SarkoShow : Une Primaire à un seul candidat

Pendant plusieurs semaines, nous avons assisté à la primaire socialiste.

Au programme, trois débats entre les six candidats, puis un dernier débat entre les deux finalistes. Ca, c’était la télévision normale.

Mais hier, les deux premières chaînes ont subitement fait un bon de quelques décennies en arrière, en se déguisant –à quelques jours d’Halloween- en ORTF.

Face aux deux vrais faux journalistes – Yves Calvi, le méchant qui grogne, et Jean-Pierre Pernault, le cire-pompes qui semble se limiter à lire les fiches transmises par l’Elysée- en mode époux Turange, le président de la République et futur-candidat-de-l’UMP-mais-faut-pas-le-dire-c’est-pas-le-moment a débattu avec lui-même lors de cette primaire à candidat unique. Car ne vous y trompez pas, Sarko est bien en campagne électorale, le tout sur le temps de parole de l’exécutif. Ainsi, il nous a délivré son SarkoShow du jour, en format tragi-comédie, et en cinq actes je vous prie.

Bah dis donc, si la primaire socialiste avait été diffusé sur les deux premières chaînes, que n’aurait-on entendu… Ce qui permet d’ailleurs de relativiser le succès de l’émission, qui a été vue par 12 millions de spectateurs. L’ennui de cette émission, c’est que c’était un peu comme se faire avaler par une publicité géante qui nous courrait après pendant 1h15, et contre laquelle on luttait. Avec au milieu de ce spot géant des morceaux d’un film catastrophe, genre Armageddon, où on allait tous mourir. Reste à savoir ce qui se passera Le Jour d’Après… Sachant qu’en attendant, avec la crise grecque qui menace de zigouiller la ZoneEuro, c’est l’Attaque de la moussaka géante !

Allez, fini la bande-annonce, place aux détails bien croustillants –ou pas- sur ce qui nous attend : attachez vos ceintures !

Au terme de cette émission, l’atterrissage fut difficile pour le téléspectateur. Pour faire court, cet entretien avec Nicolas Sarkozy se résumait, en gros, à expliquer en quoi il a sauvé l’Europe en attendant de sauver le monde dans quelques jours à l’occasion du G20, la France, ce qui fait de lui le meilleur des candidats, d’autant que lui il sait gouverner alors que le socialiste est un irresponsable, et donc il se déclarera le plus tard possible, mais mène évidemment déjà campagne.

Le tout en annonçant, mine de rien, que les prévisions de croissance était revues à la baisse, ce qui inclut de nouvelles mesures de rigueur pour boucler le budget… qui seront annoncées après le G20. Fini l’éclate –spéciale dédicaces aux chômeurs, malades, pauvres, assistés donc délinquants sociaux de toutes sortes-, on se sert encore la ceinture, et y’aura pas de gilets de sauvetage pour tout le monde !

Après avoir serré la vis, Sarkozy, qui rentabilise au maximum son temps d’antenne présidentiel, a clairement lancé sa campagne électorale. Du coup, après avoir expliqué ses exploits mondiaux que David Douillet pourrait qualifier « d’inimaginaux », il a cherché à mettre en valeur son bilan pour mieux se positionner dans le combat de 2012. Histoire de ne pas trop se laisser distancer. Parce que jusque là, son silence a permis à Hollande d’installer sa candidature. Ce qui a valu au corrézien d’être la cible de notre nain Prof d’un soir. Tout en délivrant habilement quelques nouveaux éléments de langage à une UMP en panne d’inspiration ces derniers temps.

Notre bon mètre s’est donc positionné par rapport à la gauche, en dessinant le clivage entre Hollande et lui. Une émission, donc, plus d’un candidat que d’un président. Ou de la difficulté de faire campagne en étant au pouvoir, le risque étant de donner l’impression aux Français qu’il ne s’occupe plus des affaires de l’Etat, ce qui ne lui serait pas pardonné en période de crise. C’est la raison pour laquelle il a martelé ne pas être candidat. Reste que le message était clair : il sera candidat. On peut ranger Juppé au placard, le meilleur d’entre nous ne servira pas cette année. Dommage, mais le petit ira. En même temps on s’en doutait.

