à l’initiative… de Nicolas Sarkozy. Eh oui, rendons à César…

Si ce fut un fiasco, c’est uniquement parce que les barons de la droite ont baissé leur culotte, n’osant pas affronter celui qui était alors président de l’UMP. Il faut dire que les scrutins internes organisés par la même équipe –méthodes bolchéviques, menaces et bourrage des urnes électroniques inclus- avait de quoi refroidir les ardeurs. Reste que les statuts prévoient les primaires. Tellement qu’après l’élection de Sarko, il a fallu les modifier fissa pour prévoir qu’il n’ait pas à s’y soumettre cette année, sous prétexte qu’il serait le candidat naturel. J’y reviendrai.

Du coup, la prise de position présidentielle nous expliquant « La Ve République ne peut être l’otage des partis politiques et le candidat (à la présidentielle, ndlr) pris en otage par son parti. Le général de Gaulle a voulu une élection à deux tours, pas à quatre tours », c’est, euh, comment dire… Soit Nicolas Sarkozy pense réellement ce qu’il dit, et affirme donc ne pas avoir lui-même respecté l’esprit des institutions de la Vème en 2006, et donc ne pas être le gaulliste qu’il prétend être. L’ancien ministre du budget Alain Lambert ne s’est d’ailleurs pas gêné pour le lui rappeler, et demander à ce qu’on laisse le Général en paix (voir le tweet ci-dessous).

Car le Général n’a jamais prétendu être contre la primaire : la question ne s’est jamais posée, et je défie qui que ce soit de trouver une phrase de Charles de Gaulle sur ce sujet. En effet, contrairement à ce que certains voudraient bien faire croire, les primaires, en étant citoyennes, reflètent bel et bien la rencontre entre un homme et un peuple, au-delà des partis : c’est justement en sortant du cadre interne qu’elles deviennent gaullistes ! Et elles ne favorisent en rien le bipartisme : il y a bien eu plusieurs primaires à gauche, pour désigner les candidats qui porteront les couleurs des partis concernés !

Enfin, Nicolas Sarkozy affirmait, dans son discours d’investiture en tant que président de l’UMP le 28 novembre 2004 : « Vous, adhérents, je veux que vous soyez maîtres de votre destin. Les grandes décisions politiques du mouvement nous les prendrons ensemble. Pour cela, je ne connais qu’une seule formule : celle du vote démocratique, ouvert à tous ». Soit Nicolas Sarkozy estime que le choix du candidat n’est pas une grande décision politique. Soit il fait preuve d’une mémoire sélective qui frise la mauvaise foi. C’est ballot.

Une fois de plus, Nicolas Sarkozy semble ne pas sentir le vent nouveau qui a soufflé sur la vie politique ces dernières semaines. Car il ne s’agit plus, cette fois, de politique politicienne ou même partisane : cette primaire était proposée à tous les citoyens se reconnaissant dans des valeurs de gauche –en réalité républicaines, comme je l’ai déjà expliqué– et donc complètement en dehors de l’appareil. Car si le vote a été organisé par le PS, il suffisait d’aller dans les bureaux de vote pour constater qu’il était calqué sur n’importe quel scrutin organisé par l’Etat.

En ce sens, le président n’a pas compris que quelque chose, dans le rapport entre le peuple et la politique, avait changé. Comme si depuis qu’il est reclus à l’Elysée, il avait perdu la connexion avec le peuple français. C’est ennuyeux pour un candidat naturel de ne plus sentir la tendance… Sarko aurait-il perdu son mojo ?

Il est évidemment trop tôt pour le dire, mais certains rats quittent déjà  le navire, fuyant la présidentielle. Le Premier Ministre lui-même, François Fillon, semble avoir zappé l’étape avril-mai, pour se consacrer à Paris… pour la municipale de 2014. Son plan épargne retraite à lui qu’il a. Sur Twitter, un militant de droite me disait hier qu’il n’y avait aucune surprise à préparer les législatives de juin dès maintenant. Euh, en tant que Premier Ministre, si. Soit il pense que la droite va l’emporter en mai prochain, et donc qu’il bénéficiera d’un élan favorable. Soit il pense que l’UMP va méchamment se rétamer, et qu’il faut partir en campagne le plus tôt possible.