Pour autant, Sarko a-t-il convaincu ? Rien n’est moins sûr. Comme d’habitude, il a enchaînés approximations et contre-vérités, avec un aplomb et une mauvaise foi qui font de lui un piètre président, mais un très bon candidat. Mais avant le candidat, les Français réclament un président et sur ce point, le constat n’est pas brillant. Bilan mitigé, détricoté, crise internationale, accord européen arraché au forceps et G20 qui s’assombrit avec l’éventuelle entrée de la Chine dans le FSFE, … S’il s’est voulu protecteur des Français, pas sûr que l’augmentation des taxes sur les mutuelles, le déremboursement des médicaments, le discours sur les assistés, etc… ne permettent de le croire.

Même en enjolivant les choses, il sera compliqué de compter sur les maigres éléments restants pour enthousiasmer les Français. D’autant que le fact checking, qui consiste à vérifier de manière plutôt pointue les racontars des politiques, est très tendance cette année : pas sûr que son discours résiste à une analyse poussée… Enfin, c’est un président fatigué qui s’est présenté devant les Français, butant parfois sur les mots, et commettant quelques lapsus. Certes, il a négocié toute la nuit avec Angela Merkel pour parvenir à un accord lors de ce sommet européen, mais l’image d’un président fatigué n’incite guère à lui renouveler son mandat.

Cet exercice du Moi Je reste donc très certainement un bon trip pour son égo, mais moi, personnellement, j’ai l’impression d’avoir eu des hallucinations tout au long de l’émission. A mon sens, Nicolas Sarkozy a trop voulu en faire, abusant du Je, évoquant rarement le Nous,  trop préoccupé par la seconde mission de cette émission : au-delà de la pédagogie sur la crise de la Zone Euro, se mettre en orbite pour 2012. Et finalement, au lieu d’Ariane, j’ai vu un simple feu de Bengale : ou comment cette émission a fait Pschitt…

SarkoShow, Acte V : Je serai candidat, je ne le dirai que plus tard, mais je fais déjà campagne

Vu que Sarko a sauvé l’Europe, bientôt le monde, la France, qu’il se croit bon candidat, et qu’il a un programme pour tenir jusqu’aux élections, vous vous doutez bien qu’il sera candidat.

Mais peut-il l’être, quels sont les obstacles sur sa route, et quand se déclarera-t-il ? Le dernier acte sera celui des révélations. Ou pas.

Cette séquence comment par un échange aussi vif que surréaliste sur les affaires, afin de déterminer la moralité de notre non-candidat. Alors qu’Yves Calvi interroge notre bon mètre sur les éventuelles informations dont il aurait pu avoir connaissance concernant un financement illégal éventuel de la campagne de Balladur de 1995, ce qui mène tout droit au dossier Karachi, il botte en touche.

C’était attendu, reste que la réponse n’est franchement pas à la hauteur d’un dossier aussi sensible que l’attentat de Karachi, qui a fait 14 morts dont 11 Français, et de la gravité des faits si un jour la justice démontrait l’existence de rétro-commissions sur les contrats Agosta et Sawari : Ca fait bientôt 17 ans, ne croyez-vous pas que s’il y avait des choses à reprocher à M. Balladur on aurait pas trouvé ? ».

Mais que pourrait dire Sarko sur ce dossier, sachant qu’il s’agit d’une instruction en cours –dont l’Elysée est au courant, certes, mais qu’il n’a pas à commenter- à part jouer sur la corde sensible en disant qu’ « on exploite la douleur de ces gens » -les familles ? Ces mêmes familles, qu’il s’était engagé à recevoir et à informer régulièrement. Ces mêmes familles qui, rappelons le, n’ont pas hésité à le mettre en cause.

Bref, il se pourrait que je ne sois pas la seule à penser qu’au bout de 17 ans, on puisse ne pas avoir trouvé tout ce qui concernait le financement de la campagne d’Edouard Balladur, notamment si ça figure dans les documents encore sous le sceau du secret défense ! D’autant que  les délibérations du Conseil Constitutionnel sur la validation des comptes de campagne de Balladur en 1995, ne seront accessibles qu’en 2020.

Sarko tente alors de faire l’amalgame entre plusieurs affaires dans lesquelles il est cité, pour mieux noyer le poisson. L’insolence avec laquelle il tente de comparer Karachi et les rumeurs de séparation entre lui et Carla me laisse pantois. Comment peut on oser réduire ainsi une affaire qui a fait couler le sang français au Pakistan ? Quel rapport avec des propos concernant une simple affaire de cœur, fusse-t-elle la sienne ?