Et qu’on ne me dise pas qu’il doit s’implanter localement : il vise la 2ème circonscription de Paris, celle qui inclut une partie du 6ème et du 7ème arrondissement –où même mon chien serait élu s’il portait un collier UMP (qu’il ne portera jamais hein)- et en plus, la plupart des délégués de circonscription parisiens sont pro Fillon. D’ancien P9 -pour Point 9, autrement dit de France.9, le club de Fillon- qui lui ont bien préparé le terrain. Autant dire que si François Fillon annonce dès maintenant son parachutage, c’est qu’il n’est pas über optimiste sur le fait de bénéficier de la dynamique de la présidentielle ! Ca doit être le sens de l’expression Courage, Fillon !

De là à dire qu’une large partie de la droite fait l’impasse sur les scrutins d’avril et mai, il n’y a qu’un pas. C’est à mon sens, l’explication du retrait de Borloo. Oh, il y a certainement des raisons occultes à chercher du côté d’éventuelles casseroles dissuasives, mais à mon avis, au-delà des rumeurs, Borloo a certainement étudié précisément l’état de la droite… et constaté qu’il n’avait aucun intérêt à se lancer dans une campagne de premier tour qui le ferait apparaître comme le diviseur. L’intérêt de tout le monde réside en effet dans le concept suivant : soutenir Sarko pour mieux le laisser se planter… tout seul.

Evidemment, c’est un pari risqué. Mais si Sarko se plante, c’est payant pour tout le monde. Personne ne sera le-vilain-salaud-qui-ne-l’a-pas-soutenu-et-qui-a-fait-perdre-des-voix, et donc chacun pourra tenter sa chance à la loterie suivante, à savoir la reconstruction de la droite. Avec en option, la disparition du sarkozysme des écrans radars pendant quelques temps… car ce sera bien ce courant qui sera responsable en cas de défaite. D’autant qu’en cas de reconstruction, la droite optera probablement pour des options radicalement différentes que sous le sarkozysme : les courants devraient donc, logiquement, retrouver voix au chapitre.

Je dis bien retrouver. Si les militants actuels de l’UMP sont arrivés sous Sarkozy, et ne connaissent donc pas l’histoire de leur propre parti, je rappelle que l’instauration de courants au sein de l’UMP a été votée par le conseil national le 9 mai 2004. Je suis bien placée pour le savoir : non seulement j’y étais, mais j’ai voté des deux mains et des deux pieds la motion Juppé, qui les proposaient. Pour qu’ils existent, il fallait simplement ratifier cette proposition par un vote du congrès. Ce que Sarko s’est toujours refusé à faire. Qui fut le président de l’UMP le plus moderne ? Juppé !

Quand on sait qu’aujourd’hui l’homme est plébiscité pour représenter la droite à l’élection présidentielle en lieu et place de Sarkozy –par les militants, mais également, par des élus !- on peut en tout cas s’interroger sur la notion de candidat naturel revendiquée par la droite aujourd’hui. Autant je pense, comme beaucoup, qu’un président qui se représente doit se porter candidat pour assurer la continuité de la politique de son camp, autant il se trouve que cette année, j’estime que la droite –dont je suis, je le rappelle- dispose d’un meilleur candidat. Non seulement parce que l’actuel président ne parvient pas à réunir son camp, mais aussi et surtout parce qu’il a désacralisé la fonction et atteint aux valeurs républicaines, ce qui ne lui donne plus la pole position pour les porter.

Et ne nous leurrons pas : même s’il venait à l’emporter en mai prochain –Sarko étant aussi mauvais président qu’il est bon candidat, rien n’est perdu pour lui, et le résultat final dépendra tant de sa stratégie que de la capacité de la gauche à y faire face- il sera de toutes façons en position de faiblesse dès juin. Une fois les législatives passées, Sarko perdra en influence, parce qu’il ne pourra plus se représenter.

La droite sera déjà dans une autre logique : sa reconstruction. Et soyons honnêtes : on ne peut se reconstruire que sur un échec. Aussi, pour tourner enfin la page du sarkozysme qui la détruit de l’intérieur, et se purger des tentations frontistes comme des méthodes nauséabondes qui ont émaillées son fonctionnement depuis fin 2004, la droite a intérêt à l’alternance dès 2012. Reste à savoir quelle proportion de la droite votera pour son candidat, quelle autre pratiquera l’abstention, et enfin laquelle se laissera ainsi séduire par l’humour corrézien…

Les Fauves

Ce dimanche, France 2 diffusait enfin, après une première déprogrammation en mai, Les Fauves, le documentaire de Patrick Rothman consacré aux relations entre Nicolas Sarkozy et Dominique de Villepin.