Cabot, Sarkozy cherche à se faire plaindre sur le traitement qui lui serait réservé : « Vous savez un président doit rendre des comptes, la transparence je suis d’accord, la calomnie non ! ». Transparence, lorsque l’on entrave la justice, comme a tenté de le faire Brice Hortefeux en prévenant Thierry Gaubert lors de sa garde à vue dans le cadre de l’affaire Karachi sur les propos que sa femme avait tenu devant les policier ? Calomnie, alors que dans l’affaire Bettencourt, il a été démontré que Philippe Courroye avait prévenu l’Elysée trois mois avant de la décision qu’il allait rendre, lequel Elysée informe alors Liliane Bettencourt, rompant ainsi l’égalité de justice entre les parties ?

Et que dire de l’affaire Clearstream, qu’il ose rappeler, en se félicitant que des gens aient été condamnés. Des gens, oui. Gergorin et Lahoud. Mais pas le coupable qu’il avait désigné, Villepin, promis à un croc de boucher, et présumé coupable quelques jours avant le début des audiences de première instance. Manifestement la notion de présomption d’innocence est à géométrie variable : à appliquer en Sarkozie, pour ses amis Thierry Gaubert et Nicolas Bazire – « M. Bazire est mon ami, c’est un homme honnête (…) vous inventez la présomption de culpabilité »-, mais point lorsqu’il s’agit de son ancien rival Villepin, pour lequel il n’eût pas, lors d’un précédent entretien télévisé, la même retenue. La justice a depuis reconnu par deux fois l’innocence du présumé coupable Villepin.

Ce terme de présomption de culpabilité sonne comme un gimmick, qu’il ressort dès qu’il peut le placer. Ainsi, sur les affaires impliquant des policiers : « La police, la gendarmerie sont deux corps admirables (…) S’il y a des brebis galeuses il faut les sanctionner (…) ». Mais cela ne va pas jusqu’à son ami Bernard Squarcini, patron de la Direction Centrale des Renseignements Intérieurs (DCRI). Mis en examen pour atteinte au secret des correspondances, collecte illicite de données, et recel du secret professionnel pour avoir cherché à savoir, grâce aux fadettes, qui étaient les informateurs du journaliste Gérald Davet dans l’affaire Woerth-Bettencourt, Bernard Squarcini ne sera pas suspendu, et n’aura pas à démissionner. Parce que « Suspendre en attendant le jugement c’est de la présomption de culpabilité ».

Les ministres qui ont été touchés par des affaires sous Chirac – Renaud Donnedieu de Vabres en 2002, Pierre Bédier en 2004-  et qui ont du démissionner après leur mise en examen apprécieront. Tout comme ceux du gouvernement Balladur, Alain Carignon et Gérard Longuet, tous deux mis en examen et démissionnaires en 1994. Ou encore Yvan Colonna qui a été déclaré coupable et ennemi public numéro 1 par ce même Sarkozy sans aucun procès. Et que dire de David Sénat, membre du cabinet de MAM accusé d’avoir informé des journalistes dans l’affaire Woerth-Bettencourt, qui lui, fut démissionné  viré sur le champ, avant même d’avoir été mis en cause par la justice ?

D’ailleurs dans cette affaire, Brice Hortefeux, ami de trente ans de notre bon mètre, avait atteint à la présomption d’innocence de David Sénat et été condamné en référé fin 2010, avant de faire appel. Ou comment en Sarkozie, la présomption d’innocence est vraiment à géométrie variable, et dépend uniquement du fait du Prince, et de la proximité du mis en examen avec le Roi. Et circulez, y’a rien à voir : l’important, pour Sarkozy, c’est de « laisser la justice faire son travail ». Traduction : ne pas le mêler à cela. Même pas pour signer la levée du secret défense sur une affaire aussi grave que Karachi.

Heureusement, cette triste séquence nous aura aussi permis de rigoler, lors des deux lapsus de notre bon mètre. De là à dire qu’il n’était pas très à l’aise sur le sujet, il n’y a qu’un pas. Le premier lapsus porte sur sa candidature. Il s’emmêle les pinceaux, laisse penser qu’il est candidat pour 2012, puis fait marche arrière lorsqu’il se rend compte de la boulette, toute l’émission visant justement à suggérer sa candidature sans jamais l’annoncer. Sa-vou-reux. Et quelques minutes plus tard, questionné sur les affaires dans la police, Sarko sort cette perle : « Les policières ont des corps admirables ! ». Avant de se reprendre, en affirmant que la police et la gendarmerie sont des corps admirables. Priceless.

Le thème suivant porte sur les sondages, ô combien importants pour les élections, d’autant plus lorsque l’on sait qu’en Sarkozie, c’est une religion : ils sont commandés, scrutés, analysés, et à partir de ces données se décide la stratégie du non-candidat. Et bien là, motus. Notre bon mètre tente de prendre de la hauteur –ah ah- et botte en touche : « Vous les commandez, vous les commentez, et le travail du président c’est de faire son travail ». Hum, doit on lui rappeler que le rapport de la Cour des Compte de 2008 avait pointé l’existence d’une convention entre l’Elysée et un cabinet d’études pour la réalisation de sondages pour un montant de 1,5 millions d’euros, le tout en dehors de toute procédure de marchés publics ?

Bon, parlons franchement, vu la côte de popularité de notre bon mètre, qui ne cesse de descendre dans l’estime populaire, on peut aisément comprendre qu’il ne commente pas les sondages, et prétendre ne pas avoir le temps de s’y intéresser car il travaille, pour le bien du bon peuple, lui : « Nous pouvons prendre des décisions qui ne sont pas populaires mais les Français jugeront ensuite  (…) Mes prédécesseurs, vous vous rappeler leurs sondages ou ce qu’ils ont fait ? (…) Moi je travaille… (…) Les Français attendent que les responsables fassent leur travail, vous êtes des commentateurs, mais moi je suis un acteur ». Hum, tout ça sent quand même un peu fort la méthode Coué.

Dernières minutes, dernières occasions de tirer quelques salves à l’attention du PS, en reprenant notamment l’accusation lancée par Martine Aubry contre François Hollande d’être un candidat du système : « Avez-vous oublié que tous les candidats du système même quand je les ai soutenus, ont été battus ? ». Eclair de lucidité, mais mortier à petite portée. J’avoue toutefois avoir bien rigolé lorsque Sarko a précisé, et invité les responsables politiques à parler de leurs projets, et à moins se critiquer mutuellement. S’il visait probablement la semaine de second tour entre Aubry et Hollande, reste que cela s’applique plutôt à l’UMP, qui a organisé la semaine dernière une convention sur… le projet du PS. Message transmis.

Enfin pour terminer, Sarko fait le point sur son avenir proche, en sortant de sa poche la carte du Président Protecteur : « j’ai un travail de président à faire, je dois protéger les français ». Il est certain que vu le contexte économique de crise, les Français comprendraient mal qu’il se lance dès maintenant dans la bataille. Coincé dans son rôle de président, lui qui excelle en tant que candidat, il décide donc de se raccrocher à ce que firent ses prédécesseurs, et de se déclarer le plus tard possible, « fin janvier-début février ».

Avant de rappeler que Mitterrand s’était déclaré en mars 1988 et Chirac en février 2002. Un changement de stratégie inhérent à la crise, pour celui qui songeait initialement faire campagne dès cet automne. Sarkozy a-t-il en tête la configuration dans laquelle se trouvaient alors Mitterrand et Chirac ? Si ces deux présidents ont été réélus, ils sortaient tout deux d’une cohabitation, ce qui n’est pas son cas. Sarko ne pourra pas jouer dans la rupture, son gimmick de 2007, et devra assumer un bilan qui pourrait lui coûter cher.

Alors qu’Yves Calvi l’interroge deux fois sur la possibilité qu’il ne soit pas candidat, l’actuel locataire de l’Elysée répond simplement : « Nous verrons en janvier, février (…)J’ai fait mon choix : celui d’être président de la République jusqu’à la dernière minute et de ne pas embêter les Français avec mes ambitions… ». En d’autres termes, Sarko verra en fonction de la situation, mais cette émission a bien mis en exergue sa volonté de se présenter.