Les deux hommes se connaissent depuis longtemps. Leur rencontre comme leur affrontement date de la campagne de 1993. Nicolas Sarkozy, alors membre du premier cercle de Jacques Chirac, dirigeait la cellule présidentielle de celui-ci depuis le printemps lorsqu’à l’automne, il décida de rejoindre le staff d’Edouard Balladur…

D’ailleurs tout le monde confirme dans ce documentaire le rôle prépondérant que tenait Nicolas Sarkozy dans cette campagne : cela aura probablement intéressé aussi le juge Van Ruymbeke ! Mais revenons à nos moutons, et au choix que fait alors le ministre du Budget en soutenant le Premier Ministre Balladur : une véritable trahison de la part de celui qui était si proche de Jacques Chirac. Qui déclenche l’arrivée dans le dispositif chiraquien de Villepin, alors directeur de cabinet d’Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères et meilleur d’entre nous.

L’affrontement de deux candidats à travers ces deux hommes. Tout au long de leurs carrières respectives, ils ne feront que se recroiser, se jauger, se juger…  sans jamais vraiment se détacher de cette campagne de 1995, véritable déchirure de la droite qui n’est pas encore totalement soignée. A partir d’images d’archives et de témoignages de politiques – François Baroin, Xavier Darcos, Jean-François Copé, Michèle Alliot-Marie, Jean-Pierre Raffarin-, Les Fauves retrace cette époque où se trouvent les racines du mal qui ronge encore la droite aujourd’hui : la guerre n’a jamais vraiment cessé entre balladuriens-sarkozystes et chiraquiens.

Ce documentaire n’apprendra rien à ceux qui ont vécu cette histoire, aucune information ne vienant s’ajouter aux faits déjà connus. Cependant, ceux qui n’appartiennent pas à l’un ou l’autre des états majors en apprendront beaucoup sur ces vingt dernières années de vie politique à droite. Et notamment sur le véritable caractère de Nicolas Sarkozy, homme politique brillant mais horriblement teigneux et revanchard… et qui trahit par deux fois : en 1993, en rejoignant Balladur, et en 2006, en sabotant le CPE de Villepin en allant négocier avec Bruno Julliard, président du syndicat étudiant UNEF.

Véritable négatif de La Conquête, le film sorti en mai qui évoque l’ascension de Nicolas Sarkozy sous un angle plutôt positif, Les Fauves ne passe rien à l’actuel locataire de l’Elysée… qui apparaît tel qu’il est : calculateur, et plein de rancœur. Là où au contraire, Villepin est apte à passer par delà leurs affrontements, le remettant même en selle pour réintégrer les cercles chiraquiens à l’aube de 2002. Non seulement Sarko est rancunier, mais il entend aussi tuer politiquement ceux qu’il accuse de ses malheurs, et Villepin le premier. Comme avec l’affaire Clearstream, derrière laquelle il voit une manipulation de Villepin. La justice tranchera : Villepin sera relaxé deux fois, en première instance comme en appel.

Alors Sarkozy est-il capable de jugement ou sacrifierait-il père et mère pour être président ? C’est bien la question qui se pose après la vision de ce documentaire. Coléreux, impétueux, irrespectueux, ne reculant devant aucune trahison pour faire avancer sa carrière, l’actuel président n’en ressort pas grandi. Les Fauvesun documentaire à voir et revoir, pour voter en conscience lors des présidentielles de 2012.

Sarko m’a tuer

Glaçant. C’est le premier mot qui me vient à l’esprit pour décrire le livre de Gérard Davet et Fabrice Lhomme, Sarko m’a tuer.

Le concept est simple : raconter par le menu les coups bas menés par la Sarkozie sur un échantillon représentatif de 27 personnalités kärcherisées : hauts fonctionnaires, élus, anciens ministres, magistrats, journalistes, grands patrons… Aucun corps n’a été épargné.

Pour chacun, l’objectif de la Sarkozie est simple : les neutraliser. Ou acter la mort, non pas physique, mais professionnelle ou politique de la cible.  Car il ne fait pas bon s’opposer au Président. Hyper coléreux, il peut assez vite péter les plombs lorsqu’il s’estime menacé. Et déchaîner ses foudres, en usant de toutes les ficelles que lui offrent le pouvoir. Ou le fait du Prince.