Reste que cette dernière phrase laisse songeur. La dernière minute étant le 5 mai 2012, on peut toujours se prendre à imaginer qu’il resterait vraiment président jusqu’à la fin, et laisserait alors passer la date limite fixée par le Conseil Constitutionnel pour déposer sa candidature, en mars, et ne pas se représenter. On peut toujours rêver.

SarkoShow, Acte I : J’ai sauvé l’Europe et dans quelques jours je vais sauver le monde

Les deux sommets européens passés, ayant accouchés dans la douleur d’un accord arraché au forceps –pour faire comme Carla ?- il reste maintenant le G20, les 3 et 4 novembre prochain à Cannes.

Dernier temps fort de la présidence française, mais aussi gros risque pour Nicolas Sarkozy. Le programme est ambitieux, notamment en ce qui concerne la régulation mondiale et la réciprocité. Autant dire que si la montagne accouche d’une souris, ce sera un sacré handicap pour Sarkozy, qui joue depuis la crise de 2008 sur son image de sauveur, sans avoir réellement de bilan pérenne en la matière. Des rustines ont été posées, certes, mais elles ne tiennent déjà plus. C’est dire s’il joue gros.

D’entrée, Yves Calvi demande si nous sommes sortis de la crise ou si nous colmatons la brèche. Selon le président, « ni l’un ni l’autre ». Et repart sur un long historique partant de la crise de 1929, pour finalement arriver à la crise depuis 2008 : « Lorsque les américains ont décidé de laisser tomber Lehman Brothers cela a entraîné une catastrophe dans le monde entier ». Donc c’est la faute des Ricains. Ouais, mais si les Ricains n’étaient pas là, nous serions tous en Germanie, à parler de je-ne-sais-quoi, à saluer je-ne-sais-qui… puis il enchaîne, en disant que nous –les européens- ont a essayé d’éviter ça. Bref, on a sauvé le monde, parce que sinon on allait tous mourir : mode Superman enclenché. Enfin presque : « nous sommes face à une crise de la dette colossale qu’il s’agit de régler ». Parce qu’avant Lehman Brothers, y’avait pas de problème de la dette peut être ?

Revenons à l’accord de cette nuit. Pour le président, déclarer la Grèce en faillite aurait entraîné la totalité de la zone Euro. Donc « Les Grecs font des efforts mais comme ils ne pouvaient pas rembourser 200 milliards d’euros nous avons demandé aux banques d’effacer 50 % de leurs créances. » Hum… amusant lorsque l’on sait que quand DSK avait évoqué cette hypothèse, Fillon l’avait traité d’irresponsable. Doit on comprendre que notre bon mètre serait irresponsable ? Ou qu’il a baissé son slip de Superman ? Au passage, ça n’est pas 50% de la dette grecque qui est effacée, mais 50% de sa dette privée. Elle doit quand même encore un paquet aux Etats et institutions internationales (Etats, FMI, FESF, BCE) mais bizarrement Sarko n’en pipe mot.

Jusque là, on a surtout compris qu’on n’a pas sauvé la Grèce, mais surtout les banques. Et le vilain Yves Calvi ose poser justement cette question là. Et je vous le donne en mille, Sarko botte en touche, en donnant un bon coup de bâton aux grecs, qui ne sont pas blanc-blanc… Et n’y va pas par quatre chemin : « La Grèce est rentrée dans l’euro avec des chiffres qui étaient faux et elle n’était pas prête, son économie n’était pas prête à rentrer dans la zone euro et nous en avons payé les conséquences ces derniers mois ». Mais n’oubliez pas, c’est le candidat qui vous parle… Il n’hésite donc pas à rajouter qu’elle est entrée dans la zone Euro en 2001, et qu’il n’était pas aux affaires. Ca n’est pas sa faute à lui : mode Lolita enclenché. Au passage, Jospin, Chirac, bandes de gens qui soutenez Hollande de plein gré ou par humour corrézien, suivez mon regard…

Sarko passe ensuite sur le douloureux passé entre la France et l’Allemangne. Décidément ce soir on voyage dans le temps. Après le XXème siècle et sa crise de 1929, nous voilà reparti jusqu’en 1870, puis les deux guerres mondiales. C’est un bon moyen pour les élèves de 3ème de réviser rapidement et à moindre frais leur BEPC. Autant rentabiliser le cours magistral de notre cher nain Prof. Sauf que pas trop quand même, vu que pour Sarko, nous avons eu trois guerres avec l’Allemagne dans le même siècle. Aïe Aïe Aïe… D’ailleurs le voilà qui verse dans le mélo : « Puis des hommes ont dit on va ensemble construire la paix… ».

Je me vois déjà, courant nue dans les prés, un bouquet de marguerites dans les mains, et un peace and love tatoué sur le sein gauche, hurlant « Angela, ich liebe dich » à tout bout de champ, c’est le cas de le dire. Ah ah. Bref, je rêve sur ce nouvel épisode des Feux de l’Amour version amitié franco-allemande, celui dans lequel Nicolas et Angela sont un peu en froid –Nicolas balance Angela et trouve leur couple moins francs que d’autres couples franco-allemands dans le passé- mais se décident finalement à signer un accord européen pour ne pas qu’on se foute de leur gueule au G20.

Et n’allez pas dire, odieux que vous êtes, que cet accord n’est pas brillant et qu’il met seulement l’Euro sous perfusion. Vous seriez alors d’odieux colporteurs de ragots, tel ce Jacques Sapir, économiste pro-démondialisation, qui publie ce soir dans Marianne son analyse sur ce qu’il appelle « le pire accord envisageable ».

Parce qu’il entraînera selon lui la baisse de l’indépendance de l’Eurpe en internet –poids décisif de l’Allemagne et non plus du couple franco-allemand- et en externe –entrée probable de la Chine dans le FESF ce qui au passage, annule de facto toute tentative de mesure protectionniste, et met à mal la négociation sur la réciprocité-, ne rassurant que temporairement les marchés qui comprendront que ce n’est pas suffisant et reprendront rapidement la spéculation.

Jacques Sapir, lui, préconisait plutôt l’auto-dissolution de la zone euro. Et Sarko n’a pas répondu à cette tendance là, pourtant croissante dans l’opinion, des extrêmes à Montebourg. Mine de rien, ça fait tout de même entre 15 et 20% de personnes qui sont lâchées dans la pampa sans avoir eu la moindre contre argumentation. Ou le danger de faire une primaire tout seul, sans contradiction. Bref, de toutes façons on va tous mourir. Ou comment Superman a baissé sa culotte, faute d’avoir les moyens de s’en acheter une propre.

Et Pernault (Ricard ?) refroidit encore un peu l’ambiance autant que le glaçon dans le Pastis (Ricard !) : « Combien ça coûte aux français ? ». Le mec monomaniaque. Depuis le lancement de l’émission Combien ça coûte en 1990 –eh oui, ça date !- JPP n’a jamais quitté son fond de commerce. Donc selon Sarko, « La France a prêté à la Grèce 11,5 milliards d’euros. Aujourd’hui ce prêt n’a rien coûté au contraire, cela a remporté des intérêts ».

Mouais mouais mouais. Donc ça ne nous aurait pas coûté d’argent, ça nous aurait même rapporté. Parce que la Grèce ne peut pas payer sa dette, mais elle peut payer ses intérêt. Comme nous, quoi. Et la marmotte, elle met le chocolat dans le papier d’alu ? Parce que dans la vraie vie, on a tout de même payé tout ça par le Plan de Rigueur de Fillon hein. Faudrait peut être voir à pas trop nous prendre pour des jambons… Parce que tous les buveurs de Coca s’en souviennent. Même si notre président s’appelle Ni-Cola(s). Ah ah.

Bon sinon, entre deux fautes de syntaxe qui nous rappellent que le président qui met en place un examen de français plus drastique pour les étrangers visant la naturalisation ne le réussirait sans doute pas lui-même, on apprend ça a coûté 100 milliards aux banques. Bah oui, 50% de 200 millions d’euros. Jusque là on sait encore compter… Les banques qui, d’ailleurs, étaient bien obligées de jouer le jeu, sinon elle faisait face à un défaut de paiement –de la Grèce- et boum, le monde explosait. Et on allait tous mourir. Sarko se rengorge d’ailleurs, pas à une contradiction près : « Le marché c’est la quintessence du court terme (…) mais je préfère avoir une bourse qui augmente et des marchés qui nous font confiance ».

Ainsi s’achève l’acte I et l’explication du sommet européen sur cette anaplodiplose : Sarko a sauvé le monde. Et fait des figures de style, à l’insu de son plein gré. Et si on passait à la France ?