Pourquoi tant de haine ? Comme le dit Daniel Bouton, ex-patron de la Société Générale au moment du scandale Kerviel, fustigé pour avoir caché la crise pendant 4 jours afin d’y trouver une solution sans embraser les marchés : « Il a la même réaction à chaque mauvaise nouvelle : il fait tomber une tête, et voter une nouvelle loi. Il ne peut pas s’en empêcher, il a besoin de trouver un coupable ; tout événement désagréable provient de l’erreur de quelqu’un ».

Le sarkozysme, c’est une méthode : on est avec ou contre Sarkozy. Et si on est contre, on en subit les conséquences : tout crime de lèse Sarkozy est sévèrement puni. Car la Sarkozie sait s’acharner, que ses cibles soient puissantes ou misérables. Tous les moyens sont bons : pressions, manipulations, dossiers, fuites dans la presse, utilisation de la vie privée, mutations en forme de placards, …

En ce sens, cet ouvrage est passionnant, parce qu’il décrit précisément les moyens qui ont été utilisés contre chacune des personnes dont l’histoire est relatée dans ce libre. Mais ce livre est rude : à chaque page, le lecteur ressent la violence du rouleau compresseur Sarkozy, et des méthodes utilisées par ses sbires. Effroyable. Et donc, indispensable à lire !

Clearstream : Relaxe, take it easy !

Relaxe confirmée. Comme en première instance, Dominique de Villepin est donc relaxé par la Cour d’Appel dans le dossier Clearstream.

Ce jugement confirme ce que chacun savait : ce dossier était complètement vide. L’ancien Premier Ministre, pourtant promis à être pendu à un croc de boucher par Nicolas Sarkozy –lequel n’avait pas hésité à faire fi de sa présomption d’innocence, se torchant une nouvelle fois avec la loi- sort définitivement blanchi de ce long et douloureux épisode judiciaire.

Et pourtant jusqu’au bout, ce dossier aura été envenimé par les rumeurs du monde politique, exploitées par les uns et les autres. A la veille de cet épilogue judiciaire, l’avocat de Jean-Louis Gergorin n’aura pas hésité à utiliser le livre de Pierre Péan, sorti ce matin, pour demander le report du délibéré. Motif : dans l’ouvrage, le Président de la République mettrait en cause dans ce dossier Alexandra Djhouri, qui n’a jamais été entendu. L’avocat de Gergorin souhaitait donc un supplément d’enquête.

A la sortie du tribunal, Dominique de Villepin savoure son honneur retrouvé : « Après 6 années d’un acharnement sans précédent, après 6 années d’épreuves pour ma famille, la justice a reconnu pour la deuxième fois mon innocence ».

Et l’ancien Premier Ministre ne se prive pas de décocher quelques flèches. Sur le fonctionnement de la justice, d’abord : « Je veux saluer l’indépendance de notre justice qui a su résister face aux pressions politiques. Cette affaire a été initiée en 2005-2006, à la veille de l’élection présidentielle de 2007. Comme j’aimerais que cela puisse servir de leçons pour la présidentielle de 2012. »

Dominique de Villepin va plus loin, et revient entre les lignes sur les relents d’égouts de ces derniers jours, avec la sortie –opportune ?- de l’affaire Bourgi à quelques jours du verdict : « Je veux croire que cela contribuera à rendre notre vieux pays moins vulnérable à la rumeur et à la calomnie ».

Enfin en ce qui concerne son avenir politique, Dominique de Villepin reste dans le flou sur une éventuelle candidature –ce n’est ni le lieu, ni le moment- mais rappelle que désormais, s’il le veut bien, plus rien ne l’empêche de se lancer : « En ce qui me concerne, je sors renforcé de cette épreuve, et plus déterminé que jamais à servir les français ».

Si Dominique de Villepin a soigneusement évité ce matin d’évoquer le nom de l’actuel locataire de l’Elysée -sans être au beau fixe, leurs relations se sont un peu réchauffées, et l’ancien Premier Ministre n’est plus dans une opposition frontale ou de victimisation-, je ne saurais que conseiller au président de la République, que chacun sait fort colérique, d’écouter en boucle le titre de Mika : il ne faudrait pas qu’il nous fasse un malaise vagal…